Vosges 1914-1915 : Au début décembre 1914, la 66e Division (215e d‘infanterie d'Albi, 28e d'infanterie de Paris, 30e Chasseurs de Grenoble) attaque à la baïonnette pour libérer les communications entre Thann et Belfort. Un sommet est conquis mais à quel prix. Attaque de nouveau le 10 décembre par les 57e et 66e Divisions (359e d’infanterie de Bastia, 152e d’infanterie de Gérardmer, 15e Chasseurs de Remiremont, 28e Chasseurs de Grenoble, 371e d‘infanterie de Belfort, 204e d‘artillerie). Les combats se poursuivent jusqu‘au 3 janvier sans succès notables malgré le renfort du 218e d'infanterie de Pau. La rigueur du climat va interrompre les opérations pendant plusieurs semaines, mises à profit pour améliorer les installations et les communications.

Le 19 février, ce sont les Allemands qui passent à l’offensive. Sur le Reichakerkopf, la 47e division est en difficulté et rappelle ses unités au repos qui mettront 8 heures à remonter en ligne. Malgré l'héroïsme des Chasseurs (14e bataillon de Grenoble) et des territoriaux (3e Territorial), le sommet est perdu. Le sommet est repris le 6 mars par le 23e Chasseurs de Grasse et reperdu le 20 mars.

Sur l’Hartmannswillerkopf (le Vieil Armand), le sommet est tenu le 19 janvier 1915 par une compagnie du 28e Chasseurs de Grenoble. L'Allemand attaque après un violent bombardement. Les 28e Chasseurs, 13e de Chambéry, 27e de Menton et 53e de Chambéry montent en renfort. Ils sont cloués sur place et ne peuvent atteindre le sommet. Lorsque le 22 janvier, la compagnie du 28e se rend, il ne reste qu’une poignée d’hommes qui reçoit des Allemands les « Honneurs de la Guerre ». Ce n'est que le 26 mars après une intense préparation d'artillerie que le sommet est repris par le 152e d'infanterie de Gérardmer. Les 11e Bataillons de Chasseurs, 14e Chasseurs, 30e Chasseurs ont subi de telles pertes qu'ils sont considérés comme anéantis.

Sur les sommets, les tranchées s'organisent. Les lignes adverses sont parfois à moins de 20 mètres l'une de l'autre, rendant impossible les appuis d'artillerie. Cette situation va durer des mois. Des assauts locaux dégagent les abords du Vieil Armand en octobre permettent de repousser les Allemands un peu plus loin.

A l'occasion de cette dernière attaque, le colonel Messiny, ancien ministre de la guerre, écrit du front à son successeur Galliéni : "Ordonnez enfin que soient rigoureusement interdites toutes les opérations locales qui ne servent à rien qu'à verser des flots de sang". On verra que cette demande n'est pas vraiment suivie d'effets.

Les tranchées : Chaque camp reprend des forces, réorganise les ligne sur les 650 kms de la Mer du Nord à la frontière suisse.. Les abris provisoires se transforment en un vaste réseau de tranchées. Les Français organisent une défense en profondeur : 2 à 3 lignes de tranchées espacées de 200 à 300 mètres, une deuxième position identique à 3 ou 5 kilomètres en arrière. Face à ces tranchées françaises, les tranchées allemandes sont creusées à quelques mètres. Tranchées allemandes souvent mieux construites avec abris en béton à la différence de ceux des français en rondins. Tous les hommes se transforment en terrassiers, bucherons, débardeurs, charpentiers. La guerre commencée comme au siècle précédent avec des charges de cavalerie, des marches au son du clairon, de grandes charges à la baïonnette, drapeaux au vent, sabre au clair,va se figer en une guerre où chaque mètre de terrain va être chèrement défendu ou conquis.

Des milliers de soldats métropolitains et coloniaux continuent à monter en ligne, dans le froid, la neige, la pluie. Les coloniaux surtout vont découvrir un monde nouveau très différent de leurs montagnes d’Afrique du Nord ou de leur brousse africaine. Comme ils ne disposent pas de tenues adaptées, le commandement les affublent de vestes des chasseurs à pied.

Les tranchées, un monde où règne la boue et les rats. La boue fait l’objet de toutes les lettres, de tous les récits. Elle est le souvenir le plus marquant des anciens de 1914-1918. Pourtant, il y eut des jours de soleil sur les tranchées. D’ailleurs, les tranchées ne sont pas identiques. Les tranchées d’Artois creusées dans un sol sablonneux s’éboulent au moindre tir d’artillerie. Les tranchées de Champagne creusées dans le sol calcaire tiennent mieux. Les tranchées des Vosges sont creusées dans la roche.

Le soleil d’août a brillé sur les tranchées crayeuses de Champagne où le manque d’eau s’est fait cruellement sentir. Il y eut des jours de neige sur les tranchées des Vosges, neige insidieuse, s’infiltrant partout. Même les anciens de l’Armée d’Orient mentionne la boue. C’est la boue que tous ont retenue. Boue liquide ou collante qu’il faut gratter au couteau sur la capote, boue qui aspire les chaussures, boue qui dissout les détritus de toutes sortes qui jonchent le sol, boue qui dilue les cadavres des copains. La boue, la boue encore et toujours. Les hommes ont bien tenté de poser des caillebotis au fond des tranchées, mais rien n'y fait, la boue s'insinue.

La Belgique (sauf un petit lambeau de Flandres) et une grande partie de la France du Nord et de l’Est sont occupées. Une double ligne continue de tranchées va de la frontière suisse à la Mer du Nord et coupe le nord et l'est de la France du reste du pays. En cette fin d’année 1914, de 500 000 à 600 000 soldats français sont déjà hors de combat : tués, blessés, disparus.

Le territoire français est de faît partagé en plusieurs zones, la zone occupée par l'ennemi, la zone des Armées où prévaut les réglements militaires, la zone de l'intérieur, un no man's land entre les tranchées.

La guerre de tranchées va durer plus de trois ans dans des conditions inhumaines que des milliers de témoins vont relater dans des livres aussi émouvants les uns que les autres. Livres qu’il faut lire obligatoirement pour comprendre les souffrances de ces hommes, nos grands pères. Et nous n’avons ni la pluie, ni les odeurs, ni le bruit, ni les rats. Jamais aucun soldat n’a vécu autant de temps dans de telles conditions. Pendant toutes ces années, une armée de fantômes va vivre ainsi. Nos soldats, mangent, dorment, font leurs besoins, meurent dans d’étroits boyaux creusés aux flancs des tranchées. Pour aggraver ces conditions, l’automne 1914 est anormalement pluvieux. Il pleut sans discontinuer de l’Artois aux Vosges. Toutes les tranchées sont inondées. L’hiver 1914-1915 est glacial. Les mouches, les rats et les poux pullulent. Ces mouches et ces rats immondes grassement nourris du corps des copains, va nécessiter une chasse permanente mais inutile. Même la prime de 5 centimes attribuée par queue de rat ne change rien. Les chiens amenés dans les tranchées ne suffisent pas, alors le soldat subit.

La nourriture et les informations (vraies ou fausses) arrivent péniblement par des corvées de soupes (les bouteillons) qui subissent le feu des artilleurs et des tireurs allemands. La nourriture arrive en ligne par marmites norvégiennes depuis les roulantes installées à 3 kilomètres des premières tranchées. L'essentiel de la nourriture primaire est toujours constitué de soupe plus ou moins riche (comme sous Napoléon). Mais tout arrive froid. Sans les réchauds bricolés, les soldats mangeraient toujours froid. Heureusement, les colis des familles arrivent pour améliorer l’ordinaire. Dans quelques secteurs tant soit peu organisés, le quart seulement des hommes est de garde le jour, de nuit, c’est la moitié des hommes par périodes de 2 heures. Au créneau, les heures ne comptent plus. Les autres soldats sont de corvées ou tentent de dormir. Les corvées sont innombrables, charrier des rondins, des claies, enfoncer des pieux, poser des barbelés, transporter des munitions, creuser d’autres tranchées ou des chemins d’accès, ramener des corps vers l'arrière. C’est une fourmilière qui s’agite sous le feu des canons allemands. Les brancardiers s'affairent pour relever les blessés. Les soldats les voient parcourir les tranchées, sortir pour tenter de sauver un blessé et mourir du tir d'un tireur embusqué. Les "pépères" de la Territoriale relèvent les morts qu'ils ramènent vers l'arrière. Se croisent dans les tranchées, les hommes de liaison transmettant les ordres, les brancardiers, les corvées de ravitaillement, les Territoriaux, les pionniers qui aménagent des abris, héros sans arme. Et la nuit, toutes les nuits, des hommes sous le commandement d’un caporal, d’un sous-officier, d’un officier sortent des tranchées pour s’approcher, s’infiltrer près des lignes allemandes en rampant sur un sol trempé, gelé ou poussiéreux, et se renseigner sur ses activités. Travail dangereux, risqué et épuisant. Les Allemands envoient également leurs patrouilles qui croisent celles des Français dans le noir, parfois sans se voir. Mais souvent ces rencontres inopinées entraînent le déchaînement de l’artillerie. Les relèves s'opèrent le plus souvent la nuit entrainant le tir des batteries allemandes.

Toute une vie va s’installer dans les tranchées qui seront vite baptisées suivant l’état d’esprit des hommes qui les occupent, “Misère, Poisse, Éprouvés, Disgrâce, Rancune”. Les Français tiennent 820 kilomètres de tranchée, les Britanniques 120 kilomètres et les Belges 30 kilomètres. Mais avec les parallèles, la première ligne, la seconde ligne, la troisième ligne, la première positon, la seconde position, les emplacements d’artillerie, les boyaux de communication, les postes avancés, ce sont environ 40 000 kilomètres de tranchées qui ont été creusés.

La tranchée s'est aussi la base de départ des offensives. Périodiquement des offensives sont organisées. L'histoire retiendra les noms des grandes offensives et des grandes batailles : Artois, Verdun, Argonne, Chemin des Dames. Mais combien de combats resteront oubliés. Comme ces combats annexes livrés au cours des grandes offensives sur des objectifs moins prestigieux. Menés par une compagnie, un bataillon, un régiment, une brigade, combien de récits de combats sont enfouis au fond des archives des régiments. Des milliers d’hommes vont mourir pour une butte, une colline, un village, un cimetière, une église ou un bois et le plus souvent pour rien. Pour rectifier la ligne de front suivant la terminologie officielle. Combien d’offensives vont se terminer par un retour dans la tranchée de départ ? Combien d'hommes vont mourir de maladies ?

Nous voyons que dans cette guerre de positions, les offensives de vaste envergure ne vont pas cesser. La grande obsession du Grand Quartier Général est de percer. Passer à travers les lignes ennemies puis élargir la brèche pour prendre l'ennemi à revers. Remarquons que la doctrine allemande est identique.

  Les tranchées

Un système de tournante est mis en service. Un bataillon occupe en alternance les tranchées, passe en position de réserve, puis est envoyé au repos et le cycle recommence. Parfois le repos est tout simplement suspendu pour remonter en ligne en vue d'une offensive. Le repos est aussi l'occasion de poursuivre l'entraînement.

En décembre 1914, les autorités mobilisent la classe 1915 pour combler les vides. L’espoir de rentrer chez soi pour Noël 1914, a été vite abandonné. Le commandement est en pleine restructuration. Les officiers de terrain ont fait les frais des combats, tombés à la tête de leurs hommes.

A la Noël 1914, contrairement aux prévisions illusoires des débuts, la guerre fait toujours rage. Pourtant quelques escouades françaises et allemandes suspendent les combats. Entre les lignes de tranchées d’incroyables actes de fraternisation s'opèrent. De tels actes ont également lieu entre Britanniques et Allemands. Il est raconté qu'un match de football a eu lieu entre Britanniques et Allemandes. Les commandements des trois camps font tout pour cacher ces actes et des sanctions vont frapper soldats et officiers. A part quelques actes de fraternisation encore à Paques 1915, il n'y en aura plus d'autres jusqu'à novembre 1918.

Après avoir prescrit de recouvrir la bande rouge des képis, après avoir doté les hommes de salopettes bleues pour masquer les pantalons rouges ou même mis en service des pantalons de velours, le Grand Quartier Général va enfin équiper les soldats de nouvelles tenues bleu horizon pour l’infanterie et kaki pour les coloniaux et surtout fabriquer des casques. Calottes de fer tout d'abord puis ce n’est pas sans mal qu’un modèle est adopté. C'est le modèle Adrian qui est retenu. Le gl Joffre n’avait t-il pas dit “Nous n’aurons pas le temps de les fabriquer, je tordrai le cou aux Boches avant deux mois”. Protection illusoire contre les tirs directs mais réellement efficace contre les éclats d’obus, les grêles de pierre, les balles en ricochet. Ces casques seront portés jour et nuit. En mai 1915, cependant, pendant l’offensive d’Artois, toutes les troupes n’en sont pas encore équipées.

Ce n’est pas sans difficultés qu’ont été abandonnés les pantalons rouges. Il a bien fallu se résoudre à mécontenter les producteurs de garance, alors que la base de la garance vient majoritairement d'Allemagne. Les uniformes colorées sont une tradition française et bien qu'il soit notoirement nécessaire d'en changer, la décision a été longue à prendre. Les larges galons rouges ou dorés de l’encadrement vont aussi se faire plus discrets. Bon nombre de gradés empruntent à la troupe, la longue capote et le fusil plutôt que le revolver et le sabre. Dans les tranchées, ces tenues sont agrémentées de tout ce que le soldat a pu trouver pour se garder au sec et avoir chaud : matelassage de journaux, peaux de lapins, peaux de moutons, passe-montagne tricotés, toile cirée, toile de tente, couvertures, chiffons autour des pieds, etc. Et surtout des tricots envoyés par les épouses et les marraines de guerre.


Infanterie métropolitaine, Armée d’Orient, Troupes coloniales

L‘Armée française n’en continue pas moins à être toujours " paperassière". Les gradés, du plus humble, le caporal d’escouade, au plus élevé en grade dans les tranchées, le capitaine (commandant de compagnie ou de batterie), ont une multitude de documents administratifs à remplir. Expliquer l’emploi des munitions, justifier les demandes de matériel, justifier les demandes d’armes, remplir le registre des effectifs. Sans que cela soit obligatoire, bien des officiers se feront un devoir d’écrire aux familles des tués au combat. Car les hommes écrivent beaucoup dans les tranchées, à l’épouse ou la fiancée, à la famille, à la marraine de guerre, à la famille des copains disparus, au père ou au frère qui est sur une autre partie du front. Installés dans un coin de tranchée, mouillant des lèvres le crayon à encre, penché sur sa feuille installée sur la cuisse, sur une planchette, sur son sac. Le soldat livre ses pensées, raconte les bons moments (jamais les mauvais pour ne pas alarmer). Certains dictent à ceux qui savent le courrier qu’eux mêmes sont incapables d’écrire. Etrange couple de deux hommes crottés de la tête au pied dont l’un livre des secrets de famille à son copain.

4 millions de lettres partent par jour, des familles vers les soldats au front ou dans les garnisons de l’arrière soit 320 tonnes de lettres, de colis et de journaux. Les autorités modifient profondément l’acheminement du courrier à destination des tranchées. Un personnel important est embauché, femmes et étudiants. Une lettre postée dans le Midi met 3 jours pour arriver « là-haut » dans la tranchée. Dans l’autre sens, les délais sont plus longs pour les 5 millions de lettres quotidiennes qui partent du front. Tout ce courrier passe par les services de la censure militaire. Censure militaire créée non pas pour rechercher des espions mais pour surveiller le moral des soldats et éviter la transmission accidentelle de renseignements militaires. Censure contournée par la création des journaux du front, interdits d'abord par les généraux mais tolérés par Joffre. Journaux écrits au fond d'une tranchée par des journalistes mobilisés ou des auteurs qui resteront anonymes. S'ils sont imprimés à l'arrière, la censure civile double l'examen militaire, ce qui provoque des situations confuses. De plus haut venaient les encouragements qui modéraient le zèle patriotique des censeurs et renforçaient la confiance des animateurs de canards.

Argonne 1914-1915 : L'attaque allemande surprend le 2e d'infanterie coloniale de Brest qui doit abandonner ses 1ère et 2ème lignes, le 17 novembre. Dès le lendemain, un bataillon du même régiment reprend une grande partie des tranchées. Le 22 novembre, c'est le 120e d'infanterie de Stenay qui subit le choc d'une grosse attaque allemande. Nouvelle attaque allemande le 17 décembre sur le 9e Chasseurs de Longwy qui perd 1 500 hommes. Le commandement envoie les volontaires italiens (la Légion Garibaldienne) pour contenir l'ennemi. Le 30 décembre, encore une attaque allemande. 2 bataillons du 73e de Béthune et du 72e d'Amiens tiennent à grand peine. Les 51e de Beauvais et 87e de Saint Quentin tentent sans succès de faire reculer l'ennemi. Le 5 janvier 1915, les Allemands attaquent encore. Ce sont encore les volontaires italiens qui sont envoyés. Le 8 janvier, l'Allemand attaque sur les lignes des 46e, 76e et 89e, trois régiments de Paris qui sont rejetés en arrière. Là encore les volontaires italiens bouchent les brèches.

Des offensives secondaires doivent fixer et détourner l'attention de l'adversaire pendant les offensives principales des X° et IV° Armées. Dans les Flandres du 14 décembre au 25 janvier, la VIII° Armée attaque en liaison avec l'Armée britannique. Des éléments de trois corps d'armée tentent de percer. Les attaques ne donnent pas de résultats appréciables en dépit des sacrifices des 77e de Cholet, 242e de Belfort, 244e de Lons le Saunier, 25e Chasseurs de Saint-Mihiel et 24e Pionniers. Le 68e d'Issoudun sauve même les quelques gains de terrain conquis devant une attaque allemande effectuée par surprise sans préparation d'artillerie.

Sur le front de la II° Armée en Picardie, c'est également une offensive dite secondaire. Les 19e de Brest et 118e de Quimper attaquent sans succès. Les débris de ces deux formations parviennent à grand peine à revenir sur leurs positions. Les 45e de Laon et 236e de Caen n'ont pas plus de succès. Après une vaine tentative des 118e de Quimper et 64e d'Ancenis, le Commandant de la II° Armée (gl de Castelnau) décide d'arrêter l'offensive sur les objectifs atteints.

Les III° et I° Armées doivent attaquer sur l'Argonne et la Meuse avec les 346e de Toul, 353e de Toul, 356e, 367e de Toul, 368e, 369e, tous régiments de réservistes avec les 167e de Toul, 168e de Toul, 169e de Toul. Du 7 au 12 décembre ils arrivent à progresser de façon continue. Le 12 décembre, contre-attaque allemande qui refoule les Français. Le 22 décembre, un ultime assaut ne donne rien. Le mauvais temps qui s'installe sur la région bloque toutes les opérations.


Nos alliés

Artois 1914-1915 : le 16 décembre, 8 heures. La X° Armée passe à l'offensive. Les groupes francs précédent les 295e de Bourges et 280e de Narbonne sur un terrain fortement pilonné par les artilleries françaises et anglaises. L'avance est minime et l'attaque s'arrête pour la nuit. Le 17 décembre, c'est sur Notre Dame de Lorette que se portent les efforts. Les Chasseurs des 21e de Raon l'Etape, 20e de Baccarat et 17e de Rambervillers ne peuvent progresser. La 92e Division territoriale n'a avancé que de quelques cent mètres. Le 18 décembre, l'attaque repart. Une contre-attaque allemande reprend quelques tranchées qui ne sont reprises qu'avec l'appui du 109e de Chaumont. Les Chasseurs des 23e de Grasse et 27e de Menton permettent de reprendre tout le terrain perdu. Ce n'est que le 27 décembre que les offensives reprennent. Les Chasseurs des 6e de Nice,11e d'Annecy, 27e de Menton, puis les 51e d'Annecy, 54e de Grenoble et 60e de Brienne-le-Château ainsi que le 226e d'infanterie de Toul prennent quelques tranchées ennemies. Le mauvais temps arrête tout. Le 15 janvier, le Grand Quartier Général décide de limiter les offensives sur cette partie du front et d'envoyer des troupes au repos.

Champagne 1914-1915 : IV° Armée. Le corps colonial passe à l'offensive le 20 décembre après un barrage d'artillerie d'une heure sur les lignes allemandes. Deux colonnes, l'une menée par le 7e d'infanterie coloniale de Bordeaux, l'autre par le 22e de Hyères s'élancent. L'ennemi est surpris. Il n'en est pas de même pour une autre partie de la IV° Armée, les 20e d'infanterie de Montauban, 207e de Cahors, 83e de Toulouse et 14e de Toulouse où leurs vagues d'assaut sont clouées au sol. Le 21 décembre, le corps colonial organise son terrain et repousse toutes les contre-attaques. Les autres unités qui ont reçu l'appui du 59e d'infanterie de Pamiers et du 78e de Limoges arrivent également à percer. Mais les attaques suivantes échouent. Les pertes sont très lourdes. L'attaque repart le 23 décembre avec le 7e d'infanterie de Cahors, le 20e encore, le 11e de Montauban. Les 24, 25, 26 décembre, la IV° Armée organisent les positions pour une nouvelle attaque le 28 décembre avec 2 bataillons du 8e de Saint-Omer et du 33e colonial de Rochefort. Des tranchées ennemies sont conquises puis abandonnées. Les combats vont continuer jusqu'au 9 janvier avec les 9e d'Agen, 7e de Cahors, 20e de Montauban, 88e d'Auch, 83e de Toulouse, 127e de Valenciennes, 14e de Toulouse, 1er de Cambrai, qui réussissent à repousser les lignes ennemies deux kilomètres plus au nord. Plus de 5 300 soldats français sont morts, blessés, disparus rien qu'au XVII° Corps d'Armée. Un bataillon du 83e a perdu à lui seul 700 hommes.

Pour les autres armées dont le rôle est théoriquement défensif, elles n'en continuent pas moins à mener des offensives limitées. Sur l'Aisne la VI° Armée, le 21 décembre, monte une attaque avec les 2e Zouaves d'Oran et le 2e Tirailleurs de Mostaganem. Une tranchée allemande est prise puis évacuée le lendemain. Le 25, nouvelle attaque au même endroit avec le 42e d'infanterie de Belfort. Le 25 décembre également, attaque sur un autre point avec le 45e Chasseurs de Besançon, un bataillon marocain et le 282e d'infanterie de Montargis. Échec sur tous les points.

Dans le secteur de Reims, la V° Armée a pour mission d'empêcher les Allemands de déplacer des troupes vers la IV° Armée. Dans la nuit du 23 au 24 décembre, des éléments des 144e de Bordeaux et 57e de Rochefort prennent une position allemande. Ils doivent l'évacuer le lendemain. Même chose le 23 décembre pour le 24e d'infanterie de Paris. Le 22 décembre, des éléments du 4e Tirailleurs algériens de Bizerte et du 273e d'infanterie de Béthune perdent également le terrain conquis la veille. Ces opérations à "objectifs limités" qui ne débouchent sur rien ont entraînées la mort de milliers de soldats. Même quelques généraux posent la question "faut-il continuer ?"

L'année 1915

Le miracle de la Marne a eu une conséquence inattendue en Grande Bretagne. Dès l'annonce de la victoire les centres de recrutement sont pris d'assaut. 400 000 engagements en quelques jours. Le Corps Expéditionnaire Britannique se renforce avec l’arrivée de nouvelles divisions. Il est fait appel aux Dominions et arrivent des Indiens, des Canadiens. En avril 1915, les Britanniques sont 1 300 000. Les Français ont 2 500 000 hommes en ligne et 1 000 000 à l'instruction ou dans les dépôts. 750 000 Français ont été tués, blessés ou sont disparus depuis août 1914.

140 000 Chinois sont amenés de leur lointain pays pour travailler à l'effort de guerre des Alliés. Ils vont travailler dans toutes les branches industrielles et agricoles, aller au front pour creuser des tranchées, aménager des routes, déminer, ensevelir les morts. Leur sort est misérable. Les Alliés n'ont pas à être fier du sort qui leur a été fait. Des milliers d'entre eux mourront à la guerre. Les survivants rentreront dans leur pays en 1919. 2 000 resteront en France pour fonder une famille.

La guerre est devenue mondiale. Deux blocs de nations s’opposent. L’Entente avec la France et ses colonies, la Grande-Bretagne et le Commonwealth, la Belgique, le Portugal, l’Empire Russe, la Serbie, rejoindront rapidement l’Italie, la Grèce, la Roumanie. Les Empires centraux avec l‘Empire Allemand et ses colonies, l‘Empire Austro-hongrois, la Bulgarie, l‘Empire Ottoman. Restent neutres : l’Europe du Nord, les Pays Bas, la Suisse, l’Espagne, l‘Albanie.

Argonne 1915 : III° Armée, 29 janvier 1915. Une puissante attaque allemande est menée contre le 155e d'infanterie de Commercy. La première ligne est rompue sur 500 mètres. Le 10 février, nouvelle attaque allemande sur le front tenu par le 94e de Bar le Duc, le 328e d'Abbeville et le 82e de Montargis. L'attaque est enrayée. Le 17 février, ce sont les Français qui attaquent avec les 31e d'infanterie de Paris, 76e de Paris, 89e de Paris, 131e d'Orléans, 113e de Blois, 281e de Montpellier, 313e de Bastia, 46e de Paris, 44e Colonial. D'attaques en contre-attaques, quelques positions allemandes sont prises, perdues et reprises.

Meuse 1915 : I° Armée : 15 février. Les Allemands attaquent une position française de la 73e Division. Puis commencent à bombarder le fort de Douaumont avec du 420mm. Le 17 février, la 24e Brigade française (106e d'infanterie de Chalons sur Marne et 132e de Reims) part à la conquête de la position des Éparges. La position est rapidement enlevée, mais sous la pluie des 150 et 210, le recul est inévitable. Le bois des Éparges vient d'entrer dans l'histoire. Le 20 février, le 106e repart à l'assaut avec le 67e de Soissons, sans succès. Le 18 mars, nouvelle attaque avec le 132e, le 54e de Compiègne, le 302e, après une préparation d'artillerie d'une heure. Puis le 165e de Verdun attaque sans succès. Le 27 mars, le 54e repart à l'attaque avec le 25e Chasseurs de Saint-Mihiel. C'est un nouvel échec et le peu de terrain conquis est abandonné. Au bois de Malancourt, le 26 février, les Allemands emploient des appareils lançant des liquides emflammés. Les premiers lance-flammes viennent d'entrer en guerre.

Champagne 1915 : IV° armée, 16 Février, 10 heures. Les troupes françaises montent à l’assaut. Dès le début, elles sont clouées au sol par l’artillerie allemande. Les fantassins de Saint Brieuc, d’Agen, d’ Agen, de Dunkerque (110e R.I.), de Valenciennes (127e), d’Arras (33e), d’Abbeville (128e et 328e), de Lille (chasseurs), d’Alençon (103e), de Chartres (102e), du 43e de Lille, du 84e d'Avesnes, du 11e de Montauban, du 207e de Cahors, du 20e de Montauban, du 22e colonial de Hyères, du 9e Tirailleurs algériens, des Tirailleurs marocains, du 104e de Paris et tant d’autres unités, perdent beaucoup de monde, écrasés sous les obus de 77, 120, de 150, de 210 de l‘artillerie allemande. Cette fois, les attaques ne sont plus menées uniquement par les troupes d’active. Les régiments de réservistes aussi sont montés à l’assaut en grand nombre. Les artilleurs français avec leurs 75 s’approchent au plus près, mais sont écrasés. Les Français manquent de pièces d’artillerie lourde alors que le stock d'obus allemands semble inépuisable. A compter du 23 février, la violence des combats atteint un paroxysme. Le 25 février, les Français tentent une attaque de nuit, en vain. Sans cesse, des régiments décimés sont remplacés par des troupes fraîches. Des tranchées allemandes sont prises, perdues, reprises. Cette offensive s’arrête par décision du Grand Quartier Général le 17 mars. Les conquêtes de terrain sont minimes, quelques crêtes et quelques tranchées. Les pertes humaines sont énormes.

Sur une autre partie du front de Champagne, les combats reprennent le 8 avril avec une attaque de l'infanterie allemande qui se fait massacrer. En mai, l'Allemand attaquera de nouveau.

Toutes ces offensives démontrent que sur ces régions les succès obtenues ne sont pas à la hauteur des espérances. Des gains de terrain ont été acquis, mais à quel prix. Le Grand Quartier Général prépare une autre offensive à l'est, sur la Woëvre, le long des côtes de Meuse, sur le front de la I° Armée.

Woëvre 1915 : L'Allemand en ce début de printemps occupe cette plaine au sud-est de Verdun et c'est une menace sur la région fortifiée de Verdun. La I° Armée est chargée de l'en expulser. Dans la nuit du 31 mars au 1er avril, un bataillon du 169e de Toul en tête de l'attaque enlève un village (Frey-en-Haye). Heureux présage pour l'opération en cours. L'attaque se poursuit avec les 63e d'infanterie de Limoges, 78e de Limoges, 29e d'Autun et 300e de Tulle. Puis le 5 avril, c'est l'offensive générale. Les 362e d'infanterie de Cambrai, 351e de Saint Quentin, 164e de Verdun, 106e de Chalons sur Marne, 132e de Reims, 67e de Soissons, 73e de Béthune, 127e de Valenciennes, 43e de Lille, 147e de Sedan, 91e de Mézières, 33e d'Arras, 84e d'Avesnes, 8e de Saint-Omer, 13e de Nevers, 27e de Dijon, 134e de Mâcon, les 25e Chasseurs de Saint-Mihiel et le 56e remportent, au courage, des succès notables. Sous le brouillard et la pluie, l'artillerie française ne peut apporter qu'une aide réduite. Les réseaux de défense sont restés intacts et les fantassins ont du mal à les franchir. Les Allemands font entrer en ligne leurs réserves et contre-attaquent. Malgré tout, la crête des Éparges est conservée. Elle donnera lieu plus tard à bien d'autres combats. Le 11 avril, nouvelle offensive des Français. Les 120e d'infanterie de Stenay, 51e de Beauvais, 165e de Verdun, 364ede Verdun, 87e de Saint Quentin, le 8e Chasseurs d'Étain, le 9e Chasseurs de Longwy, arrivent jusqu'aux tranchées allemandes, mais ils en sont chassés. Les pertes sont lourdes. Le 14 avril, l'offensive est arrêtée. Une fois, deux fois, cinq fois, les mêmes régiments ont attaqués sans succès d'envergure.

Flandres 1915 : le front a été réorganisée tout à l'ouest dans les Flandres. Un groupement français appelé Groupement de Nieuport tient la côte. A sa droite, l'Armée belge. A la droite des Belges, la VIII° Armée française devenue Armée de Belgique, à sa droite le B.E.F., à la droite des Britanniques, la X° Armée française. Durant les mois de mars et d'avril, le calme règne. Le 22 avril 1915, l'enfer se déchaîne par une première attaque au gaz de combat effectuée par les Allemands. Les premières unités à subir ce type d’attaque sont les 45e et 37e Divisions territoriales et notamment les 76e et 80e Régiments territoriaux, ainsi que des troupes belges. La ville d'Ypres va entrer dans l’histoire car l’on baptisera ces gaz du nom "d'ypérite” quelqu'en soit la composition. Toute la guerre,  les Allemands ne cesseront pas de développer différents types de gaz.

Les soldats alliés ne sont pas équipés pour ce genre d’attaque. Les territoriaux, parmi les premiers touchés, refluent en désordre et s'enfuient. Affolement général, une brèche s'est ouverte dans le front. Dans la brèche, le Grand Quartier Général va y " jeter" les Zouaves (2e bis et 3e bis et le 7e), les Tirailleurs algériens (45e Division d‘Alger), les Tirailleurs marocains. Les soldats vont improviser avec leur mouchoir imbibé d’urine, censé empêcher les dégâts des gaz. L’État-Major va leur distribuer des paquets d’ouate, pour se boucher le nez et la bouche. Puis les premiers masques de compresses et de toile apparaissent. Enfin vont être distribués les “groins de cochon”. Il va falloir parfois les garder des heures entières. Gaz insidieux que l’on voit arriver par nappes verdâtres. En respirer une forte dose et c’est la mort, une faible quantité et ce sont de dommages irréversibles à la peau, aux poumons, aux yeux.

Il faut colmater les brèches creusées par le recul des territoriaux. Le 418e d'infanterie de Bordeaux, le 4e Zouaves de Tunis, le 1er de Marche d'infanterie coloniale et le 8e de Marche de Tirailleurs sont arrêtés par une nouvelle dispersion de gaz. Dans la nuit du 25 au 26, attaque à la baïonnette, échec. Les 7e et les 2e-bis et 3e-bis de Zouaves, le 2e Chasseurs de Lunéville sont bloqués. Les Allemands font un usage constant des gaz. Le 32e d'infanterie de Tours et le 66e de Tours enlèvent des tranchées allemandes puis à partir du 1er mai, brèche colmatée, le front des Flandres est fixé de nouveau. Les Allemands furieux commencent à bombarder Dunkerque avec leur artillerie.

Avril 1915. Par décret du 23 avril, il est créé la Croix de Guerre pour les opérations en cours. Personne n'imagine qu'elle sera encore délivrée plus de 3 ans encore.

Mai 1915, mobilisation de la classe 1916. Les recrues de 19 ans rejoignent les garnisons pour leur instruction. Les recrues de la classe 1915 gagnent les bataillons au combat. Le 23 mai 1915, l’Italie déclare la guerre à l’Autriche-Hongrie.

La mobilisation concerne aussi les civils. La plupart des usines d'armement, des aciéries et des charbonnages sont situées dans les zones sous controle allemand. Les autorités font accélérer la production des autres usines que rejoignent 100 000 femmes. Les ouvriers spécialisés sont rappelés du front. Arrivent des colonies et de l'étranger, des milliers d'ouvriers. De 13 600 obus par jour en 1914, la production va passer à 330 000 par jour en 1918. La production d'explosif passe de 43 tonnes par jour en 1914 à 351 tonnes en 1916. Si le soldat dans sa tranchée ignore la brutalité des chiffres, il sait que toute la Nation travaille pour lui. Ce qu'il ignore encore, c'est que des profiteurs s'enrichissent grassement faute d'un contrôle sévère du gouvernement. Lorsque les soldats le constateront lors de leurs permissions, ces abus seront l'une des causes des mutineries de 1917.

Argonne 1915: Depuis leur retraite au lendemain de la Marne, les Allemands se sont retranchés dans la forêt d'Argonne. Cette vaste forêt de 60 kilomètres sur 12 est constituée d 'une haute futaie d'arbres séculaires aux buissons impénétrables. Elle a été transformée en forteresse par les Allemands qui lancent depuis cette base de départ des offensives sur les lignes françaises. Toute l'année 1915 va voir de dérouler des combats d'un acharnement extrême.

Le 8 mai, les Allemands attaquent les positions des 15e Chasseurs de Remiremont et 94e d'infanterie de Bar le Duc. L'ennemi est repoussé après des combats au corps à corps, livrés à la baïonnette, à la hache et à la serpe. Nouvelle attaque le 9 mai, avec l'emploi de gaz asphyxiants sous le couvert d'un bombardement aux 105 et aux 150. L'ennemi est de nouveau repoussé. La lutte va se poursuivre sous terre. Les mineurs, sapeurs et pionniers des deux camps vont creuser des sapes, des souterrains pour arriver au plus près des positions adverses et arriver dessous si possible. Un stock d'explosif est disposé et tout saute au dessus. De nombreuses explosions de mines sont opérées les 11, 12, 13, 14 et 15 mai. Le tout sous un violent bombardement d'artillerie. Les soldats sont écrasés dans leurs tranchées. De vastes entonnoirs se creusent. Occuper ces entonnoirs avant l'adversaire devient un enjeu. La consommation d'explosif atteint des proportions énormes.

Le 17 juin, l'Allemand attaque et prend une petite portion de tranchée. Le 20 juin, c'est une attaque générale. A 02H30 le bombardement commence. A 04h00 les fantassins s'élancent . A 07H30, une brèche se crée dans le front français. Le 112e d'infanterie de Toulon qui vient juste d'arriver arrête la marée humaine. Les 55e d'infanterie de Pont Saint Esprit, 155e de Commercy, 154e de Lérouville luttent pied à pied et réussissent à contre-attaquer. L'ennemi est rejeté en arrière. Le 21 juin, le bombardement d'artillerie reprend suivi d'une nouvelle période de guerre souterraine. Les tranchées françaises sont détruites, les abris détruits, des mitrailleuses détruites, les communications coupées. Le 30 juin, l'Allemand attaque. Le 8e Chasseurs de Saint-Omer subit le premier choc. Le 16e Chasseurs de Saint Etienne est repoussé dans sa contre-attaque. Le 151e d'infanterie de Verdun reprend une partie du terrain perdu. A la fin de la journée, le 8e Chasseurs ne comprend plus que 4 officiers et 200 hommes. Le 2 juillet, l'artillerie française reprend son bombardement. L'ennemi riposte avec des obus à gaz et repart à l'attaque. Le 16e Chasseurs de Labry et le 94e d'infanterie de Bar le Duc encaissent le choc. De nouveau les 151e et 154e sont à la peine. D'autres unités sont attaquées. Le 162e d'infanterie de Verdun et le 63e Colonial arrivent à contenir l'ennemi. Les pertes sont énormes, le XXXII° Corps vient de perdre en 3 semaines, 13 000 tués, blessés ou disparus.

Le Grand-Quartier-Général envoie des troupes "fraîches" sur cette partie du front. Objectif : attaquer. Un important matériel est apporté dans les tranchées. De nouvelles pièces d'artillerie se positionnent. L'ennemi depuis sa forêt ne perd rien de ce qui se passe et attaque le premier.

Le 13 juillet, les positions françaises sont bombardées. Les positions des 4e d'infanterie d'Auxerre sont percées. Le 82e de Montargis arrête la progression allemande. Nouvelle attaque, le 4e cède ainsi que le 113e de Blois. Le 66e Chasseurs contre-attaque avec le 89e d'infanterie de Paris, puis le 46e également de Paris. Le 4e réussi à maintenir sur place quelques éléments. L'artillerie française entre en action. Sur une autre point, au 91e d'infanterie de Mézières, les combats sont féroces. Les Allemands attaquent au gaz et au lance-flamme. Le 91e recule mêlé au 131e d'Orléans. Plus loin, le 76e de Paris subit les attaques de gaz et de liquide enflammé. Il réussit à se réfugier dans des abris isolés entre-eux. Le 72e d'infanterie d'Amiens est contraint de se jeter dans les intervalles pour repousser les Allemands qui s'infiltrent.

Le 14 juillet, ordre est donné de passer à l'attaque pour reprendre les positions perdues et de rejoindre le 4e toujours isolé. Les 89e, 46e et 131e d'infanterie poursuivent leur effort toute la journée. A 18 heures, un objectif a été repris et nos troupes ont progressé de 150 mètres. Les mitrailleuses allemandes interdissent d'aller plus loin. Au soir du 15 juillet, la contre-attaque s'arrête.

Jusqu'au mois de novembre, cette partie du front ne comptera plus que deux attaques allemandes importantes qui permettront à l'ennemi de conquérir une bande de terrain de 600 mètres sur 200 et une autre de 3 kilomètres sur 300 mètres. Les Allemands en mai et juin 1915 ont utilisé toute la puissance de leur artillerie, leurs gaz asphyxiants, des lance-flammes, les nouveaux minewerfer lançant des projectiles de 50 kilos d'explosif. Les tranchées françaises ont été broyées, éventrées, au point que par endroit les Allemands n'ont eu à cueillir que des hommes hébétés. Mais lorsqu'il a fallu contre-attaquer, il s'est toujours trouvé suffisamment d'hommes pour le faire.


Attente

Champagne 1915 : Le 15 mai, les Allemands, qui bombardent depuis des mois un humble village "Ville-sur-Tourbe", font sauter 20 tonnes d'explosif sous les 3e colonial de Rochefort et 7e colonial de Bordeaux et attaquent. Le combat s'étend aux unités voisines. Un millier d'hommes meurent dans chaque camp. Le 5 juin, les Français attaquent avec les 47e d'infanterie de Saint Malo, puis 35e de Toul, 42e de Belfort, 44e de Lons le Saunier et 60e de Besançon. Lorsque les Français prennent les tranchées allemandes, ils y découvrent 3 000 morts.

Pendant l'été, l'Armée française constitue une force d'attaque importante pour percer le front allemand. L'attaque est conjuguée avec celle d'Artois. Pas moins de 29 divisions d'infanterie, 2 corps de cavalerie et 800 pièces d'artillerie sont rassemblés.

La préparation d'artillerie commence le 22 septembre. 100 000 obus écrasent les positions allemandes. Les Français s'élancent le 25 septembre entre Reims et l'Argonne. Dans les tranchées d'attaque, sous une pluie battante qui persiste depuis 2 jours, les soldats attendent. 09H15 "En avant, vive la France" les capotes bleu horizon sortent des tranchées sur un front de 25 kilomètres. Des avions survolent le champ de bataille et par télégraphie sans fil renseignent le commandement. La surprise allemande est totale. Les premières tranchées allemandes sont atteintes par une foule de soldats où les vagues d'assaut sont mélangées. Les soldats glissent dans la boue, se relèvent, repartent. Mais les Allemands se ressaisissent vite. Nos soldats n'enlèvent ces premières positions qu'au prix de gros sacrifices. Les tranchées allemandes sont bondés des cadavres écrasés par l'artillerie.

Le Corps colonial à pour objectif un promontoire fortement défendu. Les 21e régiment colonial de Paris, 23e de Paris, 4e de Toulon, 3e de Rochefort à force de courage enlèvent la première tranchée et s'y retranchent.

Dans un autre secteur, le 106ème d'infanterie de Chalons-sur-Marne est bloqué par une tir de mitrailleuses. Les cavaliers du 5e Hussards de Nancy chargent à cheval malgré le terrain glissant. Atteignant la première tranchée allemande, ils sabrent sans pitié, y compris ceux qui lèvent les bras épouvantés. Ils atteignent la seconde tranchée où les mitrailleurs allemands regardent médusés cette charge de cavalerie d'un autre âge. Les Hussards font 600 prisonniers, s'emparent de 11 mitrailleuses et 2 batteries de canons de 77. Les fantassins arrivent derrière eux. Le 116e de Vannes franchit lui 4,5 kilomètres et s'empare d'une batterie lourde et d'une batterie de campagne. Les 28e et 29e division au pas de course enlèvent 3 lignes de tranchées. Les fantassins s'emparent d'un stock de vivres important avec jambon, saucisses, confitures et cigares.

La Division marocaine n'est pas moins active. Zouaves et Tirailleurs rivalisent de courage. Des régiments marchent drapeaux déployés, avec leur musique en tête et s'emparent des premières tranchées allemandes.

Le 2e Corps colonial n'est pas en reste, ses 1er de Cherbourg , 6e de Lyon, 52e, 53e de Rochefort et Saint Raphaël réalisent des gains de terrain importants.

Par contre au VII° Corps, c'est une déconvenue. Le II°Corps de cavalerie qui doit exploiter la percée est éprouvé. Le 11e Chasseurs à cheval de Vesoul notamment est écrasé par un tir de barrage. Il continuera cependant à combattre à pied avec les fantassins.

Au soir du 25 septembre, la pluie tombe toujours. Les objectifs sont souvent dépassés. Les batteries de campagne ont pu suivre, mais la deuxième ligne allemande est inaccessible. La lutte continue. Le 26, nos vagues d'assaut arrivent à prendre d'autres positions. Les 27 et 28 septembre, nos soldats attaquent encore la seconde position, sans succès. A peine si le 1er colonial de Cherbourg avec des Tirailleurs sénégalais arrivent à en entamer une partie. Le 29, des éléments de 9 régiments arrivent à franchir la première tranchée de deuxième position. Mais c'est en ordre dispersé et ils sont repoussés.

Nouvelle attaque le 6 octobre avec 10 divisions fraîches. A 05h20 , ce sont 35 divisions qui partent à l'assaut. Au soir, le général commande l'arrêt de l'offensive. Rien de nouveau n'a été conquis.


1914



suite 1915