Front d'orient 1918 :
Au milieu de 1918, sur ce front, les Alliés (Français, Britanniques, Italiens, renforcés désormais par des Grecs) disposent de 650 000 hommes avec 2 000 canons contre 500 000 Bulgares et Allemands avec 1 850 canons . Les troupes françaises comportent les 156e, 57e, 122e, 76e, 30e, 75e Divisions d'infanterie et les 11e et 17e Divisions d'infanterie coloniale et une brigade de cavalerie. Les Serbes ont 6 divisions, 4 divisions sont britanniques et un corps d'armée est italien. Les Russes ont tout simplement disparu. En réalité, le gl Franchet d'Esperey doit laisser 250 000 hommes dans les services de l'arrière et il va devoir renvoyer en France 26 000 hommes malades.
Franchet d'Espérey, fait commencer les travaux préparatoires à loffensive. Il fait construire de nouvelles routes, poser de nouvelles voies ferrées de 60. Les liaisons télégraphiques et téléphoniques sont multipliées. Des cartes de tous les secteurs sont dressées. Les premiers mouvements de troupes s'effectuent parfaitement et vers le 10 septembre, toutes les unités sont en place (75 bataillons dans le secteur de la Moglena). Une formidable artillerie se déploie, face aux Bulgares, sur un front de 33 kilomètres. La bataille va pouvoir se déclencher. A l'extrême-gauche déjà, du 6 au 10 juillet, le 372e Régiment d'infanterie, le Régiment de marche des Spahis marocains et un Tabor albanais enlèvent les crêtes du Bosnia.
Le 14 septembre, 08H00, la préparation d'artillerie commence. Elle va durer toute la journée. Le 15 septembre, à 05H30, tous les canons se taisent, et les colonnes d'assaut s'élancent à travers le brouillard. Le 1er bataillon du 148e Régiment d'infanterie, gravit les rochers à pic du Sokol, sous le feu des mitrailleuses bulgares. Les pertes sont terribles. Une poignée d'hommes seulement arrive au pied des tranchées ennemies et attend des renforts. Les renforts n'arrivent pas, alors à la nuit les soldats repartent à l'assaut et enlèvent à 22H30 la position convoitée. Les compagnies de lance-flammes ont nettoyé les bunkers allemands. Le Dobropolje a été emporté à 16H00, au prix de pertes moins graves, par les 45e et 84e Régiments d'infanterie. Les Bulgares se replient en abandonnant huit canons.
La 17e Division coloniale (1er, 3e, 54e Régiments d'infanterie coloniale, 95e Bataillon de Tirailleurs sénégalais), emporte en deux heures et demie le Kravitsa, et, malgré le bombardement intense, repousse cinq contre-attaques ennemies. La première ligne bulgare est tombée. Les pertes françaises sont sérieuses : 63 officiers et 1957 hommes; mais le résultat est acquis. La I° Armée Serbe s'est lancée à l'attaque en pleine nuit, après la prise du Sokol par le 148e d'infanterie. Elle a dépassé rapidement la rivière Lechnitza. A sa gauche, les Marsouins du 42e Régiment d'infanterie coloniale et un bataillon de la 3e Division grecque se sont emparés des hauteurs à l'ouest de Gradechnitza, malgré une résistance acharnée de lennemi. Alors, les divisions serbes dépassent toutes les unités françaises, qui viennent de leur ouvrir la route. Le 16 septembre, les côtes 1810 et 1825 sont conquises, les hauteurs de la rive droite du haut Poroi sont emportées.
Le 17 septembre, les Bulgares tentent d'enrayer l'avance alliée mais leurs renforts successifs s'épuisent en vains efforts. Ils doivent abandonner les crêtes du Kouchkov Kamen. Le 4e Régiment d'infanterie coloniale élargi encore la brèche. La 1ere Division coloniale (34e, 35e, 42e et 44e Régiments d'infanterie coloniale et 21e Régiment d'artillerie coloniale), et la 3e Division grecque se joignent à cette progression, en prolongeant le front jusqu'à la Cerna. L'avance réalisée atteint déjà 15 kilomètres en profondeur sur 25 kilomètres de largeur. Le butin s'élève à 3 000 prisonniers bulgares, 50 canons et une bonne quantité de mitrailleuses allemandes.
Le 18 septembre, après une canonnade effroyable, les forces anglo-grecques se mettent en marche. Les Grecs parviennent à enlever les premières lignes ennemies, mais la 22e Division Britannique est clouée au sol par des mitrailleuses. Le général anglais Milne fait reprendre la préparation d'artillerie dans les mêmes conditions. Les Grecs réussissent à emporter The Orb et The Hilf ; mais les Anglais n'avancent pas, et le 2e bis de Zouaves, venu pour les soutenir, ne peut même pas déboucher.
Le 19 septembre, la 16e Division coloniale (4e, 8e, 37e et 38e R. I. C.) part à la conquête de la Dzena et de la Porta. Après des combats au corps à corps et à la grenade, les objectifs sont conquis. Les Serbes atteignent, au nord de Bunarche, le cours moyen de la Vatasha. Le 21 septembre, les Serbes progressent encore et atteignent Kavadar, déborde le massif de Drachevishko Brdo, malgré les réactions de renforts bulgaro-allemands. Ils atteignent Negotin, où un butin considérable tombe entre leurs mains. Les Bulgares refluent en désordre, massacrant tout sur leur passage. Dans la nuit du 21 au 22 septembre, la II° Armée Serbe, progresse et enlève Krivolak, où elle trouve un important matériel roulant et de précieux convois de vivres. Au matin du 22, les Serbes entreprennent le passage du Vardar. Le 23, ils tiennent les crêtes de Kara Hodjali et de l'Orta Bajir, qui commandent la voie ferrée de Negotin. Le 24, la Division Timok gravit les pentes de la Gradets Planinà pour redescendre dans la vallée de la Kriva Lokavica ; elle est appuyée par la droite de la division yougoslave, tandis que la gauche de cette division est engagée depuis vingt-quatre heures dans une violente bataille au sud de Gradsko, avec la 17e division coloniale française (gl Pruneau).
Le 24 septembre, le commandant de la 17e division coloniale, conscient que les ennemis sont solidement retranchés et sont pourvu d'une artillerie nombreuse, entreprend un large mouvement tournant par Cicevo et le monastère d'Archangelsk. L'ennemi n'a pas le temps de s'opposer à cette manuvre. Les Marsouins emportent Archangelsk. Alors le front Bulgare s'effondre, et à 15H00 la division yougoslave pénètre dans Gradsko où elle met la main sur tous les parcs de ravitaillement du gl allemand von Scholtz. La veille, la I° Armée Serbe a dépassé, entre Pletvar et Drenovo, la chaussée de Prilep à Gradsko. Au 1er Groupement de divisions du gI d'Anselme, l'avance a été moins rapide par suite du manque de ravitaillement. Mais, le 24 septembre, ce groupement s'est rapproché du Vardar dont il borde le cours, de Demir-Kapou à Pardovitsa. Grâce à cette avance, le gl Milne peut mettre en mouvement ses colonnes. Il suit la retraite bulgare et vient s'établir, le 24, sur la ligne Cernitse-Causli-Bazarli, à l'ouest et au nord du lac Doiran. La cavalerie serbe poursuit les fuyards bulgares alors que l'aviation française bombarde sans répit les formations affolées.
Le gl Henrys avec sa 76e Division a reçu l'ordre de marcher directement de la région de Monastir en direction de Prilep, afin d'appuyer les efforts serbes. Or il n'a pas dartillerie lourde, celle-ci étant employée ailleurs. Il doit à tout prix emporter les positions des côtes 1248 et 1050. Durant cinq jours, toutes les attaques de la 76e Division (157e, 210e et 227e Régiments d'infanterie) se brisent devant la côte 1248. L'assaut est suspendu. Cependant l'avance victorieuse des armées serbes commence à déborder par sa gauche la XI° Armée allemande. Le gl Henrys au lieu de s'obstiner en attaques frontales extrêmement coûteuses, va lier son mouvement à celui de la I° Armée Serbe, vers le nord-ouest et déborder la côte 1248.
Dès le 16 septembre, la 11e Division coloniale (34e, 35e, 42e et 44e R.I.C) a accompagné les progrès serbes et gagné du terrain sur les deux rives de la Cerna. La rivière a même été franchie à Cebren, et le 42e colonial a enlevé Chaniste. Aussitôt les défenseurs côte 1050 se replient et leurs positions sont occupées.
Le 22 septembre, la cavalerie italienne occupe Kanaflarsi, en direction de la route Monastir-Prilep. L' artillerie lourde, devenue disponible, commence à couper les routes de Pribilci et de Resna, sur les derrières de la XI° Armée allemande. La 156e division française (175e et 176e Régiments d'infanterie et 1er régiment de marche d'Afrique) va pouvoir se mettre en marche. Le gl Jouinot-Gambetta avec ses cavaliers des 1er et 4e Chasseurs d'Afrique et le régiment de marche de spahis Marocains a franchi, difficilement, entre Nivak et Dedebal, les anciennes positions bulgares, hérissées de barbelés.
Le 23 septembre, la débâcle ennemie se poursuit. Jouinot-Gambetta reçoit la mission d'atteindre Uskub avant les fuyards. Il pousse des reconnaissances jusqu'aux abords de Prilep et sur la route de Krushevo. Le 23 septembre, à 15H00, il pénètre dans Prilep incendié par les Bulgares. Jouinot-Gambetta remet la ville à un bataillon du 42e colonial et repart. Il engage son avant-garde le 24 septembre, au matin, sur la piste Varos-Dolgatské, qui conduit à Uskub par Lovitska. Le 4e Chasseurs d'Afrique rencontre une vigoureuse résistance et ne peut se dégager qu'avec l'aide des coloniaux de la 11e division et des troupes grecques. Jouinot-Gambetta, par précaution a fait reconnaître d'autres itinéraires en poussant vers Vélès sa section d'auto-mitrailleuses et un peloton de spahis marocains, et en dirigeant sur la piste de Drenovo-Gabrovnik un peloton de Chasseurs d'Afrique. Il décide de se porter sur Uskub en liaison avec l'Armée Serbe qui marche sur Vélès. Dès le soir, les cavaliers se dirigent vers le col de la Babouna. Ils rejettent brillamment d'Herlevski et d'Homoran deux bataillons ennemis, enlèvent leur artillerie, franchissent la Babouna et gagnent Jenikeuy (25 septembre). La 11e division coloniale rencontre une vive résistance au pied des hauteurs de Krushevo. Le gl Franchet d'Espérey oriente ses forces en direction d'Uskub, derrière la cavalerie de Jouinot-Gambetta.
Au matin du 25, le front ennemi au nord-ouest de Monastir est percé. Le 26, l'ennemi bat en retraite, abandonnant le Peristeri et la région des lacs. A partir du 27, les Allemands fléchissent à l'ouest du lac d'Ochrida. Tous les efforts convergent en direction de Kicevo. Franchet d'Esperey craint que le général Henrys se laisse attirer vers le nord-ouest. Nos avions signalent la retraite de l'armée von Steuben sur la chaussée de Kalkandelen. La route, entre Kicevo et Gostivar, est encombrée de véhicules. Le gl Henrys reçoit donc l'ordre de diriger toutes ses forces vers la Babouna et Vélès. De faibles détachements continueront seuls la poursuite de l'adversaire en direction de Kicevo. La bataille pour Vélès dure toute la journée du 26. Les Bulgares épuisés reculent, au matin du 27, sur le front Kozle-Kliseli-Borilowek (rive gauche du Vardar, où passe la grande route d'Uskub). Mais la I°Armée Serbe surgit, au contact même des positions ennemies. Des combats acharnés s'engagent sur la rive gauche du Vardar, la progression se ralentit.
Jouinot Gambetta choisit pour gagner Uskub l'itinéraire Drenovo-Paligrad, qui l'amène à franchir le massif de la Golesnitsa Planina. Décision audacieuse car il n'a que des cavaliers et pas de fantassins, ni d'artillerie. L'ennemi, considérant cette route impraticable, a négligé de la surveiller. Il faut d'ailleurs toute l'habileté des cavaliers pour escalader les rochers. Et la chaleur devient accablante. Hommes et chevaux peinent pendant des heures. La nuit tombe. On s'élève jusqu'à 1800 mètres par des sentiers abrupts pour redescendre bientôt à 1 200 mètres. Mais l'enthousiasme ne faiblit pas. Le 26 au soir, Jouinot-Gambetta a appris la chute de Vélès. Il presse plus encore ses cavaliers afin d'atteindre en toute hâte le pont de Dracevo. Aucun ennemi sur la piste que suit sa colonne. Seule, une compagnie allemande est signalée très loin en avant, se hâtant vers Uskub. Le 28 au soir, à 23 heures, la cavalerie française atteint Dracevo, sans laisser derrière elle un traînard. C'est déjà un exploit. Elle s'apprête à déboucher le 29 dès l'aurore.
Au matin du 29, un épais brouillard favorise les Français. Les Bulgaro-Allemands ne distinguent nos cavaliers qu'au dernier instant. Une panique indescriptible s'ensuit. Le lt-col Guéspereau s'empare au galop, avec ses Spahis marocains, des hauteurs de Vodna. Le lt-col Labauve, avec le 4e Chasseurs, s'engage vers Lisica. Il est arrêté par des éléments adverses que soutiennent un train blindé. Les cavaliers mettent pied à terre et réussissent à repousser les Bulgares. A 08H15, appuyé par les Spahis Marocains, le 4e Chasseurs entre au galop dans Uskub. Les Spahis vont ensuite barrer la route de Kalkandelen à la retraite allemande. Le colonel de Bournazel, avec le 1er Chasseurs, soutient une lutte très dure aux lisières d'Urumli. A midi seulement, l'adversaire est chassé de ses positions. Le 1er Chasseurs pousse aussitôt vers la voie ferrée de Kumanovo qu'il a mission de couper. Malheureusement, ils n'ont pu empêcher à six trains de matériel de s'échapper, et le train blindé est passé. Le manque dartillerie a empêché le 4e Chasseurs de détruire, en gare dUskub, tous ces trains. Les journées du 29 et du 30 septembre se passent en durs combats. Les Bulgares arrivent même aux lisières de la ville. Ils sont repoussés par les Spahis marocains. Au matin du 1er octobre, les Marsouins, venus à pied, arrivent. Leur intervention est décisive, lArmée allemande ne pourra plus briser le barrage. Dailleurs le Gouvernement Bulgare a décidé de capituler le 29 septembre ; il va livrer toute larmée de son allié Von Steuben.
Le 30 octobre, ce sont les Turcs qui abandonnent la lutte. Constantinople est occupé. Le 28 octobre, les Tchécoslovaques proclament leur indépendance puis le 1er novembre ce sont les Hongrois qui se séparent de l'Autriche. Le 4 novembre ce qui reste de l'Empire Austro-hongrois signe l'armistice avec les Alliés. Aucune troupe allemande na pu être dégagée de ce front pour être envoyée en France. Le groupement Berthelot fort de 3 divisions s'apprête à franchir le Danube depuis la Bulgarie pour aider les Roumains. Le 11 novembre, le franchissement va être effectif.
Le gouvernement français stoppe l'offensive des troupes françaises vers Vienne et les dirigent vers la Roumanie. 300 000 soldats français ont combattu sur ce front d'orient. L'aventure de la 156e Division s'arrêtera sur les quais d'Odessa (aujourd'hui en Ukraine) en 1919.
70 000 des soldats de l'Armée d'Orient ne rentreront jamais en France ou en Afrique du Nord. Ils dorment pour toujours dans des cimetières oubliés quelque part dans les Balkans.
Italie 1918 : l'armée italienne humiliée en 1917 à Caporetto prend sa revanche à Vittorio-Venetto le 27 octobre où les Autrichiens subissent une lourde défaite. Les 138e d'infanterie de Bellac, 311e d'Antibes, 340e de Grenoble et 341e de Marseille transportés en Italie en début d'année sont déjà retournés sur le front français.