LA LIBERATION DE L'ALSACE

Burnhaupt - Strasbourg - Colmar - La poche

Le camp de Thiaroye au Sénégal

* voir le lexique pour les abréviations

Au IIe Corps, la 1ère D.F.L. en prenant Giromagny a créé une brèche dans les lignes allemandes sur la rivière Savoureuse et commencé un débordement du camp retranché de Belfort qui continue à bloquer l'avance de la 2e D.I.M.. Cette division passe sous le commandement du IIe corps ainsi que le C.C.6 pour ouvrir la porte sur l'axe Dambenois-Fontaine ou sur l'axe Giromagny-Rougemeont.

Un groupement (Piatte) réunissant le 5e R.T.M., les F.F.I. de Vigan-Braquet, la demi-brigade F.F.I. de Corrèze-Limousin, un escadron du 2e Dragons et le groupe d'artillerie 2/63 va rencontrer une vive résistance et met deux jours pour prendre Trétudans puis se heurte à l'ennemi dans les Grands Bois et ne peut plus progresser. Les Commandos d'Afrique n'ont pas plus de succès sur le fort de Roppe. La 3e D.I.A. rencontre aussi les pires difficultés mais réussit à prendre le fort de Chateau-Lambert (3e R.T.A.). C'est plus près de Belfort que pourrait se faire la décision. Si le bataillon du Pacifique reperd Eloie après l'avoir conquis, le R.C.T. Delange grimpe vers le Ballon d'Alsace et atteint les sources de la Doller. Le Groupement de Choc atteint le hameau de la Madeleine. Le 24 novembre, sous le neige et la pluie, le 1er Bataillon de Légion atteint le sommet du Ballon d'Alsace, lieu hautement symbolique. Les Chocs se rabattent vers le sud, et atteignent Etueffont. Les défenses devant le R.C.T. 3 s'écroulent mais ce n'est qu'un succès limité. Le front allemand des Vosges n'a pas été entamé de façon décisive. Il est évident qu'il faut trouver ailleurs les solutions.

Décision est prise de porter les efforts de la Première Armée sur Burnhaupt au coeur du couloir qui sépare le IIe corps du I er Corps, voir la carte ci dessous. Commencent à arriver des unités de la 4e D.M.M. remplacée sur les front des Alpes par la 27e D.I.A.. Mais il est à prévoir le prochain départ le 28 novembre de la 1ère D.F.L. pour le front de l'Atlantique.

la carte du rhin
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L'attaque est prévue pour le 25 novembre. A l'aube, c'est une énorme surprise sur le front du IIe Corps d'Armée. Les Allemands sont partis sauf à l'est de Gérardmer. Le départ a été tellement discret que les Français ont perdu le contact. La 2e D.I.M. perd du temps dans les destructions et les pièges accumulés par la Werhmacht dans les zones abandonnées mais pousse avec le C.C.6 sur la RN 83 vers Rougemont et Burnhaupt. La 1ère D.F.L. pousse sur Thann. Au soir, la 2e D.I.M. a repris le contact. La 1ère D.F.L. également, mais les Commandos de France se heurtent à une vive résistance à Massevaux où sont installés deux régiments de la 159.infanteriedivision. Les jeunes du Bataillon Janson de Sailly dont c'est le baptême du feu veulent montrer à leurs aînés leur courage. Cdt de Gayardon en tête, ils s'engagent dans les rues. 27 morts sont les fruits de leur inexpérience. Au matin du 25, seuls les quartiers sud de Massevaux sont repris, la ville entière n'est conquise que le 26 au soir.

Devant le Ier Corps, les Allemands ne se sont pas retirés. Les combats pour Burnhaupt vont débuter le 26 novembre. La 1ère D.B. éprouve les pires difficultés mais enlèvent les villages de Didenheim, Hochsattt, Galfingue malgré l'opposition des Jagdpanther. Galfingue repris subit 2 assauts des troupes allemandes, menés en pleine nuit, ces assauts sont repoussés. L'attaque française se porte sur Heimsbrun défendu par le 269e Bataillon de Pionniers et le 654e Bataillon de chars lourds. Les Zouaves du 2e Bataillon, les Tirailleurs du 3/6 et le 3e R.C.A. perdent 60 tués et blessés mais prennent ce village. A l'autre bout du secteur du Ier Corps à la 9e D.I.C., 4 bataillons allemands (305.I.R. et 326.I.R.) montent à l'assaut de l'usine électrique de Seppois, les Français reculent. Une section du Bataillon Médical de la 9e D.I.C. se retrouve placé entre les lignes, le médecin-capitaine Cheynel est tué, mais le calme des infirmières impressionne les Allemands qui laissent passer les ambulances. A 17H15, la centrale est reprise sous l'assaut combiné du 2/9e Zouaves, et du 152e R.I.. C'est par centaines que sont relevés les corps des Allemands tués dans ces assauts.

Entre la 1ère D.B. et la 9e D.I.C., la 5e D.B. se rue sur Dannemarie. Bousculant les Allemands à Aspach où elle fait 600 prisonniers, la 5e D.B. disposées en 2 colonnes du C.C.4 renforcé de la Brigade Alsace-Lorraine atteint Hagenbach mais se retrouve devant le solide point d'appui de Ballersdorf où sont retranchés le 76.Infanterieregiment, le 1198.Heeeres Motor-Abteilung, le 435.Flak-Abteilung (Luftwaffe) et la Panzerspak Kompanie (automitrailleuses). Mètres par mètres, les Français progressent et prennent le village. Un autre sous-groupement n'a pas attendu la fin de la résistance et déjà se présente devant Dannemarie. Le 27 novembre, l'attaque reprend sur Dannemarie avec les éléments libérés après la prise de Ballersdorf. Les éléments de la 30.Waffen-GrenadierDivision S.S. (Division Ruthénie) soutenus par des Jagdpanther, trois groupes d'artillerie et un train blindé résistent désespéremment. A 13H00, toute résistance cesse. Au nord de Dannemarie, les Français prennent Spechbach, Enschingen, Baschwiller (110 prisonniers). Au nord de la centrale de Seppois, les combats aussi sont victorieux. Débouchant de Heimsbrun, les Français progressent malgré les mines, les abattis, les bunkers dans lesquels s'accrochent des fanatiques. La poche se résorbe mais le couloir de Burnhaupt existe toujours.

Le Ier Corps a progressé mais devant le IIe Corps, c'est très difficile. La 2e D.I.M. ne peut déboucher de Rougemont. Les Tirailleurs (4e R.T.M.) s'infiltrant par les bois arrivent néanmoins à progresser et à se maintenir. Les efforts de la 3e D.I.A. permettent d'obtenir de petits succès mais loin des espérances. Les 26 et 27 novembre, les progrès sont décevants. La poche n'est toujours pas fermé, Ier Corps et IIe Corps sont toujours séparés par un corridor entre Heinsbrunn et Lauw par où s'écoulent les Allemands en retraite.

Le 28 novembre, le 4e R.T.M. reprend son attaque sur Lauw. Les Tirailleurs sont encore stoppés devant le village. A midi, nouvel assaut soutenu par le C.C.6 et trois groupes d'artillerie. Cette fois, les Allemands lâchent pied. Le C.C.6 fonce sur Soppe-le-Bas, surprise il y a été devance par le C.C.4. venu d'en face. Le C.C.4 a attaqué au clair de lune, dans la nuit du 27 au 28, bousculant les Allemands à Ammertzwiller, Geldwiller, Dieffmatten. De violents combats l'ont ralenti à l'école des cadres de l'armée allemande à Cernay. Il s'apprête à poursuivre lors qu'arrivent les blindés du C.C.4. La poche est fermée, nous sommes le 28 novembre à 14H30. Le 63.Arméekorps cesse d'exister. Les Allemands perdus dans les bois tournent en rond. Les 5e et 8e R.T.M. n'ont plus qu'à les ramasser. En trois jours, les Français capturent 10 000 prisonniers qui vont rejoindre les 5 000 capturés lors de la course au Rhin et Mulhouse.

Le 30 novembre, les Allemands se sont ressaisis sur un front plus court. Le C.C.4 veut dépasser la Doller suivi du C.C.6 mais la résistance est très forte. Les Allemands attaquent la 2e D.I.M. à Bourbach-le-Bas. S'ils sont repoussés, ils empêchent la 2 de continuer. La 3e D.I.A. rencontre quelques succès en reprenant la vallée de la Thur mais sa remontée vers le Grand Ballon et le Hohneck est rejetée. La 4e D.M.M. qui tente de progresser dans la forêt de la Harth éprouve les pires difficultés et subit le 3 décembre une violente attaque de 4 Kampfgruppen et 5 compagnies S.S.. L'attaque est repoussée avec de lourdes pertes de part et autres.

Les Français arrêtent là leurs efforts. Ils ont perdu du 14 au 28 novembre : 1 300 tués, 4 500 blessés, 140 disparus. 1 691 soldats ont été évacués pour gelures et 2 824 pour maladie. Les pertes en matériel sont sérieuses. Mais le Haut-commandement allié est très satisfait des efforts des Français qui ont tué au moins 10 000 ennemis, en ont capturés 17 000, ont pris 120 canons, détruits 60 Jagdpanther et Panzers dans cette bataille de la Haute-Alsace.

Mais la Haute-Alsace, ce n'est pas toute l'Alsace et ce qui reste à accomplir va demander encore plus d'efforts. La 1ère D.F.L. est partie pour les Poches de l'Atlantique mais nous allons retrouver la 2e D.B..

Nous avons laissé la 2e D.B. du gl Leclerc au soir du 31 août dans Paris. Depuis, elle a fait du chemin toujours au sein de l'Armée américaine.

la charge de strasbourg
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Au début de septembre, avec l'accord d'Eisenhower, de Gaulle décide d'envoyer la 2e D.B. vers Strasbourg. Leclerc entame alors une chevauchée vers les Vosges et l'Alsace, qui est ponctuée de plusieurs victoires spectaculaires : prise de Vittel (12 septembre), destruction de la 112.panzerdivision à Dompaire (13 septembre), franchissement de la Moselle (21 septembre). Après quoi, durant un mois, sur les rives de la Meurthe, Leclerc prépare méthodiquement la marche sur Strasbourg. Le 31 octobre, il enlève Baccarat : "une de mes plus belles réussites", dira-t-il.

Au centre du dispositif américain, la 2e DB s'élance vers Strasbourg à la mi-novembre. La capitale alsacienne tombe le 23 novembre. Le serment de Koufra est tenu. Cependant, faute de renforts et de matériels, Leclerc ne peut ni franchir le Rhin ni faire sa jonction, vers le sud, avec la Ière armée française du gl de Lattre. A la fin de janvier 1945, la 2e DB est mise à la disposition de la Ière armée pour participer à la réduction de la poche allemande de Colmar (voir ci-dessous).


Le serment est tenu, l'entrée à Strasbourg

Le gouvernement provisoire mobilise la classe 1943, puis rappelle les classes 1939 à 1942 (du moins ceux qui n'ont pas encore rejoint les armées).

Les Allemands en partie repliés des Vosges se sont organisés autour de Colmar dans une vaste poche qu'ils sont résolus à défendre jusqu'au bout. La 2e D.B. française (gl Leclerc) et la 36e D.I.US (gl Dalhquist), rejoignent l'armée de Lattre qui lance son attaque le 7 décembre sous une tempête de neige. Les forces allemandes sont évaluées à 18 000 hommes sous les ordres du Reichsführer Himmler en personne. Des troupes fraîches continuent à lui parvenir d'Allemagne et continueront jusqu'à la dernière minute.

Le 7 décembre, le 8e Tirailleurs, le 3e Spahis et le commando de Cluny s'emparent de Bitchwiller. Mais partout, les innombrables pièges, destructions, mines empêchent la progression. Le 8 décembre, le 8e Tirailleurs entre dans Thann, rejoint par le 4e Tirailleurs. Les Français sont freinés dans leur avance par l'interdiction qui leur est faite de bombarder Thann et ses trésors d'architecture. Un tête de pont est solidement tenue dans laquelle arrive le 2e Bataillon de Bourgogne, le 6e Chasseurs d'Afrique et le 3/RMLE. Le 10 décembre, Thann est conquise. Objectif suivant: Cernay. Le 12 décembre, le C.C.3 est devant Cernay, rejoint par le C.C.6. La barrière dressée par les Allemands est infranchissable. Partout les divisions françaises sont contenues. Les munitions d'artillerie font défaut. Il faut un coup de main du 6e Colonial pour s'emparer de la centrale électrique de Loechlé où les Allemands abandonnent 337 prisonniers et 50 morts. De Lattre donne l'ordre à Béthouart d'arrêter l'offensive. Il faut attaquer aillleurs.

De Monsabert doit attaquer le 6 décembre avec la 2e D.B. et la 36e D.I.US. Les Américains ont pris Sélestat après 3 jours de combats. La 2e D.B. a étendu ses lignes dans la plaine au delà d'Obenheim jusqu'à Rhinau. Le Corps d'Armée tient tout le flanc oriental des Vosges et une partie du massif. Ce sont les Allemands qui attaquent les Américains, le 6 décembre, sur Guémar, Ostheim, Zellenberg. L'attaque allemande est repoussée. Mais l'attaque alliée sur Marckolsheim s'en trouve reportée. Jusqu'au 10 décembre, les gains territoriaux sont minimes. Le 2e Tabors enlève Lapoutroye, le 3e Spahis enlève le village du Bonhomme. Le 11 décembre, les Allemands contre-attaquent sur Sigolsheim, le 12 sur Sélestat, le 13 sur Obtheim. A chaque fois les positions alliées sont maintenues au prix de durs efforts. Les renseignements obtenus des prisonniers montrent que des troupes allemandes fraîches, en infanterie et en blindés, arrivent tous les jours par le Rhin. De Lattre obtient le report de l'offensive sur l'Atlantique et garde sa 1ère D.B. et demande des renforts.

Sans attendre, de Monsabert a lancé son corps d'armée au nord-ouest de Colmar. En tête, la 3e Division algérienne et la 36e D.I.US sur Ingersheim et Les Trois-Epis. L'ennemi résiste partout. Un coup d'audace du 3e Bataillon du 4e R.T.T. enlève Orbey. Pendant ce temps les Américians enlèvent Kaysersberg. Petit fléchissement allemand. Ammerschwirh, village en ruines tombe le 18 décembre, Colmar est à 8 kms. Les 20, 21, 22 décembre, le 3e D.I.A. attaque encore. Puis le 24 décembre, De Lattre demande d'arrêter l'offensive car plus au nord les Allemands ont attaqué. La Ière Armée se place en position défensive. La progression s'arrête là. Les soldats français piétinent dans la boue et le froid. Partout, les Alliés sont immobilisés. Epuisés par 4 mois de combats et avec conditions climatiques difficiles, les troupes françaises venues d'Italie et d'Afrique du Nord n'en peuvent plus. Malgré leur bonne volonté, les unités F.F.I. n'ont pas beaucoup d'expérience. Il faudra attendre février 1945, pour que l'intégration totale devienne une réalité. L'offensive décisive sur Colmar est différée. La 2e D.B. repasse les Vosges pour épauler les Américains en difficulté dans le secteur de Bitche-Sarreguemines.

Le 16 décembre, les Allemands de Von Rundstedt lance une violente contre-offensive dans les Ardennes belges, par temps de brouillard, avec des moyens considérables (14 divisions). Le terrain enneigé est jugé peu propice aux opérations d'envergure et les Alliés sont totalement surpris.  En 10 jours, l'ennemi  réussit à progresser de 7 kms. Les Américains se ressaisissent alors vigoureusement. Les éclaircies dans le ciel permettent à leur puissante aviation d'intervenir en pilonnant les troupes allemandes qui sont définitivement stoppées, puis refoulées jusqu'à leur base de départ. L'ennemi est exsangue mais nous sommes le 26 janvier 1945. Pendant ce temps, la XIX° Armée allemande a attaqué entre Mulhouse et Sélestat.

Sur Strasbourg, plusieurs divisions allemandes attaquent, le 31 décembre, les lignes américaines au nord de la ville (opération Sonnewende) avec la 198.Infanteriedivision, la brigade blindée "Feldernhalle" et deux régiments de Panzergrenadiers. C'est une force importante équipée des derniers chars lourds Tigre et Jagdpanther La Ière Armée française défend le sud de Strasbourg avec notamment la 1ère D.F.L.. Eisenhower donne l'ordre à la VII° armée américaine, de se replier  sur les Vosges en abandonnant  Strasbourg. De Gaulle menace d'interdire l'utilisation des voies ferrées aux Alliés et leurs transmissions. De Gaulle et le général Juin en coulisses réussissent à faire changer d'avis Eisenhower qui change ses ordres le 4 janvier. Strasbourg n'est alors défendue que par la brigade Alsace-Lorraine, les F.F.I. Strasbourgeois et le groupe d'escadron de la Garde, tous bien décidés à ne pas lâcher un pouce de terrain. Changement d'ordres : la VII° armée alliée ne doit se replier que si elle subit la pression de l'ennemi. Mais déjà pour parer au danger d'une intrusion allemande, de Lattre fait entrer la 3e D.I.A. dans la capitale alsacienne, remplacée dans les Vosges par la 10e D.I. (gl Billotte). Les Tirailleurs du 4e R.T.T. arrivent et prennent position autour de la ville. Bientôt rejoints par les autres unités. Ailleurs sur le front si les autres divisions n'attaquent plus elles résistent vaillamment à la pression allemande.

Les Allemands décidés à reprendre Strasbourg arrivent à 24 km de la ville le 7 janvier. Bientôt, ils sont à 19 kms puis à 12 kms. Les Américains et les hommes de la 1ère D.F.L. tiennent bon. Attaques et contre-attaques se succèdent. Les blindés français ne font "pas le poids" face aux blindés allemands. C'est l'infanterie qui sauve la situation. Les bataillons de marche se sacrifient (B.M.21, B.I.M.P., B.M.24, B.M.5, 22e B.M.N.A.). L'ennemi s'acharne et gagne du terrain jusqu'à parvenir à Wantzenau, la porte de Strasbourg. Le 24e Bataillon de Marche est massacré à Obenheim. Le 12e Tactical air command envoie ses appareil sur les colonnes ennemies qui progressent toujours. Les prisonniers allemands annoncent l'arrivée de nouveaux renforts. De fait, voici des prisonniers de la 269.Infanteriedivision.

Plus au nord, la VII° Armée US a subi les assauts du XXXIX.panzerkorps, des 36. et 47.volksgrenadieredivision et a du reculer en perdant plusieurs villages alsaciens. Le 27 janvier, le front se stabilise sur la Moder et Haguenau. Puis surprise, les Allemands n'attaquent plus. Strasbourg est sauvée.

* voir les unités de la Première Armée Française

Si une grande partie du territoire est libérée, l'Alsace ne l'est qu’à moitié et des poches de résistance dans les ports de l'Atlantique tiennent encore. Les troupes n'ont pu fêter la naissance du Christ dans la joie, il y a eu tant de malheur, il y a encore tant de peine à venir. Le longue litanie des morts aux combat continue à s'égrener. La guerre n'est pas terminée. L'hiver est le plus froid des années 40 et les hommes souffrent beaucoup notamment ceux de l’ Armée d'Afrique peu habitués à ce climat. Ils éprouvent de plus en plus de grandes difficultés, épuisés qu'ils sont par des mois de campagne. Pour le million de prisonniers qui sont encore enfermés en Allemagne, dans les stalags et oflags, les nouvelles sont encore trop incomplètes pour que l'espoir d'une libération prochaine revienne. Les lettres et les colis n'arrivent plus mais il leur reste les postes de radio bricolés en cachette où ils apprennent les nouvelles plus vite que leurs gardiens.

Les Allemands n'attaquent plus vers Strasbourg. Mais autour de Colmar, ils tiennent toujours une large poche que De Lattre a décidé d'attaquer avec l'accord des Américains. Il obtient le renfort de deux divisions U.S. et le retour de la 2e D.B. de Leclerc. Jamais au cours de cette guerre, un Général Français n'avait commandé des soldats américains.

Ainsi, ce sont les 1ère D.F.L. (gl Garbay), 3e D.I.US (gl O'Daniel), 28e D.I.US (gl Cota), 10e D.I. (gl Billotte), 4e D.M.M.(gl de Hesdin), 2e D.I.M. (gl Carpentier), 9e D.I.C. (gl Morlière), 60 bataillons de renforcement dont 40 F.F.I. et les 1ère (gl Sudre), 2e (gl Leclerc) et 5e D.B.(gl de Vernejoul), appuyés par 40 groupes d'artillerie (mais ils manquent de munitions) et l'essence fait défaut (1 seul jour en réserve) qui vont attaquer les Allemands de la XIXe Armée (gl Weisse) avec ses 198., 159.infanteriedivisionen, 2.gebirgedivision (arrivée de Finlande), 708., 189., 338., 716. et 16.volksgrenadierdivisionen (V.G.D.) et 20 groupes d'artillerie.

Le rapport de forces est en faveur des Alliés mais le terrain et les conditions climatiques sont pour les Allemands. Le terrain plat est parcouru par un ensemble de cours d'eau. La centaine de village, les cités ouvrières, les puits de mines, les casemates de la guerre de 1914, les restes de la Ligne Maginot, les blockhaus récents, les bois sont autant de points de résistance allemands. Les conditions climatiques sont épouvantables. Le terrain est couvert d'un mètre de neige cachant les obstacles. Il fait moins 20° sous un vent violent. Reste encore un problème à résoudre : acheminer le matériel, les munitions, les vivres, l'essence depuis les dépôts de la Première Armée installés dans le secteur Besançon-Clerval. Il y a pour cela 1 280 camions dont 500 sont en réparations et il faut acheminer :7 000 tonnes de munitions (4 jours d'unités de feu), 2 millions de litres d'essence (pour 3 jours), transporter la 4e D.M.M. et la 4e demi-brigade de Chasseurs depuis leurs derniers cantonnements, sans oublier les rations alimentaires, les pièces détachées. Le Commandement des Transports et le Commandement du Matériel ont 6 jours pour acheminer le tout jusqu'aux deux lignes de départ de l'offensive. Lignes séparées par une distance de 250 kms sur des axes routiers fréquentés également par le ravitaillement de la VII° Armée US et les unités sanitaires des deux armées. A la veille de l'offensive, le stock d'essence est tombé au plus bas, il n'y en a que pour une journée. De Lattre appelle à l'aide les Américains pour obtenir 10 millions de litres de carburant.

Si les dépots sont rassemblés dans la région de Besançon, tout vient de Marseille et de la base 901, par des routes encombrées et une voie ferrée en mauvais état, sur des ouvrages d'art provisoires. Une double noria de camions et de trains monte à plein vers le nord et revient à vide vers le sud. Tout ce qui roule est un moment consacré uniquement au transport du ravitaillemnt de l'armée.

Le 20 janvier 1945, 07H55, le Ier corps d'armée (gl Bethouart), passe à l'attaque entre Thann et Mulhouse vers Colmar, Rouffach et le Rhin. Le Ier Corps aérien français couvre l'offensive.

Le 1er Tirailleurs marocains (cl Deleuze) part sur les pentes qui dominent Thann au nord-est afin de se rabattre ensuite sur la ville. Dans son sillage marche le 1er Tirailleurs algériens qui doit aller directement vers Thann. En réserve, les 6e Tirailleurs marocains (cl Baillif) et 3e Spahis (cl Pique-Aubrun) sont prêts à épauler, si besoin. A 13H00, les pentes de l'Herrenstubenkopf sont conquises. Il a fallu progresser dans un mètre de neige. Les mulets n'ont pu suivre, quand aux véhicules, ils sont restés en route. De Lattre écrit : La neige bloque les véhicules et l'évacuation des blessés ne peut se faire qu'en les faisant glisser le long de pentes qui ressemblent à des toboggans sanglants.

La 2e D.I.M. avec ses 4e (cl Bridot) et 5e Tirailleurs marocains (cl Piatte) a plus de succès. Dépassant la voie ferrée Thann-Mulhouse, les Tirailleurs progressent de 5 kilomètres.

A la 9e D.I.C., la progression est encore plus appréciable. L'attaque a démarré à 07H45, mais un coup de main préalable a permis de s'emparer d'un passage sur la Doller. Une tête de pont est installée par une compagnie du 23e Colonial qui s'abrite dans une vaste usine protégée de hauts murs et d'un champ de mines. Le Génie lance des passerelles sur la rivière sur lesquelles vont s'engouffrer le reste du 23e, le 6e Colonial (cl Dessert) et une partie du C.C.1. Pfastatt puis Lutterbach puis Illzach puis Kingersheim sont conquis, il est 18H30.

Le 21 janvier, le temps s'est encore dégradé. A la 2e D.I.M, les Allemands attaquent avec une grosse colonne d'infanterie soutenue par un bataillon de chars lourds. Le 3e Groupement de Choc plie et doit se retirer. C'est finalement le 3/8e Tirailleurs qui colmate la brêche. La 9e D.I.C. subit une suite d'attaques allemandes et les Marsouins vont succomber juste au moment où débouche le 2e Cuirs qui détruit deux Jagdpanther, les autres prennent la fuite. Le mauvais temps empêche de poursuivre.

Le 23 janvier, la défense allemande s'est encore durcie et la 9e D.I.C. ne peut s'emparer de ses objectifs, les cités Anna et Kuhlman. Ces cités sont de vastes ensembles de maisons, de commerces, d'églises, d'usines et de batiments divers dont la superficie est conséquente. Amélie II c'est 29,5 hectares ; Graffenwald, c'est 450 logements.

Le 24 janvier, l'attaque en force de Wittelsheim réussit et le 8e Tirailleurs prend la mine de Grafffenwald et la cité ouvrière J.Else. Les contre-attaques allemandes sont repoussées. Notamment, celle menée par la brigade blindée Feldernhalle et une partie de la 716.infanteriedivision. Les Allemands y perdent 60 morts, 7 chars et 2 automitrailleuses. Les Marsouins font une centaine de prisonniers dont le commmandant de la Feldernhalle. Dans la foulée, les Marsouins prennent la station de Richwiller, le puits de mine Max et la cité ouvrière Amélie II.

Les 9e D.I.C et 2e D.I.M. poursuivent leur offensive. Objectifs Witteheim et Witellsheim à partir des cités ouvrières fraichement reprises. Les cités ouvrières Anna, Fernand, Grassar-geste sont reprises. Les puits Anna, Kuhlman, Amélie 1 également. Les Français sont à un kilomètre de Witteheim et de Wittelsheim.

6 jours de combats et les objectifs sont à portée de main. Les hommes sont épuisés, les gelures ne se comptent plus. Il faudra encore 9 jours de combats mais personne ne le sait encore.

Le IIe corps d'armée (gl de Montsabert) a prévu d'attaquer à son tour depuis le nord de Colmar. Le corps d'armée comprend alors : la 1ère D.F.L., la 3e D.I.US, la 5e D.B., un C.C. de la 2e D.B.. Objectifs : forcer le cours de l'Ill, atteindre le canal de Colmar, aller vers Neuf-Brisach et le Rhin. Le 12e Tactical Air Force américain couvre l'offensive.

C'est le gl O'Daniel et sa 3e D.I.US qui lance l'opération le 22 janvier à 21H30. C'est la division qui a débarqué un an plus tôt à Anzio en Italie, une division expérimentée. Les 7e et 30e R.I.US traversent la Fech et prennent Guémar. C'est une surprise totale pour l'ennemi. Les deux régiments traversent rapidement et pénétrent dans la forêt communale de Colmar, il est 02H30 le 23 janvier. A 16H30 ils sont devant Riedwhir et Holtzwihr. Les Allemands se sont ressaisis et un groupement de 10 chars lourds et d'infanterie attaquent les Américains qui sans soutien de blindés doivent battre en retraite sur l'Ill. Pourquoi sans soutien, tout simplement parce que le pont de bois sur lequel le premier char s'est engagé s'est écroulé sous son poids. Le temps d'en reconstruire un, les Allemands ont attaqué.

Les Français démarrent à 07H30 le 23 janvier. Ostheim nécessite trois heures de combat avant que le village en ruines ne tombe entre nos mains. Les bois de Illhaeusern sont conquis. Le village et les ponts de Illhaeusern sont enlevés par le 1er Bataillon de Légion. Les blindés ne peuvent suivre, le terrain a été miné par de nouveaux engins en verre et en plastique indécelables avec les moyens habituels. Ce sont les fantassins qui doivent les trouver à la baïonnette sous un mètre de neige. Enfin les blindés rejoignent en fin de journée. Les objectifs de la première journée sont atteints.

Le journée du 24 sera moins avantageuse. Les Américains s'emparent du château de Schoppenwihr mais sur l'Ill les deux têtes de pont sont menacées. Les Français sont bloqués par les attaques des Panther et des Rhinoceros (ou Nashorn) allemands. Les renforts nazis affluent et continueront tant que les Alliés ne contrôleront pas toute la rive du Rhin alsacien. A la conférence du soir, De Lattre demande des renforts et obtient de son supérieur, le gl américain Devers, le 21e Corps d'Armée US avec ses services, la 75e D.I.US et le 28e D.I.US qui passent sous commandement français. Le 75e D.I.US est prévue en renforcement.


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Les combats promettent d'être féroces pour la conquête des villages de la poche. Les Allemands contre-attaquent sans cesse. Les champs de mines, les coupures de route, les ponts détruits, les villages détruits, les cours d'eau ralentissent la progression. Le dégel va se révéler aussi pénible, transformant les cours d'eau en torrents, les champs et les prés en marécages.

Dans l'attente des renforts, l'offensive continue. Le 25 janvier à 03H00, la 3e D.I.US remet çà. Un pont a pu être jeté sur la rivière et les forces s'équilibrent. Les Américains arrivent à 2 kms de Jebsheim, prennent Houssen. Devant la D.F.L., la résistance est toujours aussi féroce et les Bataillons de Légion peinent devant le bois d'Elsenheim. L'aube du 26 permet d'espérer, maintenant que les blindés ont pu traverser l'Ill. La 28e D.I.US est entrée en scène.

Jebsheim sur le point de rencontre du canal de Colmar et du canal Rhône-Rhin est un point clé de la défense allemande. A Jebsheim, les combats se déroulent sous un froid sibérien de moins 20°. Les dépôts de carburant gèlent. Il y a par endroit un mètre de neige. De Lattre raconte dans ses mémoires "Chaque immeuble est une redoute, chaque soupirail cache un panzerfaust (lance roquette anti-char). A la grenade, au pistolet-mitrailleur, au poignard, l'avance se poursuit lente et meurtrière." Les blessés et les morts s'accumulent. Il faut la journée du 26 et une nuit aux 254e R.I., au sous-groupement Chayla et aux Paras pour pénétrer au coeur de l'agglomération. Mais le village n'est pas encore conquis.

A Riedwihr, c'est aussi dur et ce n'est qu'à la nuit que les Allemands en sont chassés par le 2/15e R.I.US et le sous-groupement Viéville. Depuis Holzwihr, les Allemands contre-attaquent avec deux compagnies d'infanterie et deux bataillons de chars lourds. C'est là que ce fait connaître le s/lieutenant André (Audy) L.Murphy du 1/15e R.I.US. qui sera le soldat américain le plus décoré de la Seconde Guerre Mondiale et plus tard un acteur de cinéma célèbre des années 1950-60. L'attaque allemande est repoussée. Le 30e R.I.US contre-attaque Holzwihr d'où les Allemands sont chassés et dans son avance prend Wickerschwihr.

A Jebsheim les combats continuent. Tout le C.C.6, le 3/R.M.L.E., les Parachutistes et le 254e R.I. se battent maison par maison, cave par cave, pour déloger les Allemands. Des combats au corps à corps se déroulent dans les immeubles en ruines. Ce n'est que le 28 janvier vers 18H00 que le commandant du C.C.6 peut annoncer : Nous avons pris Jebsheim.

Le 26 janvier, la brigade Delange et le C.C.Vésinet attaque les bois d'Elsenheim. Progressant arbre par arbre, le 3e Bataillon de Légion détruit les casemates protégées de pièges et de mines. En 10 heures, les Légionnaires progressent d'un kilomètre. Ils marchent en direction du sous-groupement Sarrazac qui n'a pu entrer dans le bois. Ils en sont séparés par quelques centaines de mètres truffés de blockhaus, de fossés. Le 27 dès l'aube, les Légionnaires repartent et les Allemands cèdent. Le bois est nettoyé.

Poussée vers Grussenheim par Elsenheim. Sur la rivière Blind, il faut construire un pont. Bombardement de l'artillerie allemande, 10 pionniers du Génie sont tués et 30 blessés dont tout l'encadrement. Il faut faire venir d'autres spécialistes. Le pont est lancé le 28 janvier sous le bombardement allemand qui tue de nombreux officiers. L'assaut est cependant ordonné. Des blindés français sont immédiatement détruits et c'est la Légion qui va enlever la décision. Au soir, Grussenheim est conquis. Le prix à payer est élevé 387 morts et blessés dont 21 officiers. 6 chars et 6 half-tracks sont perdus.

Les Allemands contre-attaquent avec leur 198.infanteriedivision et un escadron de Rhinocéros contre Grussenheim. Ils y perdent 250 tués et 100 prisonniers. Ils contre-attaquent sur Jebsheim avec leur 136.Gebirgeregiment, les Panther du 525.Schw.panzerjäger. Ils prennent quelques maisons puis sont repoussés. Jebsheim est définitivement conquis. Les Français et les Américains cote à cote ont fait 1050 prisonniers mais perdu 600 morts et blessés. Les Allemands laissent sur le terrain 500 morts qui jonchent les rues et les ruines.

Les combats pour Ostheim, Jebsheim, Holtzwihr, lsenheim, Grussenheim, Ensisheim, Wittenheim n'ont laissé que des champs de ruines. Qu'en sera t'il pour Colmar ?

L'offensive continue, la 3e D.I.US déclenche un tir d'artillerie sur les lignes allemandes au sud du canal de Colmar. Plus de 16 000 obus d'artillerie et 22 300 obus de 40mm de la D.C.A. bouleversent les localités de Bischwihr, Fortschwihr et Mutzenheim. Le tir dure 3 heures. Sous ce barrage s'élancent 4 bataillons du Génie et 2 compagnies d'équipages de pont derrière les 7e et 15e R.I.US. A 21H00, ce 29 janvier, les canots pneumatiques franchissent le canal. A minuit, les deux régiments ont traversé et déjà le Génie est au travail. Les 3 villages sont pris, puis c'est au tour de Wihr-en-Plaine. Au même moment le C.C.5, le 2/R.M.L.E., les Commandos de France prennent Urschenheim. Le C.C.6, le 254e R.I.US, le 1er Choc sont confrontés à une forte résistance vers le bois de la Hardt. Les Sherman sont supplantés par les Jagdpanther embusqués dans le bois. Il faut reculer.

Chez le gl Leclerc, les Tirailleurs du 3e R.T.T. avaient franchi l'Ill à Huttenheim et avancé de 2 kilomètres vers l'est suivi du C. C.Dio. Mais l'attaque a du cesser devant l'épaisseur de neige. Depuis cette partie du front est inchangée depuis le 27 janvier.

Le 31 janvier, la 3e D.I.US et le C.C.4 sont bloqués devant Horbourg. Les Commandos de France (cdt d'Astier de la Vigerie) et le C.C.5 qui sont bloqués au bord de Durrennentzen subissent l'attaque de la 2.Gebirgedivision. Les combats rue par rue, maison par maison durent toute la nuit. Le renfort d'une compagnie du 15e R.I.US force la décision et le 1er février le village est pris.

Le même jour, la 75e D.I.US enlève Horbourg, Andolsheim. Le C.C.5 enlève Widensolen. Les Alliés sont à 3 kms de Neuf-Brisach. Colmar commence à être débordé par l'est. Les ordres allemands trouvés par les Français sont clairs, faire barrage devant Neuf-Brisach avec les survivants de la 2.Gebirgedivision, des 198. et 189.Infanteriedivisionen. Il ne faut plus compter hélas sur les C.C.5 et C.C.6 et sur la Légion cassés par les combats des jours derniers.

Le 2 février, à 02H00, l'artillerie fait entendre sa voix. A 07H00, le 109eR.I.US traverse le champ de manoeuvre de Colmar. Derrière lui, le C.C.4 fonce. Le 109e R.I.US laisse aux Français l'honneur d'entrer dans Colmar. A 11H30 les blindés du groupement Préval sont au coeur de la ville sur la place Rapp. Dans sa course, le Groupement traverse toute la ville et arrive aux limites sud-ouest. Les groupements de Chambost et du Breuil entrent dans Colmar eux aussi et se répandent dans les quartiers. Quelques groupes de fanatiques résistent encore. Les ilots de résistance sont enlevés les uns après les autres. Le Groupement de choc termine le travail. Colmar est libéré, nous sommes le 2 février 1945. Mais la poche n'est pas encore vidée.

L'évènement que constitue la prise de Colmar occulte les combats qui permettent à la 3e D.I.US de prendre Baltzenheim et Kunheim. Mais elle est arrêtée devant Biesheim. A moins de 2 kms, Neuf-Brisach et à peine plus loin, le Rhin couvert par l'épais brouillard artificiel tendu par la Werhmatch pour protéger ses ponts.

Nous avons laissé le Ier corps devant Wittelsheim. Une tempête de neige empêche le 26 janvier toute opération. Le 27 janvier, à 07h35, le 6e Colonial est chargé de la Cité Kuhlman. Une grande bâtisse de 6 étages barre la route. Les Allemand s 'y sont retranchés couverts par de nombreuses armes lourdes. Le C.C.1 avance 3 chars, un brûle, les deux autres font une brêche dans le mur d'enceinte. Les Marsouins s'élancent. Les corps à corps se succèdent. A 16H00, la bâtisse est nettoyée. Les combats pour prendre le reste de la cité vont durer 2 jours.

A l'autre bout du front du Ier corps, la 4e D.M.M. prend une partie de Cernay puis s'empare de Vieux-Thann. Le 28 janvier, le C.C.2 et le 8e R.T.M. force la décision contre la cité Amélie 1. Mais pour la cité Langenzug, la fusillade va durer 2 jours. Wittelsheim n'est toujours pas pris et Béthouart s'impatiente. Il fait distribuer plus d'obus à la 2e D.I.M. au détriment des autres divisions. Mais il est trop tard le 29 janvier pour lancer l'assaut.

Les 29 et 30 janvier, c'est aussi décevant à la 4e D.M.M.. Pourtant les Marocains attaque dès l'aube du 30 sur la Thur. Une énorme blanchisserie bloque le passage et les Marocains sont bloqués. La journée du 30 n'est pas entièrement mauvaise car le 3/6e R.I.C appuyé par un peloton du C.C.1 et des pelotons du R.C.C.C. enlèvent Wittenheim.

Le 1er février, le 1er Corps piétine toujours. L'avance reste minime. Les combats pour la cité Saint Barbe et le puits Théodore durent 11 longues heures pour le 21e R.C.C. et le groupement Durosoy du C.C.1.. Le 2 février, c'est l'annonce de la libération de Colmar.

Le 3 février, les nouvelles de Colmar encouragent tout le monde. La 2e D.I.M. prend Wittelsheim. La 9e D.I.C. et un escadron du C.C.3 progressent en direction d'Ensisheim.

Le gl Billotte (10e D.I.) annonce un début de décrochage des troupes allemandes des Vosges centrales. Des instructions sont vite portées aux unités : "couper retraite à tout ennemi se trouvant à l'ouest de l'Ill". Devant le Ier corps, l'ennemi commence à se replier vers le nord. Pulversheim est enlevé. Pour Ensisheim, les combats sont féroces pour le 2/6e R.I.C. et le C.C.1. qui pénètrent dans l'agglomération au bout de 4 heures de bataille. Mais l'Ill bloque le passage vers le village proprement dit et tous les ponts sont coupés. Objectif : faire la jonction avec le IIe Corps. Elle n'aura pas lieu le 4 février, les Américains piétinent devant Brisach, la 75e D.I.US peine dans la forêt de Colmar. La 12e D.B.US peine.

La 4e D.M.M. entre sans opposition à Steinbach, Uffholtz, Cernay. Les Allemands reculent et les Français peinent pour les rattraper. Le 4e Spahis bouscule un point d'appui à Wuenheim et entre en trombe à Soultz faisant 100 prisonniers. Ne pas laisser les Allemands souffler. Le 1er R.T.A. tombe à Wattwiller sur de gros élèments de la 159.infanteriedivision qui vient des Vosges lui faisant 400 prisonniers. Molkenrain, Issenheim et Guebwiller sont pris. Le détachement Loth atteint Rouffach en pleine nuit surprenant les Allemands, traverse la localité et prend le quartier sud.

Le gl O'Daniel tente un coup en allumant ses projecteurs de DCA en direction des nuages. Sous ce clair de lune artificiel, la 3e D.I.US force le passage entre Neuf-Brisach et le Rhin vers minuit. A 06H00, Vogelsheim est conquis puis c'est au tour de la caserne Abatucci. Le fort Mortier résiste. Le 15e R.I.US parvient à occuper l'amorce du pont-route et du pont de chemin de fer. Deux des voies de ravitaillement des Allemand sont ainsi coupées. Il ne leur reste plus que les ponts de Chalampé. Le C.C.Langlade prend Appenwihr, Logelheim, Hettenschalg, Wolfgantzen.

Au IIe Corps, la joie d'avoir délivré Colmar est de courte durée. Le 7e R.I.US attaque Biesheim à 02H30 le 3 février, à 17H00, le village est pris. Au pied des Vosges, le 112e R.I.US prend Turckheim. Le C.C.4 tient Obermorschwihr.

Bethouart donne l'ordre de ne pas se laisser arrêter par la nuit. Le C.C.3 traverse Ungersheim, occupe toute la rive gauche de l'Ill et est arrêté par la rivière. C'est la même chose à la 9e D.I.C. devant Ensisheim. Il faut traverser. Le 2/21e R.I.C. prend place dans les canots vers 17H00. Le premier canot disparait emporté par le courant, le second est coulé par un éclat d'obus, le troisième se renverse. Mais trois autres atteignent la rive opposée.La tête de pont est créée. L'artillerie de la division couvre la traversée du 3e Bataillon. L'artillerie allemande tente de s'opposer au franchissement. Les Marsouins entrent à Ensisheim. Les Allemands sont en fuite et le Génie commence à construire ses ponts.

Sous les Vosges, la jonction est opérée à Rouffach entre le Ier Corps et le IIe Corps empêchant la retraite des Allemands encore dans les Vosges. Le gl Billotte fait mouvement avec sa 10e D.I. dans la montagne. Les Zouaves entrent à Munster. Menacés d'encerclement, les Allemands du Hohneck et de la Schlutcht décrochent. La route des Crêtes est dépassée, le Régiment du Morvan prend le Ballon de Guebwiller. De la plaine, le Ier corps et le XXIe Corps US remontent par toutes les vallées. La 4e D.M.M. dans la vallée de la Lauch prend Guebwiller. C'est à Soulmatz que la menace est la plus grande. Le 1er Etranger de Cavalerie et le 1er Choc accourent. Bilan : 500 prisonniers. Les deux jours suivants, le ratissage des Vosges continue et au soir du 5 février, le Commandement considère que c'est terminé.

Le 6 février, les Allemands tiennent encore un rectangle de 35 kms sur 20 dans ce qui reste de la poche de Colmar. De multiples convois y sont entassés, rescapés des divisions allemandes battues. Malgré tout la résistance allemande est très énergique. L'embouteillage atteint son maximum vers Balgau et Blodelsheim vers les deux points de passage de Chalampé. Pratiquement toute la zone est sous le dir de l'artillerie alliée. Le temps qui se dégage permet au 12e Tactical Air Force et au Ier Corps aérien Français (gl Gérardot) d'intervenir. Les appareils mitraillent et bombardent les colonnes en retraite sous le menace constante de la Flak désormais concentrée. 10 P 47 français sont détruits dans la seule journée du 4 février (4 pilotes sont tués).

C'est encore la 3e D.I.US qui en pleine nuit entre dans Vogelbrunn, par contre il faudra 24 heures pour prendre Algolsheim. La 2e D.B. a lancé le sous-groupement Gibrius sur Obersaasheim qui résiste. Reste la ville-citadelle de Neuf-Brisach. Va t'on devoir la prendre d'assaut comme sous Vauban ? Un civil s'approche discrètement et entraîne un groupe de soldats (sgt Weiler) par un tunnel. Le groupe entre dans la ville suivi de renforts, surprend des Allemands qui ne demandent qu'à lever les bras. La radio peut lancer "Neuf-Brisach est libéré".

La 75e D.I.US ne veut pas être en reste et prend Weckolsheim et envoie un bataillon renforcer Gibrius. Le sous-groupement s'avance vers Heiterein et Feissenheim. A la vue de blindés, il va faire donner l'artillerie lorsqu'il s'aperçoit que ce sont les chars de la 1er D.B. qui entrent dans la cité. Les 1ère et 2ème D.B. se sont rejointes. Pour cela, la 1ère D.B. a forcé le passage par Sausheim et Baldersheim.

Le rectangle tenu par les Allemands est devenu un tout petit triangle. C'est au Ier corps que revient le travail de nettoyer la zone et de sonner l'halali. Le XXIe Corps US se retire pour tenir les bords du Rhin, la 2e D.B. ne laisse en ligne que le sous-groupement Gibrius. Les bouchons sautent les uns après les autres. La Harth est traversée par le 2e D.I.M. et la 9e D.I.C.. Les Spahis entrent à Landau, la colonne Fabien entre à Peit-Landau. Bientôt il ne reste plus que 4 villages aux mains des Allemands, Rumersheim, Bantzenheim, Ottamarsheim et Chalampé dont un pont tient toujours.

A 08H00, le 9 février, le dernier pont-rail de Chalampé s'écroule dans le fleuve. Les 2e D.I.M. et 9e D.I.C borde le fleuve. De Lattre publie un communiqué de victoire : "Au vingt et unième jour d'une âpre bataille, au cours de laquelle les troupes américaines et françaises ont rivalisé d'ardeur, de ténécité et de sens manoeuvrier, l'ennemi a été chassé de la plaine d'Alsace et a dû repasser le Rhin."

La poche est enfin nettoyée. 2 137 tués, 11 253 blessés, gelés ou malades, sont le prix pour les Français de la victoire de Colmar. Les Américains ont perdu 542 tués. Les Alliés croient la XIX° Armée allemande anéantie, elle retraite depuis la Provence. Elle laisse 20 000 prisonniers. Nous la retrouverons encore dans les jours à venir.

Au nord de Strasbourg, malgré leurs efforts, les Allemands cèdent du terrain. Le 31 janvier, ils ont abandonné Gambsheim, lieu de leur dernière tête de pont. Strasbourg, dégagé du nord au sud par l'offensive contre Colmar, est sauvé. Il reste un tout petit coin de France encore occupé au nord de l'Alsace, entre Haguenau et Lauterbourg à la frontière sur la Lauter et le Rhin.

Sur le front de l'ouest, la Werhmacht a perdu en 8 mois, 1 million 500 000 hommes. A l'est, sous la poussée de l'Armée rouge, que plus rien ne peut arrêter, Varsovie est tombée, la Prusse envahie, la Baltique atteinte, Budapest a capitulé. De Lattre annonce la fin de la bataille d'Alsace. Il a fallu à 400 000 soldats dont 125 000 Américains pour en finir en 21 jours de combat avec la poche de Colmar. Les combats en Allemagne promettent d'être rudes. Le 11 février 1945, les généraux De Gaulle, de Lattre, Leclerc, Milburn (US), O'Daniel (US) rangés sur la place Rapp assistent au défilé des vainqueurs.

La 1ère D.F.L. rejoint le front des Alpes. la 2e D.B. reprend sa place dans l'armée américaine, Montsabert et sa Task Force sont rattachés à la VII° Armée américaine, la 1ère D.B. perd ses équipages de pont qui passent aussi à la VII° Armée. La 10e D.I est destinée à garder la rive française du Rhin, elle est composée à majorité d'unités issues des F.F.I..

3 millions de soldats alliés sont en train d'entrer en Allemagne sur un front qui s'étend de la Mer du Nord à la Suisse.

L'Armée Française dispose des 1ère division française libre (1ère D.F.L., gl Garbay), 2e division d'infanterie marocaine (2e D.I.M., gl Carpentier), 3e division d'infanterie algérienne (3e D.I.A, gl Guillaume), 4e division marocaine de montagne (4 e D.M.M., gl de Hesdin), 9e division d'infanterie coloniale (9e D.I.C., gl Morlère puis Valluy), 10e division d'infanterie (10e D.I., gl Billotte), 14e division d'infanterie (14e D.I.), 19e division d'infanterie (19e D.I.), 23e division d'infanterie (23e D.I.), 25e division d'infanterie(25e D.I.), 27e division alpine (27e D.I.A.), 1ère division blindée (1ère D.B., gl Sudre), 2e division blindée (2e D.B., gl Leclerc sous commandement US), 5e division blindée (5e D.B., gl Schlesser qui remplace de Vernejoul). Pour l'instant les troupes prennent du repos. Repos est vite dit car tous préparent la prochaine phase de la campagne, l'entrée en Allemagne.

Cette page est en partie mon concentré personnel du livre du Maréchal De Lattre de Tassigny : "Histoire de la Première Armée Française" auxquels sont ajoutés des renseignements fournis par d'autres ouvrages.

Décembre 1944 : Sénégal.

Des tirailleurs libérés des camps de prisonniers et enfermés depuis la défaite de juin 1940, reviennent au Sénégal pour être démobilisés. Ils sont originaires de Côte d’Ivoire, de Haute-Volta (actuel Burkina Faso) et du Soudan français (actuel Mali).


libérés

Débarqués le 21 novembre à Dakar du Circassia, ils sont rassemblés au camp de Thiaroye à quelques kilomètres de là. Mais ils attendent de recevoir les arriérés de leur solde et de pouvoir échanger leurs marks de prisonniers. En France, malgré leurs réclamations, on le leur avait refusé sous divers prétextes, et on leur avait promis que tout se ferait au Maroc. A Casablanca, rien . On verra au Sénégal. Mais ici rien non plus ne se fait, on leur propose l'échange de leur argent à la moitié de sa valeur, et certains reçoivent un nouvel ordre de départ vers Bamako. Trop c'est trop ! Les Tirailleurs protestent. Ils séquestrent un général qui ne leur donne satisfaction que pour être relâché. La nuit suivante, le 1er décembre 1944, l'Armée française intervient en bombardant et mitraillant le camp. Les Tirailleurs sont désarmés. Combien de morts ? Aucun chiffre officiel n'est publié : 25, 38, 60 ou plus. Quelques uns de ceux qui n'ont pas été tués passent en jugement et sont emprisonnés,condamnés à des peines allant de un à dix ans de prison, en dépit des efforts déployés par leur avocat. Une grâce présidentielle leur est accordée en avril 1947, lors du voyage de Vincent Auriol en A.O.F.. Que sont devenus les autres ? En France et à la Première Armée on ignore tout. Aujourd'hui qui connaît cet évènement peu glorieux de notre histoire.


La bataille des Vosges



L'invasion de l'Allemagne