Mai 1841, Thomas-Robert Bugeaud, marquis de La Piconnerie est nommé Gouverneur général de l'Algérie et commandant en chef (après un bref commandement du général Schramm). Les effectifs de l'Armée sont portés à 62 000 hommes et le Train est renforcé sous le commandement du Lieutenant-colonel Poiré. Toutes les charrettes légères, toutes les bêtes de somme, sont réquisitionnées. Pour les expéditions, les boeufs de boucherie portent une charge jusqu'à l'abattage. Les chevaux de la Cavalerie sont chargés de sacs de farine, ce qui met en colère les officiers de cavalerie. Bugeaud n'en a cure et on verra officiers et cavaliers marcher à côté de leur monture chargée de farine.
Fin 1841, le commandement du Train d'Algérie est confié au Commandant Charonnet. Il commande personnellement le Train dans les expéditions de l'Aurès, de Kabylie, sur la frontière du Maroc (bataille de l'Isly).
Avec la prise de commandement en chef du Général Bugeaud, le Train va se transformer en un outil puissant. Dès sont arrivée il avait tenté de changer les choses mais était "bridé" par Clauzel et Vallée.
Bugeaud est le plus populaire des généraux de l'Armée d'Afrique de cette époque. Ses soldats le brocardent mais l'adorent (une chanson est reprise par toute l'Armée et bientôt la France entière : "la casquette du père Bugeaud"). Bugeaud est partout, de tous les "gros coups". Et les soldats vont le suivre. La moindre résistance est réprimée sans ménagement dans le feu et dans le sang. La population locale subit des violences inouïes. Les Français razzient le bétail pour se ravitailler, pillent les greniers. Bugeaud, lorsque les ministres s'étonnent de tant de violence, assume : « Et moi, je considère que le respect des règles humanitaires fera que la guerre en Afrique risque de se prolonger indéfiniment ». Il régnera 7 ans sur l'Algérie avant d'être remplacé par le Duc d'Aumale.
Bugeaud dira des Tringlots : "C'est le fantassin et le Tringlot avec ses mulets qui ont conquis l'Algérie". Quel bel hommage !
Et le Train continue sa mission. En avril 1841, 400 000 rations de vivres sont acheminées sur Médéa par relais de charrettes et de mulets. Le 2 mai, c'est au tour de Miliana d'être ravitaillé. Pour ce convoi, en plus des charrettes et des mulets, on charge 60 kgs de vivres ou de munitions par cheval, et chaque soldat porte 8 jours de vivres, les boeufs du troupeau portent leur charge. Ce convoi sur la route laisse 50 jours de vivres à la garnison de Mascara. Au même moment, un convoi de ravitaillement marche vers Miliana avec 4300 chevaux et mulets, 900 boeufs. L'escorte (général Baraguay-d'Hilliers) est composée de 8000 fantassins et 1000 cavaliers. En novembre, une colonne part de Mascara vers Mostaganem, 4000 hommes (général Lamoricière) escorte un convoi de fournitures diverses : moulins à bras (pour moudre le blé), instruments aratoires, graines de légumes et de plantes fourragères.
La marche des convois ne se déroulent pas sans accrochages. Le 20 mai 1842, Sidi-Zerdouch attaque le camp d'El-Arrouch (colonel Lebreton). Pour repousser l'attaque, 30 Tringlots vont se montrer dignes de leurs camarades des Chasseurs d'Afrique, des Gendarmes Maures et des Spahis. Le charge des Français va bousculer l'attaque des guerriers de Sidi-Zerdouch qui préfére décrocher.
En créant en 1842 quatre escadrons du Train, Louis-Philippe redonne toute sa vigueur à l'Arme du Train réduite depuis des années à des compagnies autonomes.
Le Ier Escadron se constitue à Alger avec un dépôt à Châteauroux et dès 1842 entre en campagne. Colonne Bugeaud de Blida vers Cherchell (avril 1842), Ouarsenis (janvier 1843), prise de la Smala d'Abd-El-Kader (16 mai 1843).
Le 12 mai 1844, un fait d'arme marque les esprits. Bugeaud lui même est attaqué au passage de l'oued Néça, il est sans cavalerie. Rassemblant 50 Tringlots du 1er Escadron, 29 Chasseurs et quelques Spahis et Gendarmes de son escorte, Bugeaud ordonne la charge de sa colonne (lui même est en tête) et ce détachement improvisé se jette sur un ennemi 5 fois supérieur en nombre. Les Kabyles laissent sur le terrain 300 morts, leurs armes et un drapeau. Bugeaud dans son rapport au Ministre est plus qu'élogieux sur son escadron monté.
Nous retrouvons une compagnie du 1er Escadron à la bataille de l'Isly, le 14 août 1844 où Bugeaud encore une fois cite la compagnie du Train pour "son zèle et son énergie".
En 1854, le 1er Escadron est en Crimée (avec le 3ème d'Algérie, les 4ème, 5ème et 6ème de métropole). En plus des missions de transport, les Tringlots relèvent les blessés sous le feu des Russes devant les ouvrages du Carénage et du Mamelon vert, à la Tchernaïa, lors de la prise de Sébastopol. Les 5 Escadrons du Train (10 600 hommes et officiers) qui participent à la campagne perdent un dixième de leurs effectifs.
De mai à juillet 1857, le 1er Escadron est envoyé en Kabylie pour rejoindre les 3 divisions qui opèrent dans cette région. La 2ème compagnie forte de 150 hommes monte avec succès à l'assaut des douars de Beni-Raten.
Le 2ème Escadron est créé à Oran avec un dépôt à Savigny. Il participe à un grand nombre de colonnes opérationnelles sur tout le territoire algérien. Dès sa création, c'est dans la région de Constantine qu'il est utilisé. Nous le retrouvons cependant dans la colonne partie de Mostaganem qui rejoint les divisions d'Alger et d'Oran. Nous retrouvons le 2ème Escadron dans l'expédition du Dahra en 1845, dans le Hodna en 1846.
Le 3ème Escadron est créé à Constantine avec un dépôt à Orange. Nous retrouvons sa 2ème Compagnie transportant 350 hommes de renfort (c'est exceptionnel alors que le Train transporte du personnel) au camp d'Eddis assiégé. Le 30 mai 1842, le camp d'El-Arrouch est à son tour assiégé, c'est la 1ère compagnie du 3ème Escadron qui charge et sabre les Kabyles. Nous retrouvons le 3ème dans l'expédition de Hodna en janvier 1846, au siège de Zaatcha en octobre 1846, dans la colonne vers Bougie en 1852, dans les expéditions sur Djidjelli et Ouargla en 1853, en Kabylie en 1856, à Gerryville en 1866. En 1854, le 3ème Escadron est en Crimée (avec le 1er) où il relève les blessés.
Lorsque Bugeaud installe le camp d'El-Asnam en 1843, son convoi comporte 120 voitures et 500 mulets de bât.
Lorsque le Duc d'Aumale capture la smala d'Abd el Kader en mai 1843, il a 1300 hommes d'infanterie, 600 cavaliers et un convoi de 800 mulets portant 20 jours de vivres.
Lors du combat du marabout de Sidi-Brahim, aux côtés des Chasseurs et des Hussards, il y a quelques soldats du 3e Escadron du Train. Nous avons que 15 Chasseurs et un Hussard furent les survivants de ces combats. Tous les autres soient près de 400 ont été tués.
![]() |
Tringlots en Algérie | |
Unités du Train en Afrique du Nord |