L'ENTRE DEUX GUERRES

L'armistice de 1918 entraîne la démobilisation rapide de millions de soldats. Les escadrons du Train regagnent leurs villes de garnison. Seuls des groupes d'unités subsistent au Levant (Syrie-Liban) et en Allemagne (au titre de l'occupation). Les compagnies détachées des escadrons de métropole regagnent l'Afrique du Nord. L'organisation du Train va persister jusqu'en 1920.

1919 voit de nombreuses mutations de personnel qui vont quelque peu perturber l'activité du Train.

En 1920, le Train d'Afrique du Nord est réorganisé. Il n'est plus possible de laisser les compagnies sous la tutelle lointaine d'escadrons de métropole (5e, 16e, 17e et 18e). Des corps autonomes sont mis sur pied. Le 23ème Escadron prend garnison à Casablanca, le 24ème Escadron à Fès, le 25ème Escadron à Constantine, le 27ème Escadron à Alger, le 28ème Escadron à Oran, le 26ème Escadron à Tunis. En 1922, un 123ème Escadron automobile est constitué à Casablanca.

Maroc

C'est au Maroc que vont se dérouler les plus importantes opérations de cette période d'entre deux guerres. Le Maroc est alors séparé en deux zones d'influence, au nord les Espagnols, le reste aux Français. Les deux escadrons du Train du Maroc ont ventilé leurs compagnies et leurs convois auxiliaires dans tout le pays. Compagnie 1/23 à Casablanca, convoi 9/23 à Oued-Zem, compagnie 2/23 à Marrakech, convoi 5/23 à Marrakech, compagnie 3/23 à Rabat, convoi 4/23 à Tiffet, compagnie 1/24 à Meknès, convoi 6/24 à Aïn-Leub, convoi 21/24 à Bou-Denib, compagnie 2/24 à Fez, convoi 1/24 à Fez, compagnie 3/24 à Taza, convoi 22/24 et 23/24 à Taza.

Le Train à Fez

Avec ses moyens libérés par la fin de la Grande Guerre, Lyautey reprend ses opérations de pacification interrompues par manque de moyens.

De 1920 à 1921, les compagnies et convois auxiliaires assurent vers les postes un service très chargé et prennent part de façon incessante aux convois de ravitaillement. Les colonnes de pacification et l'installation de nouveaux postes exigent également des moyens importants du Train. Les compagnies des deux escadrons sont mises à l'épreuve. Installations de postes à Issoual, Terrouat, Sidi-Maarouf, Kerbour, colonnes contre les Zaïan et les Chleuhs, occupation de Ouezzan, pacification de la région de Taza. L'installation du poste de Kerbour donne lieu à de violents combats, les Tringlots relèvent les blessés et les morts sous le feu, au mépris du danger. Et la campagne continue, occupation de Bab-Azar, avec l'appui de la 3/24 et des convois 22 et 23. En 1921, la compagnie 1/24 fournit le Train pour la colonne mobile qui opère dans la région d'Ouezzan, puis la colonne de Bekrit. Dans la région de Taza, c'est au tour de la 3/24 de se distinguer.

En 1922, 2 colonnes mobiles marchent vers la région d'Ouezzan, en Haute-Moulouya, dans la poche entre Mesgouchen et Bekrit, liaison entre les territoires de Khenifra et de la Haute-Moulouya. Les 2 colonnes se rejoignent au col de Tizi-Maazou. Dans la région de Taza, une autre expédition se rend à Touggour et Missour pour y installer des bases de ravitaillement, opérations de Choulech-Gherb, construction d'un pont sur la Moulouya, occupation du Moyen-Atlas, etc....

L'année 1923 marque un tournant important pour le Maroc. Trois groupes sont formés pour réduire la poche de Taza. Les compagnies et convois auxiliaires des subdivisions de Meknès, Fez et Taza mettent à la disposition des colonnes pratiquement tous leurs éléments. Les opérations durent d'avril à septembre 1923, mais la poche n'est pas réduite. Il faut reprendre en 1924 avec deux colonnes auxquelles les compagnies du Train de Fez et de Taza fournissent les moyens de transport. La poche de Taza n'est pas réduite et une menace se précise au nord du Maroc.

La guerre du Rif

La guerre du Rif contre le chef berbère Abdelkrim El Khattabi (ou Abd el-Krim) est tout d'abord une affaire espagnole. Les troupes espagnoles (60 000 hommes) éprouvent les pires difficultés et subissent des pertes sévères. Ils essuient une dramatique défaite à Anoual en juillet 1921. 14.000 soldats espagnols sont tués, blessés ou portés disparus dans la bataille, soit la presque totalité des troupes engagées. Le général lui-même se suicide. Les troupes espagnoles se retirent le long de la côte sur Ceuta, Melilla, Asilah et Larache. Lyautey craint la "contagion" sur la partie française du Maroc. Au début 1925, il dispose de 65 000 hommes (20500 Français de souche, 34500 indigènes et 10000 supplétifs). Selon lui c'est trop peu et il demande des renforts. Mais le maréchal est mal vu du gouvernement républicain et n'obtient pas les renforts réclamés. Le 9 avril 1925, les berbères passent à l'offensive. Immédiatement, toutes les troupes françaises se portent sur la frontière nord. Quand Abd-el-Krim lance en avril 1925 son offensive vers le sud, il repousse sans trop de mal les troupes françaises vers Fès et Taza. Pendant toute cette période, il n'est plus question de détachements du Train mais de tout le Train du Maroc qui est mis à la disposition des généraux. Le Train assure les Trains de combat des groupes mobiles, les ambulances mobiles, les équipages légers, les trains de combat du Génie, le train de combat des Transmissions, le train de combat de la TSF, les trains de combat des services, santé, intendance, vétérinaire, payeur, les convois administratifs, l'encadrement des convois de réquisition. Pour le Train pas de répit, les pertes s'accumulent.

Lyautey démissionne n'ayant pas obtenu les moyens demandés. Le gouvernement français confie les opérations au maréchal Pétain, auréolé de sa victoire à Verdun et bien en cour dans les milieux républicains. Pétain obtient de Paris les moyens qui ont été refusés à Lyautey. Les troupes françaises sont réorganisées en divisions de type guerre en Europe. Le Train reçoit des renforts venus d'Algérie et de Tunisie, compagnies 61/27, 61/28, 3/33, 3/30, 22/30, 60/17, 60/27, 62/25, 60/26, 60/28. Les compagnies sont incorporées aux divisions nouvellement créées.

Pétain organise une contre-offensive massive en s'appuyant sur l'aviation. Avant l'hiver 1925-1926 les positions perdues sont reprises. Les troupes françaises campent sur des positions choisies pour passer l'hiver. Si un moment de détente est attribuée aux unités combattantes, il n'en est pas de même pour les Tringlots qui continuent à alimenter les troupes depuis les bases jusqu'au front étendu sur 300 kilomètres. Les compagnies sont organisées suivant ce que l'on appellera "de type Maroc". Chaque compagnie comprend 3 sections de 100 mulets, chaque section étant susceptible d'atteler 30 arabas à 3 mulets ou pouvant également équiper les mulets de bâts. En plus des troupes régulières, le Train organise et encadre 30 convois de réquisition, 2 convois en location (un de mulets, un d'ânes), et plusieurs convois de dromadaires.

Convoi de mulets

Les Français dans leur offensive finale bénéficient du concours des Espagnols qui, sous la direction du général Primo de Rivera, réussissent un audacieux débarquement à Alhucemas le 8 septembre 1925.

Le 27 mai 1926, le chef berbère Abd el-Krim se rend, pressé de toutes parts par les troupes françaises et espagnoles. La guerre du Rif se termine. Au plus fort de l'offensive, le Train hippomobile comprenait 46 officiers, 3 000 sous-officiers et conducteurs, 1000 convoyeurs auxiliaires, 2300 chevaux, 5700 mulets, 1100 voitures, 3700 bâts et encadrait les réquisitions de 3500 auxiliaires, 7200 mulets, 2200 chameaux et 800 ânes.

Reste à réduire la poche de Taza abandonnée à son sort au profit de la guerre du Rif. Profitant des renforts, l'Armée française attaque le 7 juillet. Le 19 juillet, les dernières tribus se soumettent. Le Train souffre beaucoup dans une région épouvantablement chaotique où tous les transports s'effectuent par mulets de bâts.

Au cours des opérations de 1925-1926, le Train hippomobile reçoit 435 citations individuelles et 5 citations collectives.

Le Train automobile du Maroc

Les comptes rendus parlent peu du Train automobile bien qu'il soit arrivé en cours d'opérations. Contraint de n'utiliser que les routes empierrées ou les pistes en parfait état, les camions du Train sont écartés des opérations de toutes premières lignes. Dispensé de certains périls, le Tringlot automobile essuie fréquemment le coup de fusil de pillards qui attaque bien entendu quand le moteur crée des difficultés. Il n'en demeure pas moins qu'en transportant les troupes et le ravitaillement jusqu'au bout extrême des routes empierrées, le Train automobile a largement contribué à la victoire sur la dissidence. Le 123e Escadron basé à Casablanca a ventilé ses compagnies à Casablanca pour la 1ère et la 4ème, à Fez pour la 2e, à Meknès pour la 3e. Au plus fort de la campagne l'Escadron comprend 23 officiers, 1200 sous-officiers, conducteurs et ouvriers, des véhicules légers et 150 camions. Chaque compagnie est spécialisée, 1ère : triage et exploitation, la 2ème : transports sur Fez, Oujda, Taza, la 3ème : transports sur Meknès et Midelt, la 4 ème : transports sur Marrakech, Tadla, Agadir. En mars et avril, le 123ème Escadron reçoit 120 camions en renfort. En mai, le commandement envoie au Maroc, la 162e compagnie du 14e Escadron de métropole avec 100 camions. Le tonnage transporté est impressionnant compte tenu des matériels employés, 73000 tonnes en 4 mois et 30000 hommes.

La campagne du Rif et la réduction de la poche Taza terminées, la pacification continue. Le 1er octobre 1928, le Train rattaché encore administrativement à l'Artillerie est rattachée à la Cavalerie. Un pas vers l'autonomie ? Les deux escadrons hippomobiles (23e et 24e) et l'escadron automobile (123e) passent sous le commandement du Lieutenant-colonel du Train Vergneaud. Il serait ennuyeux et fastidieux de relater toutes les opérations auxquelles le Train a participé. il a été de toutes les colonnes et de tous les combats.

Conducteurs nord-africains

En avril 1937, les Escadrons du Maroc disparaissent pour être remplacés par trois nouveaux escadrons mixtes hippomobile et automobile : le 31ème Escadron à Marrakech, le 32ème Escadron à Casablanca et le 33ème Escadron à Fès. Les Escadrons d'Algérie continuent leurs missions.

Algérie et Sahara

Dès le début de l'intervention française sous Bugeaud, le Train des Equipages contribue à la conquête des confins sahariens. Ses convois de chameaux suivent les colonnes sur Laghouat, Touggourt, Ain-Sefra, Ouargla, Colomb-Bechar, Beni-Abbès que le Train relie ensuite régulièrement.

Puis !!!!!

Voir les pages de notre camarade saharien Jean-Jacques OUDART sur la conquête du Sahara par l'automobile.

Il me serait difficile de mieux faire !

1er février 1920, camionnettes d'un convoi à Tamannrasset

Une grande partie des escadrons de 1920 vont subsister jusqu'à la fin de la Guerre d'Algérie en 1962, après une brève réorganisation de 1943 à 1946.

La suite

  Le Train en Algérie

 
 Tringlots en Algérie

Le Train de la Libération

 Unités du Train en Afrique du Nord

Les premières unités en AFN