LES COMPAGNIES D'ALGERIE

1871-1914

Les effectifs de l'Armée Française sont des plus réduits dans une Algérie à priori pacifiée. 4 officiers généraux vont se succéder à le tête d'une armée chargée de conserver le terrain conquis, Durrieu, Walsin d'Estgerazy, Lichtin, vice-amiral de Gueydon.

En Algérie les Kabyles se révoltent en février 1871, plusieurs villes sont assiégées, Bordj-bou-Arreridg, Fort-National (Fort Napoléon), Tizi-Ouzou, Bougi et Dellys. 150 Européens sont massacrés.

Les effectifs du Train d'Algérie sont au plus bas après le départ des compagnies sur la métropole. Seule la 7ème compagnie du 2ème Régiment est en état de prendre la piste. Elle se dirige sur Fort National. La garnison est désormais de 600 hommes : 100 Tirailleurs algériens, 80 Mobiles de la Côte d'Or, 120 miliciens de la ville, 10 ouvriers d'artillerie et 180 Tringlots (capitaine Rasigade). La garnison doit tenir 17 bastions et 2300 mètres d'enceinte. Le siège va durer 63 jours du 15 avril au 16 juin 1871. A aucun moment durant ces deux mois, les défenseurs ne quitteront leurs défenses, dormant, mangeant sur place. Une partie des animaux de bât sont mangés. Le détachement du Train prend une part essentielle aux combats qui vont tenir les défenses. Le 16 juin, à 4 heures et demie du matin, les défenseurs ouvrent le feu puis marchent sur l'ennemi, baïonnette au canon. Les attaquants s'enfuient dans la montagne.

A la même époque, le bordj est attaqué. Il est défendu par une partie de la 7ème Compagnie du 2ème Régiment du Train (lieutenant Vallée). Les défenseurs tiennent jusqu'à l'arrivée d'une colonne de secours. 6 Légions d'honneur et 25 médailles militaires récompenseront l'héroïsme des Tringlots de ses deux combats qui perdent 8 officiers (dont Rasigade), sous-officiers et conducteurs et 23 blessés sérieux.

Les réformes de 1873 et 1875 sont la conséquence directe de la défaite militaire de 1870. Après s'être attaché à régler l'énorme indemnité payée à la Prusse et avoir réformé nos institutions, le Gouvernement de la Troisième République s'attaque à réformer les Institutions militaires. Les gouverneurs généraux et commandants en chef en Afrique du Nord vont se succéder, assurant parfois seul les pouvoirs ou les partageant entre commandant de l'armée et administrateur civil.

Jusqu'en 1875, c'est l'organisation du 1er mai 1873 qui subsiste avec des compagnies détachées du 3ème Régiment de métropole. Compagnies installées à Oran, Mascara, et Tlemcen. En mars 1875, les 4 Régiments du train sont dissous.

La loi du 13 mars 1875, organise le Train des Equipages Militaires en 20 escadrons d'active basés en métropole. Le service en Algérie est assurée par des compagnies détachées de trois escadrons métropolitains.

Trois compagnies du 18ème Escadron de Bordeaux installées dans la province d'Oran, trois compagnies du 17ème Escadron de Montauban installées dans la province d'Alger et trois compagnies du 5e Escadron de Fontainebleau installées dans la province de Constantine.

Cette organisation va demeurer jusqu'à la déclaration de guerre de 1914.

En 1881, la guerre se rallume dans le sud-oranais. Le 18 mai, la colonne du général Innocenti est attaquée. Le convoi du Train est pillé par les Goumiers chargés de le protéger.

En 1882, le commandement reconnait l'insuffisance des effectifs de mulets. Le nombre d'hommes a été doublé mais pas celui des animaux, aussi on revient à une tactique déjà utilisé. Un mulet pour deux, un homme marche à coté de son camarade juché sur l'animal, après une heure, on change.

Malgré les routes, malgré le chemin de fer, c'est toujours le Train des Equipages qui assure l'essentiel des transports jusqu'au début de la Grande Guerre avec 12 compagnies mixtes. Mais l'importante question du ravitaillement des postes par des colonnes est résolue dans un pays à peu près pacifié.

1890 Kabylie

Le Train d'Agérie va s'illuster ailleurs car il va fournir des effectifs pour les campagnes de Tunisie, du Tonkin, de Madagascar, de Chine.

Les campagnes de Tunisie et du Maroc sont traitées par ailleurs.

1884, campagne du Tonkin. Si au début de la campagne, c'est un escadron de métropole qui fournit les éléments du Train (le 20ème de Versailles), il apparaît que les moyens sont insuffisants. Deux compagnies mixtes (chevaux et mulets) venues d'Algérie (provenant des 7ème, 9ème et 11ème Escadrons) débarquent au Tonkin pour faire face aux masses chinoises qui déferlent. Jusqu'à la signature du traité de paix, le Train s'illustre au siège de Hong-Hoa, à Langson, puis lors de la retraite. Le Train reste présent en Extrême-Orient jusqu'en 1895.

1884 Tringlot au Tonkin

Pour la campagne de Madagascar de 1895, un Escadron est constitué à partir d'éléments des compagnies de métropole et d'Algérie. Il prend le nom de 30ème Escadron à 6 compagnies avec 900 officiers et soldats, 500 conducteurs Sénégalais et 3700 conducteurs auxiliaires sous le commandement du chef d'escadron Deyme. Viendront s'ajouter des auxiliaires indigènes recrutés aux Comores et à Madagascar même. Comme moyens de transport, le Commandement, sur l'insistance de l'artillerie, choisit la voiture Lefebvre déjà utilisée au Tonkin. Les officiers du Train sont farouchement opposés à ce moyen de transport. Mais il en a été commandé 5 000 à la maison Lefebvre à Paris. Cet achat va se révéler désastreux. D'un poids à vide considérable (335 kgs), la voiture porte 250 kgs, sur une route carrossable. Les navires en amènent 3 989 pour le Train. Or à Madagascar, il va falloir construire la route. Ceux qui ont choisi cette voiture vont endosser une responsabilité considérable. Il y a aussi 4 506 chevaux et mulets.

Voiture Lefebvre

Embarqué à Alger, le corps expéditionnaire comprend 15 000 combattants et 7 000 convoyeurs. Il commence à débarquer à Majunga le 26 février 1895 dans une pagaille indescriptible, en pleine saison des pluies. Le travail commence par installer le quai de débarquement, il est trop court de 100 mètres. Les troupes vont rester cantonnées sur une étroite bande de sable, le temps que l'on commence à construire la route. Lorsque le commandant de l'expédition, le général Duchesne débarque le 6 mai, la route est construite jusqu'à Mérovana. Sa construction a déjà coûté la vie à des dizaines de soldats, du Génie notamment.

Le Train s'est constitué en 6 compagnies à la disposition des 2 brigades d'infanterie, du Bataillon de Chasseurs à pied, de l'Escadron de Chasseurs d'Afrique, des sept batteries d'artillerie, des quatre compagnies du Génie. Les conducteurs locaux sur lesquels on comptait ne sont plus là. Ils ont pris la fuite.

La campagne va durer de mai à septembre 1895 sans réels combats. Pendant ces 9 mois, près de 500 soldats du Train trouvent la mort (1/4 des effectifs) et 1800 auxiliaires, sans compter ceux qui vont mourir à leur arrivée en Algérie. Le climat et la topographie sont responsables de la majeure partie des pertes. Les combats ne font que 19 tués dans l'ensemble du corps expéditionnaire. Les hommes se sont usés à construire une route entre Majunga et Tananarive pour le passage des voitures Lefebvre . La route construite, ils ont été épuisés par les évacuations sanitaires, le transport du ravitaillement pour une troupe de 15 000 hommes. Les Tringlots font l'objet d'un suprême affront de la part du Général Duchesne. Dans la marche finale sur Tananarive, le convoi du Train est placé sous le commandement d'un chef d'escadron de l'Artillerie.

Le Train quitte Madagascar en 1896 avec la dissolution du 30ème Escadron. Deux compagnies seulement restent en garnison à Madagascar. Les survivants regagnent leurs garnisons de France ou d'Algérie.

Les autres armes ont également subi des pertes considérables. Au 200e d’Infanterie de Ligne, il reste 58 hommes sur les 800 partis de Majunga (tous des appelés de 19 régiments de métropole), le 40e Chasseurs a purement et simplement disparu des effectifs.

Conducteur auxiliaire

Pour la campagne de 1886-1887 au Soudan français (aujourd'hui le Mali), le Train ne participe pas aux opérations. Ce n'est qu'en 1892 que des officiers du Train sont affectés aux troupes en opérations. En 1901, des officiers et des brigadiers du Train embarquent à Bordeaux pour l'Afrique. Après maintes péripéties, leur voyage les amène à Kayes pour assurer l'encadrement d'une compagnie de conducteurs d'artillerie soudanais. Après un séjour de deux ans qui les font parcourir d'énormes distances dans le Haut-Niger jusqu'au Tchad, de Bamako à Koulikoro, les gradés du Train rentrent en France (un seul demande à rester). Ils débarquent à Bordeaux le 20 avril 1903. Deux des officiers mourront de la fièvre jaune dans les mois qui suivirent. Le Ministère de la guerre s'opposera par la suite à l'envoi de Tringlots dans ces contrées.

Pour la campagne de Chine de 1900, je n'ai pas confirmation de la participation des compagnies du Train d'Algérie. Il s'agirait de compagnies venues du 15éme Escadron d'Orange. Ce fut certainement la seule campagne où le Train a employé des chameaux d'Asie (ceux à deux bosses).

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  Le Train en Algérie

 
 Tringlots en Algérie

Le Train de la Libération

 Unités du Train en Afrique du Nord

Les premières unités en AFN