TUNISIE ET MAROC

Du beylicat au protectorat de Tunisie

Depuis la pacification de l'Algérie, la frontière algéro-tunisienne est fréquemment franchie par des tribus en révolte contre le Bey de Tunis et se livrent en Algérie à des pillages, des délits et des crimes. Le Commandement en Algérie ne peut se satisfaire d'une telle situation. En 1881, commence la campagne de Tunisie. Un corps expéditionnaire sous le commandement du général Forgemol de Bostquénard entre en Tunisie par la frontière terrestre et par voie maritime.

Le Train fournit aux troupes d'intervention : 12 compagnies des 13e, 14e, 15e 16e, 17e et 18e Escadrons (5 Escadrons de métropole fournissent chacun 2 compagnies à partir de leur 5ème compagnie dédoublée). Les compagnies venues de Moulins, Lyon, Orange, Lunel, Montauban, Bordeaux arrivent en Tunisie. Le 15ème escadron d'Orange fournit le matériel et les animaux. Ces compagnies sont réparties dans les différents colonnes de Kroumirie *, de la Medjerda, de l'Oued-Mellegue, du Kef.

Le 12 mai, le général Bréart fait signer au Bey de Tunis un traité de paix. Les troupes française occupent Le Kef, Souk-el-Arba, Béjà, Aïn-Draham, Bizerte.

Les insurrections se produisent en divers points de Tunisie, notamment dans le sud. Des colonnes sont poussées vers Zaghouam, Kairouan, Gafsa, Feriana. La Marine occupe Sfax, Gabès, Djerba, Hammamet et Sousse. Le 5 octobre, le général Saussier occupe Tunis et ses forts. Le protectorat de la France sur la Tunisie et la tutelle sur le Bey deviennent des faits accomplis.

Le Train a accompli une fois encore sa mission "avec le plus grand zèle".

Les compagnies regagnent ensuite progressivement la France. Demeurent sur place : 4 compagnies des 14ème (Lyon), 15ème (Orange) et 17ème Escadrons (Montauban). A partir de 1883, ces unités ne sont plus que trois rattachées à l'Escadron d'Orange puis en 1899 à celui de Lunel.

Il n'y aura plus ensuite que quelques incidents, le plus notable se déroule en 1918 où un convoi de ravitaillement est attaqué entre Dehibat et Tatahouine. Les rebelles venus de Tripolitaine sont repoussés malgré la perte du commandant du convoi et de cinq conducteurs indigènes.

Bizerte

Du sultanat au protectorat du Maroc

L'origine de la crise marocaine trouve sa source dans les attaques de positions française en Algérie par delà la frontière. Des officiers sont assassinés, des sentinelles poignardées, des convois attaqués dans le sud-Oranais. Le Gouverneur Général de l'Algérie (Mr Jonnart) en tournée d'inspection et son escorte (Tringlots et Légionnaires portés) sont attaqués au col de Zénaga. 300 guerriers attaquent la colonne qui se replie en hâte.

Le Gouverneur Général ordonne des représailles sur le village de Figuig au Maroc. Une colonne du général O'Connor bombarde le Ksar et les murs de Figuig le 8 juin 1903. Le convoi du Train est commandé par le capitaine Pivet.

En novembre, le colonel Lyautey est nommé commandant du territoire d'Aïn-Sefra et les Français occupent Béchar et installent les postes de Forthassa et de Berguent aux confins algéro-tunisien. Pendant cette période, les compagnies du Train, notamment celles du 18e Escadron fournissent de nombreux détachements et assurent les ravitaillements à des groupes mobiles en opérations. Les compagnies du Train s'installent, la 11/18 est à Oran où elle forme le dépôt et assure la formation des recrues. La 12/18 s'installe à Aïn-Sefra. La 13/18 est constituée en compagnie de marche et s'installe à Tlemcen puis Marnia, Oujda, et Taza.

Les officiers du Train obtiennent de Lyautey l'achat des charrettes locales, les arabas, non sans mal, malgré leur emploi dans d'autres régions de l'Algérie. Elles vont se révéler très efficaces au côté des mulets malgré les difficultés du terrain.

La guerre va désormais se dérouler sur deux secteurs, le Maroc oriental et le Maroc occidental.

Le Maroc oriental : A la suite de l'assassinat d'européens à Marrakech, l'occupation d'Oujda est décidée. Lyautey devenu général prend la tête des opérations. La colonne du colonel Félineau occupe la ville le 29 mars 1907. En 1908, des tribus au nord-ouest d'Oujda multiplient les actes d'hostilité. Lyautey entre en campagne en rassemblant 10 000 hommes à la frontière algéro-marocaine et forme ses hommes en deux colonnes qui cernent le massif des Béni-Snassen. Les deux colonnes font jonction le 22 décembre 1908, la révolte est brisée avec la capture de son chef. Le Train a fourni la compagnie 13/18 renforcée d'éléments venus de toute l'Algérie. Dès 1910, toute la région est sous contrôle.

Les convois du Train sillonnent la région où la sécurité s'établit peu à peu. Les unités du Train assurent les ravitaillemnts et concourent aux travaux d'aménagement de points d'eau, de postes, de pose de lignes télégraphiques.

En 1911 et 1912, la compagnie 13/18 assure tous les ravitaillements et les évacuations des colonnes qui pacifient l'est-marocain avec des Groupes sanitaires de bâts, des Trains régimentaires d'infanterie sur roues et sur bâts, des Convois administratifs sur roues et sur bâts. Au début 1913, l'effectif de la compagnie du capitaine Devarenne est composé de 11 officiers, 1 000 sous-offciers, brigadiers et conducteurs. Ses détachements sont installés à Mérada, Guercif, Taourirt, Dedou, El-Aïoun, Camp-Berteaux, Moul-el-Macha, Bou-Denib, Figuig, Berguent.

Et les colonnes continuent. Celles sur Taza en mai 1914 comprend un élément léger : convoi administratif de 400 mulets, deux groupes sanitaires, des trains de combat d'infanterie et de munitions ; un élément lourd : convoi administratif de 200 voitures, des trains régimentaires d'infanterie et de munitions. Le 10 mai 1914, la prise de Taza est acquise, le train léger a pu suivre à la suite d'une marche de nuit de 40 kms. Le train lourd peine et arrive le 12 mai.

Le 15 mai, une colonne se porte au devant de la colonne partie du Maroc occidental (voir ci-dessous), et la rencontre à lieu le 16 mai à Bab-Hamman.

Depuis 1907, le Train a été de tous les combats et de toutes les colonnes lorsque le 2 août 1914, c'est la déclaration de guerre en Europe. De nombreux officiers du Train quittent l'Afrique du Nord pour s'engager dans l'Infanterie. Le Train va connaître une autre vie. Lyautey est contraint de réduire ses opérations.

Le Maroc occidental : le massacre le 30 juillet 1907 de 9 Européens à Casablanca (dont 5 Français) est le prétexte pour organiser un corps expéditionnaire en août (général Drude). Environ 2000 hommes débarquent à Casablanca, mais le commandement n'a pas prévu de Train. Dès les premières pertes, le commandement s'aperçoit qu'il n'y a personne pour transporter les blessés. En toute hâte, Paris ordonne l'organisation par le 18e Escadron d'Oran d'un détachement du Train. Ce premier détachement est pris au sein des 17e Escadron (Alger) et 18e Escadron. Le rassemblement s'effectue en 48 heures avec 1 officier, 2 sous-officiers, 4 brigadiers, 100 conducteurs, 15 ouvriers, 10 chevaux de selle, 100 mulets, 100 arabas, 20 paires de cacolets, 20 paires de litières. Embarqué sur le Nive, le détachement arrive en rade de Casablanca le 25 août. Le plus compliqué reste à faire, débarquer. En 4 heures, à l'aide de petites embarcations, la navette entre le Nive et la côte s'effectue. Le lendemain, le liutenant Piotelat se présente aux ordres du général Drude. "Quand pouvez vous me fournir des mulets, des cacolets et des litières ?" "Aujourd'hui mon général !". A midi, un premier convoi du Train sort du camp.

Le corps expéditionnaire est porté à 6 000 hommes qui commencent par pacifier les environs de Casablanca. Le Train reçoit des renforts venus des 5e, 16e, 17e et 18 escadrons, forme également une compagnie de marche. Cette compagnie de marche est très importante, elle comprend : 1 capitaine, 8 lieutenants, 1500 hommes, 2600 animaux et 1300 voitures.

Une première opération se déroule sur Fadhala et Bouznika, une autre sur Ber-Rechid, occupés en janvier 1908. Déjà avancements et médailles militaires récompensent les efforts des Tringlots. Une deuxième expédition contre les Médakras rencontre plus de difficultés dues aux manques de moyens du Train. Un nouveau détachement arrive d'Algérie. La troisième expédition vers les Ouled-Saîd et une quatrième qui permet de conquérir Settat montrent encore des insuffisance. En mars 1908, de nouveaux renforts du Train arrivent. Il y a désormais 3 compagnies qui forment des dépots à Casablanca : 12/16, 12/17 et dépot des remontes, la 13/5 s'installe à Ber-Rechid.

Les grandes colonnes organisées en 1908-1909-1910 sont le travail quotidien du Train avec les ravitaillements de postes. Nous retrouvons des convois de chameaux comme en Algérie.

En 1911, les tribus de la région de Fez ne reconnaissent plus les autorités locales et entrent en révolte. Le 28 mars, la ville de Fez est investie par les révoltés et les Européens menacés. Trois colonnes (général Moinier) sont envoyées pour débloquer la ville. Durant cette opération, le Train est une nouvelle fois mis à rude épreuve avec des convois attaqués. Toutes les compagnies du Maroc fournissent des éléments. Les Tringlots doivent livrer de durs combats pour que le convoi passe dans les marais de l'Oued-Beth, dans le défilé de Zegotta, dans la forêt de la Mamora, où deux convois sont perdus. Le 21 mai 1911, la ville de Fez est dégagée.

Pendant ce temps, les missions quotidiennes continuent dans le reste du Maroc.

L'Allemagne, le 1er juillet 1911, décide, pour protéger ses intérêts, d'envoyer une canonnière, la "SMS Panther", dans la baie d'Agadir. Va t'on entrer en guerre contre l'Allemagne pour le Maroc ? Le traité du 9 novembre met fin au contentieux.

Le 3 avril 1912, la France et l'Espagne se voient reconnues par les autres puissances et le gouvernement du Maroc leur protectorat sur le Maroc. La zone nord est sous tutelle des Espagnols, le reste aux Français

En 1912, la révolte des Tabors et les massacres de Fez (70 soldats et civils tués) entraîne la réaction immédiate de l'Armée Française. Nommé Gouverneur général du Maroc, Lyautey va s'employer à mâter cette révolte. Les convois du Train venus de Meknès vont participer à la "libération" de la ville le 1er Juin.

La compagnie 13/17 venue d'Algérie s'installe à Mechra-ben-Abbou puis à Marrakech laissant un détachement dans sa précédente garnison.

Marrakech est menacé à son tour par un révolte d'un marabout saharien (El-Hiba) qui se proclame le Mahdi et prône la guerre sainte. Le colonel Mangin organise une forte colonne (5000 hommes) à Souk-el-Arba pour le combattre. El-Hiba dispose de 10 000 guerriers. Le convoi de Mangin comprend une section de munitions, deux convois de révitaillement, trois convois de chameaux appartenant aux compagnies 12/17 et 12/16. A Sidi-bou-Othman, les guerriers attaquent la colonne formée en carré. L'artillerie balaie les attaquants et lorsque les Français chargent, l'ennemi fuit de toute part. Colonne et convoi entrent à Marrakech le 8 septembre.

Les compagnies du Train prennent de nouvelles dispositions et s'installent, la compagnie 12/17 à Casablanca, 12/16 à Salé, 12/5 à Meknès, 13/5 à Fez, 12 convois auxilliaires s'ntercalent sur les lignes d'étapes. Des postes s'installent un peu partout, à Ifrane, Ito, Azrou, Camp-Bataille, Tedders, Camp-Christian, El-Bouroudj, Oued-Zem, Agadir, et le Train est constamment sur la brèche. L'amélioration des voies de communication permet l'utilisation de grosses charrettes "mazella". Et le Train continue ses missions de ravitaillement vers tous ces postes tout en assurant les convois des colonnes.

Au début 1913, le Train du Maroc occidental comprend 46 officiers, 2890 sous-officiers et conducteurs, 2880 convoyeurs auxiliaires, 8490 animaux.

De janvier à juin 1914, le Train travaille sans relâche pour approvisionner le poste de Tissa. L'objectif organiser les dépots des forces qui vont rejoindre les colonnes du Maroc oriental. Au passage, soumettre les tribus qui pourraient mettre en danger les convois.

La jonction du Maroc oriental et du Maroc occidental s'effectue avec les colonnes du général Gouraud et du général Baumgarten à Bad-Hamma. Le général Lyautey est présent. Il n'y a plus désormais de Maroc oriental et de Maroc occidental mais UN Maroc.

Taza

Les opérations sont planifiées pour juin 1914 mais la déclaration de guerre va arrêter momentanément les opérations actives. 20 officiers, 500 conducteurs, 1000 animaux et 500 voitures gagnent la métropole. 3 officiers, 37 sous-officiers et brigadiers, 275 conducteurs s'engagent dans l'Infanterie Marocaine et beaucoup trouveront la mort dans les tranchées.

 

* L'orthographe des noms est celui de l'époque.

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