Suez 1956

Une opération franco-britannique est lancée sur le canal de Suez, sous le prétexte de séparer les armées égyptiennes et israéliennes. La réalité, c’est pour reprendre le canal nationalisé par Nasser et punir l’Égypte qui soutient activement la rébellion algérienne. Deux divisions françaises sont retirées d’Algérie, la 10e Division Parachutiste et la 7e Division Mécanisée Rapide, et prennent la mer pour l’île de Chypre qui va servir de base arrière à l’opération Mousquetaire. Les détachements précurseurs débarquent à Chypre au début août. Les forces terrestres, navales et aériennes sont considérables : 75 000 hommes, 130 navires de guerre avec 6 porte-avions, 500 avions.

Le 5 novembre 1956, à l’aube, les paras anglais et français (un bataillon du 2e Régiment de Parachutistes Coloniaux (col Château-Jobert) et le 11e Choc) sautent sur la zone du canal sous la protection des avions de chasse et du bombardement naval. L’après midi, c’est au tour du reste du 2e R.P.C. Les navires de guerre pilonnent la côte pour protéger le débarquement et l’aviation embarquée mitraille  les forces égyptiennes en déroute. Tout va très vite, au soir les objectifs sont atteints. Le lendemain à l’aube, ce sont les troupes terrestres (Commandos, Chars , 3e Parachutistes Coloniaux, 1er Chasseurs Parachutistes et 1er Régiment Étranger de Parachutistes) qui débarquent à Port Saïd et à Port Fouad. Les Israéliens atteignent le canal après avoir traversé le Sinaï. Les Anglais aussi ont progressé partout. De redditions en cessez le feu,  les combats s‘enlisent sous les fumées des réservoirs de pétrole en flammes. En moins de 12 heures, une force terrestre de moins d’un millier d’hommes a mis à genoux toute l’armée égyptienne de la zone du canal.

La situation va échapper aux militaires. Devant la pression des États-Unis et de l’U.R.S.S., les aéroportés anglais rembarquent dès le 7 novembre et le reste de la force combinée va rester l’arme au pied. Le 22 novembre, tout le monde rembarque. Des casques bleus norvégiens, colombiens, danois prennent position sous les risées des troupes anglaises et françaises. A quelques heures près, c’était l’écroulement de toute l’armée égyptienne. L’histoire de tout le Moyen-Orient a failli basculer en ces quelques jours. 15 soldats français ont perdu la vie pour une opération avortée. Les autres rentrent en Algérie pour continuer le combat. Ces soldats n’oublieront pas. 2/3 des effectifs français débarqués ou parachutés étaient des appelés.

le debarquement en egypte

Le débarquement en Égypte

1957

Le départ des troupes françaises du Maroc et de Tunisie ne permet plus à l’Armée française de surveiller les mouvements de troupe dans ces pays. L’A.L.N. va alors organiser des centres d’entraînement et des centres de ravitaillement avec la neutralité bienveillante des nouveaux gouvernements. Sur le terrain,  le commandement s’aperçoit vite que l’armement des rebelles s’est considérablement amélioré. Ce ne sont pas les quelques bateaux qui accostent ça et là qui peuvent amener ces armes. C’est donc par les frontières terrestres. Le Génie va entreprendre la construction d’un barrage à la frontière marocaine (550 kms) et d’un autre à la frontière tunisienne (380 kms). Ces barrages doivent empêcher tout passage. Hommes, armes et nourriture ne doivent plus passer et s‘ils passent, ils doivent être repérés et anéantis. Ces barrages mobilisent un grand nombre de soldats qui jour après jour et nuit après nuit vont construire, entretenir, moderniser, aménager mais surtout circuler le long des réseaux de grillage et de barbelés électrifiés. On donnera un nom à cette surveillance, la « herse mobile ».

La 2e Division d’ Infanterie Mécanisée et la 7e Division d’Infanterie vont tenir ces barrages renforcées par des régiments de réserve générale et d’importantes unités affectées. Au total : 10 régiments d’infanterie, 8 régiments A.B.C., 9 groupes d’artillerie et 2 groupes de radars, 8 bataillons du Génie, plus le Train, le Matériel, les Transmissions et la Gendarmerie. Vont stationner à la surveillance des barrages des régiments aussi divers que les : 3e R.E.I. (Régiment Étranger d‘Infanterie), 1ère brigade de chasseurs, 153e R.I.M. (Régiment d‘Infanterie Mécanisée), 26e R.I.M., 31e Dragons, 18e Dragons, 1er Spahis Marocains, 1er R.E.C (Régiment Étranger de Cavalerie), 1er Hussards, 6e Cuir, 2e R.I.C. (Régiment d’Infanterie Coloniale), 8e Tirailleurs Sénégalais, 151e R.I.M., 60e R.I., 152e R.I.M., 4e R.E.I., 6e Spahis Marocains, 1er R.E.P., et d’autres, et d’autres. De nombreuses escadrilles d’avions légers d’appui (6°, 7°, 8°, 20° escadres de chasse) équipées de T6 puis de T28, des hélicoptères armés (2 escadres) sont prêtes à prendre l‘air au moindre appel. Le commandement emploiera également des appareils plus lourds, Mistral, F47, Thunderbolt, Skyraiders, B 26 (qui peuvent intervenir de nuit). En tout de 40 000 à 50 000 hommes qui doivent empêcher tout franchissement. Lorsque les barrages seront opérationnels, les unités F.L.N. qui tentent de franchir les barrages seront anéanties à 80%.

Alger est secoué par les attentats et les autorités civiles sont dépassées dans une ville où il y a 1 650 policiers pour 635 000 habitants. Le 7 janvier, le général Massu, commandant la 10e Division Parachutiste est investi de tous les pouvoirs civils et militaires pour la région d’Alger. La délégation de pouvoir lui a été signée par le Ministre-Résidant Lacoste à Alger (c‘est le nouveau titre du Gouverneur Général de l‘Algérie). A 03H00, le 8 janvier, 4 600 parachutistes occupent Alger pour y "casser" les terroristes. Le 1er Régiment Étranger de Parachutistes, le 1er Régiment de Chasseurs Parachutistes, les 1er et 3e Régiments de Parachutistes Coloniaux, le 20e Groupe d’Artillerie Parachutiste quadrillent la ville en renfort du 9e Zouaves (en garnison permanente à Alger), du 13e Tirailleurs Sénégalais, des personnels d’État-major, des C.R.S. et des gendarmes (déjà sur place) et des Unités Territoriales. La mission de rétablir l’ordre leur est confiée par les politiciens de Paris et d’Alger. Les moyens à employer, les politiques n’en veulent rien savoir, "Travaillez sans vous soucier du carcan des lois écrit Robert Lacoste ". Cette opération de police baptisée “la bataille d’Alger”, les militaires ne l’ont pas voulu. Elle va faire naître beaucoup de polémiques qui ne sont pas éteintes encore aujourd’hui. Le colonel Bigeard (3e R.P.C.) dira de cette bataille qu’ " elle se situait dans le sang et la merde". La présence des parachutistes n’empêche pas 3 attentats meurtriers opérés par le F.L.N. dans 3 cafés d’Alger. C’est la colère des Européens et des militaires. Les troupes vont se livrer à des opérations pour lesquelles elles ne sont pas préparées, fouilles, perquisitions, interrogatoires. La torture est pratiquée pour arracher des renseignements. La grève générale prévue par le F.L.N. le 28 janvier est brisée par la force. Les écoles rouvrent. L’horreur appelle l’horreur, la torture répond aux crimes. La presse française et internationale va se déchaîner contre ces exactions exploitées par les politiques du F.L.N. et les pays arabes. Plusieurs journaux dénonceront ces atrocités avec sincérité mais d’autres n’y verront qu’une façon de vendre du papier. Au 31 mars 1957, la première bataille d’Alger cesse. La rébellion semble vaincue à Alger et pourtant le terrorisme ne cesse pas, 1 827 fellaghas ont été arrêtés, 812 armes, 88 bombes et 200 kilos d’explosif récupérés. Les parachutistes déplorent 2 morts et 5 blessés. Le 3 juin, des d’attentats aux lampadaires piégés, le 9 juin un attentat au Casino de la Corniche entraînent encore des victimes innocentes. La casbah est bouclée par un cordon de troupes. Les fouilles reprennent avec leur cortège d’interrogatoires musclés. La division parachutiste est retirée à compter du 24 septembre 1957. A leur grand soulagement les paras retrouvent le djebel. Par roulement, un régiment de paras continue à maintenir l’ordre à Alger.

Le 15 octobre 1957, avec la capture et la mort des derniers poseurs de bombes par le 1er R.E.P. la seconde bataille d’Alger est considérée comme terminée. Le F.L.N. mettra 4 ans à revenir. Les parachutistes vont devenir des héros pour les Européens d’Alger. Les autres unités de soutien sont oubliées.

Dans le reste du pays, les opérations se poursuivent. Deux division interviennent au gré des besoins du commandement, les 10e Division Parachutiste et 7e Division Mécanisée. A l’ouest, les 5e Division Blindée, 12e Division d’Infanterie, 4e Division d’Infanterie Mécanisée, 29e Division d’Infanterie se déploient dans l‘Oranais. A l’est, les 25e Division Parachutiste, la 14e Division d’Infanterie, la 21e Division d’Infanterie, la 19e Division d’Infanterie, la 2e Division d’Infanterie Mécanisée, se déploient dans le Constantinois. Il faut à tout prix empêcher le passage d’hommes et de matériels venus des pays voisins.

Dans le djebel, les pertes s'accumulent alors que le gouvernement se félicite des succès en zone urbaine. Rien qu'en avril 1957 : 2 avril, 21 tués au 35e R.I.C. ; 9 avril, à Borj de L'Agha, 12 tués ; 13 avril, 13 artilleurs tués près de Jemmapes ; le 13 avril : à Sétif, 6 soldats enlevés et portés disparus ; le 15 avril, région de El Milia, 12 tués ; 17 avril, au nord de Marnia, 9 tués ; le même jour au 3e R.I. aux Eaux-Chaudes, 19 tués. Ne sont pas comptabilisés les blessés qui vont mourir des suites des blessures.

Dans le Grand-sud, les compagnies sahariennes voient leurs effectifs se compléter d’un grand nombre d’appelés. Leur mission empêcher la circulation des rebelles au sud des barrages. Ces garnisons du sud s’établissent dans des conditions de dénuement total. Les appelés de ces postes du désert ont l’impression de débarquer sur une autre planète. Ils vont se rapprocher de la population, tout d‘abord par curiosité puis par attachement à ces gens simples. Jamais par intérêt, d’ailleurs qu’ont ces gens à offrir que l’amitié.

En octobre 1957, l’A.L.N. semble s’intéresser de près aux installations pétrolières et un peloton de méharistes déserteurs passe à la rébellion. Le 3e R.P.C. après 500 kilomètres de piste est transporté à Timimoun. La région est l'une des plus chaude du globe. La Légion rejoint le R.P.C. En décembre, après de brefs combats, l’A.L.N. au Sahara n'existe plus.

La durée du service militaire est ramenée à 26 mois (théoriquement). En un instant, le corps d’armée de Constantine perd 11 000 hommes, celui d’Alger 20 000. Parallèlement des économies sont prescrites : réduction des dotations en carburant, réduction de l’approvisionnement en rations conditionnées (ce qui implique de revenir à la cuisine classique), suppression de la solde mensuelle pour les appelés maintenus au delà de la durée légale, suppression de diverses primes.

En cette année 1957 qui se termine, 2 660 soldats français ont perdu la vie, 9 200 ont été blessés. On parle peu des soldats fait prisonniers par le F.L.N. Leur sort est souvent tragique. Des prisonniers blessés sont achevés sur le terrain, des prisonniers sont emmenés en Tunisie puis fusillés. D’autres prisonniers auront plus de chance, ils sont libérés avec un délai plus ou moins long grâce à l‘entremise de la Croix Rouge. Mais, plusieurs ont disparus à jamais.


1956



1958