Au printemps 1942, le monde est en guerre depuis presque trois ans. L'Allemagne Nazie, le Japon, l'Italie et leurs alliés sont au sommet de leurs conquêtes. Plus de la moitié de l'Europe est entre leurs mains. Les forces allemandes et italiennes campent de l'Atlantique aux portes de Moscou, du Cap Nord à la frontière franco-espagnole, de la mer du Nord à la Crimée. Leurs forces occupent une partie de l'Afrique du Nord. Le Japon tient une grande partie de la Chine ,de l'Asie du Sud Est et des îles du Pacifique. La menace de débarquement en Angleterre est toujours présente. Sur mer, les sous-marins nazis, italiens et japonais coulent plus de tonnes de navires que les alliés n'en construisent. Pour les Alliés, la situation n'est guère brillante. A l'Ouest seule l'Angleterre a pu résister à l'invasion au prix de lourdes pertes chez ses pilotes, les Etats Unis se remettent à peine de l'attaque surprise de Pearl Harbor. A l'est , l'URSS ne doit qu'à l'hiver d'avoir pu éviter l'invasion de Moscou, les autres nations occidentales sont sous la botte nazie. Dans le Pacifique, les Américains sont encore sur la défensive, l'Angleterre a perdu la prédominance en quelques jours. France, Pays Bas sont chassés de leurs colonies. Les usines alliées qui contribueront à la victoire finale ne produisent pas encore à leur maximum. Pour l'instant, seule l'URSS continue le combat sur le front de l'Est et les Alliés se contentent de porter des coups d'épingles sur le front de l'Ouest. A chaque conférence, le maître de l'URSS, Staline réclame l'ouverture d'un second front à l'Ouest pour alléger le front de l'Est.
En Grande Bretagne, des millions de soldats venus du monde entier attendent l'arme aux pieds qu'on les utilise. Venus des Indes, d'Afrique, du Canada, des Etats-Unis, d'Australie, de Nouvelle Zélande, des volontaires évadés de l'Europe occupée attendent avec impatience d'agir. Les premiers arrivés cantonnent dans des milliers de camps dans toute l'Angleterre depuis presque 3 ans. Même si les incidents avec la population sont rarissimes, il faut occuper ces hommes.
Mais si toutes ces raisons n'étaient pas les bonnes, si les raisons étaient plus politiques que militaires. Ce débarquement a-t'il été décidé dans le secret des cabinets ministériels, dans les anti-chambres des conférences internationales ? Connaîtra-t-on un jour les vrais raisons de ce raid ?
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"La guerre totale, on le sait, c'est
une attaque générale sur tous les fronts et par
tous les moyens, si diaboliques soient-ils. C'est la guerre contre
les hommes, les femmes et les enfants. Pour affronter la guerre
totale, il n'y a qu'un seul moyen, c'est l'effort total - effort
non pas seulement d'une journée, d'une semaine ou d'un
mois, mais l'effort soutenu de tous les jours jusqu'à la
victoire".
William Lyon Mackenzie King,
Premier ministre du Canada
(discours à la radio le 2 février 1941)
La Direction des Opérations Combinées élabore plans après plans, organise des coups de mains à effectif limité, notamment ceux des iles Lofoten, de Saint Nazaire et de Saint-Jouin-Bruneval qui réussissent avec des pertes humaines conséquentes pour Saint Nazaire. Roosevelt, Churchill, et leurs états majors demandent à cette direction un plan d'assaut contre un grand port, pour tâter le terrain et préparer le grand débarquement envisagé pour 1943. Compte tenu des possibilités techniques, du rayon d'action des chasseurs, ce ne peut qu'être qu'un port de la Manche. Cherbourg est envisagé, mais il est trop loin pour les avions. Justement dans les cartons de la Direction des Opérations Combinées existe un projet baptisé Sledgehammer. Il est ressorti et amplifié. Dix divisions britanniques et deux américaines sont prévues sans espoir de rembarquement, mission donc de sacrifice. Refus des Anglais, il n'est pas question de sacrifier tant d'hommes. Sledgehammer est abandonné.
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Un grand nombre de plans sont élaborés notamment Gymnast qui deviendra Torch (débarquement en Afrique du Nord de 1942), Round-up qui deviendra Overlord (prévu en 1943, il sera effectué le 6 juin 1944), d'autres sur Calais, Boulogne ou Aurigny, même un raid de blindés sur Paris. Le 4 avril 1942, Dieppe est choisi et les préparatifs sont lancés. L'opération Rutter voit le jour, un raid en force sur Dieppe le temps de deux marées. Dieppe n'est qu'à 108 kilomètres des côtes anglaises, dans le rayon d'action de la chasse. Dieppe possède une plage suivie d'une esplanade de 1,5 kilomètre, ses défenses semblent faibles (on verra ce qu'il en est), un aérodrome est situé à la sortie de la ville. Va pour Dieppe.
De projets en projets, un débarquement en force avec parachutages et utilisation de planeurs sur les ailes ou les arrières de l'ennemi est retenu. Le principe d'un bombardement aérien et naval sur la ville et le port est retenu avant le débarquement . Par contre l'appui d'un cuirassé est refusé. L'amirauté ne veut pas risquer un grand navire dans la Manche.
La décision est pratiquement prise, reste à préparer le raid.