Le drame de la ferme BARRAL
La ferme Barral est située sur
la route de Bou Saada à 10 kms de Sétif. Le propriétaire
ayant reçu des menaces de la part du FLN demande la protection
de l'armée. Cette propriété étant
incluse dans notre secteur, sa protection incombe à la
CCR.
Quotidiennement, un groupe de combat se rend sur les lieux du
soir au lendemain matin et assume les tours de garde. Ce jour
de Mai 1957, c'est mon plus proche camarade de chambrée,
le MDL Claude MARCHAND du contingent 55/2B qui est de service.
Habituellement, 2 voire 3 véhicules sont utilisés
soit 2 jeeps et 1-4/4.
Est-ce un signe du destin, ces engins sont indisponibles et en
lieu et place, c'est un camion Ford débâché
qui va effectuer le transport. Dans l'après midi de ce
même jour, la ferme est investie par un groupe de rebelles.
La famille Barral (5 personnes) est décimée selon
les méthodes habituellement pratiquées pour ce
genre de besogne.
Le camion arrive à la ferme aux environs de 19 heures
30, le portail est ouvert, le véhicule s'engage sous le
porche. Le conducteur et le MDL sont abattus par un tir à
bout portant et certainement morts sur le coup. Simultanément
une grenade est jetée du haut d'une terrasse dans la caisse
du véhicule
Il est 21 heures c'est la vacation à la compagnie, le
groupe ne répond pas aux appels radios. Alerte immédiate,
nous partons un peloton complet sous le commandement du lieutenant
Gloux (officier de carrière). Nous arrivons à la
ferme à la nuit tombante et découvrons le massacre.
J'ignore quelle est l'unité qui a rapatrié les
victimes et le véhicule car nous partons sur le champ
patrouiller sur un large secteur et quasiment jusqu'à
la fin de la nuit. Recherches vaines, aucun contact avec les
rebelles qui se sont dispersés dans la nature. Nous rentrons
au petit matin. Nous sommes muets. Je suis choqué, profondément
choqué comme mes camarades. Quelle revanche après
notre bilan positif suite à l'accrochage de Souk el Ténine.
Pour nous la guerre a vraiment commencé car la compagnie
dénombre 4 morts et 3 blessés graves
Deux jours plus tard nous avons rendu les honneurs aux valeureuses
et malheureuses victimes.
Je n'ai pris aucune note de ces événements tragiques
mais 50 ans après ils sont encore bien présents
dans ma mémoire.
MDL Jacques Daunay
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