LA TROISIÈME RÉPUBLIQUE

1871 : Algérie.

20 janvier : A Souk Ahras, les spahis de plusieurs unités refusent de partir à la guerre en France. Ils se révoltent, molestent leurs officiers. Faits prisonniers, ils sont désarmés, révoqués et renvoyés dans leur village. Les spahis reçoivent le soutien de la population qui considère cette mesure comme injuste. En Kabylie, 200 000 paysans prennent les armes (des sources citent 800 000). Les meilleures unités françaises sont en métropole. Les implantations civiles et militaires françaises sont menacées. A El Milia, il faut 4 000 hommes de troupe pour dégager la ville. Les insurgés se renforcent. A Bordj-Bou-Arreridj, le village est brûlé après pillage. Les attaques se succèdent contre Bougie, Fort-National, Tizi-Ouzou. A Palestro, 31 colons sont massacrés, 42 sont enlevés. 36 d’entre eux seront massacrés plus tard.

La France envoie de métropole 85 000 hommes libérés par la fin de la guerre et la fin de la Commune. Les 2  chefs des insurgés sont tués l'un après l'autre (Mohammed-el-Mokrani puis Boumezrag),  Au bout de 8 mois, la révolte est matée au prix de 2 700 morts militaires (en majorité de maladie). Le gouvernement en profite pour infliger amendes et punitions collectives.  La répression est si féroce que certains historiens pensent que les pertes algériennes pourraient être supérieures à celles de la guerre d’Algérie de 1954-1962. Les autorités françaises en profitent pour réquisitionner 140 000 hectares qui seront attribués aux Alsaciens et aux Lorrains chassés de chez eux par l’Armée prussienne.

1871, La commune de Paris.

Après la levée du siège, la Garde Nationale de Paris est demeurée sous les armes. On chuchotte, on murmure, on complote, on s'agite, on refuse l'armistice. Des barricades commencent à s'ériger. Paris est sans municipalité. Le gouvernement est parti à Bordeaux puis est revenu à Versailles. Le peuple était déjà fortement en colère par les défaites successives des armées. Le siège n'a rien arrangé, le petit peuple a bien vu que les privations n'étaient pas également réparties.

Le 18 mars, la garnison de Paris (Gendarmes, 35ème de ligne, 42ème de ligne, 109ème de ligne, 120ème de ligne) sort de ses casernes et tente de s'emparer des Buttes-Chaumont où sont stockés une partie des canons. Devant la marée humaine de femmes et d'enfants qui s'oppose aux départ des canons (payés par les Parisiens), les soldats hésitent. Les gardes nationaux se font menaçants. Les mitrailleuses sont en batterie. Un fusil, deux fusils puis les tous fusils se relèvent, des soldats quittent les rangs et s'enfoncent dans la foule.Un officier prend la fuite, puis d'autres suivent, abandonnant des lignards désemparés qui entrent dans les auberges où l'on sert grassement à boire. La Garde Nationale est maitresse de Paris. Des élections portent au pouvoir à Paris, 86 élus majoritairement ouvriers. De frustrations en humiliations, un mouvement populaire nait le 28 mars 1871 : “la Commune”, rêvant d’égalité, de justice sociale. Paris a désormais un gouvernement élu, une armée populaire. Les décrets commencent à être proclamés. Que vont faire les autorités à Versailles.

40 000 hommes de l’armée régulière en garnison à Paris ont gagné Versailles et rejoint le gouvernement (1500 sont oubliés que les Fédérés enferment dans la caserne Prince-Eugène). Thiers obtient des Prussiens l’autorisation de porter les effectifs de l’ armée française de 80 000 à 130 000 hommes et obtient la restitution de 12 000 fusils Chassepots. Le gouvernement renvoie en province 220 000 hommes de troupe désarmés par la capitulation et les remplace par les soldats des armées de la Loire et du Nord. Le gouvernement obtient le retour de prisonniers d’Allemagne pour renforcer ses troupes. Le drame va commencer. Le peuple de Paris peut aligner 190 000 hommes de la Garde Nationale, les « Fédérés« . Les Prussiens sont aux portes de Paris, occupent les forts de l’est et du nord. Ils vont assister en spectateurs à un moment tragique de notre histoire.

Le 2 avril, les Versaillais commencent leurs tirs aux canons sur Paris. Des coups de feu commencent à s'échanger entre Versaillais et Fédérés aux points de contact, à Chatillon, à Puteaux. Les Fédérés  tentent une sortie en direction de Versailles. Écrasée par l’artillerie versaillaise (au moins deux divisions), l’attaque échoue. Le gl Vinoy qui a rejoint Versailles fait fusiller tous les Fédérés qui portent un semblant d'uniforme. Les Fédérés ont reflué vers Paris après des combats à Neuilly, Villacoublay, Châtillon. Ils ont perdu 2 000 hommes. Ils comptaient que les soldats réguliers mettent crosse en l'air à leur vue, mais pas un soldat n'a fait défection. A Paris, c'est la confusion. Des otages sont fusillés car on crie partout à la trahison. Les bourgeois et le clergé sont les plus suspectés.

Les Versaillais qui sont désormais 130 000 encerclent Paris. Le but unique : mater la révolution. Pour cela les grands moyens vont être utilisés. Pas moins de 5 Corps d’armée (65 régiments) et une armée de réserve de 18 régiments vont attaquer Paris (artillerie non comprise dans ces chiffres). Vont attaquer dans Paris : les 45e, 54e, 48e, 87e 51e, 72e, 67e, 68e, 69e, 39e, 31e, 36e, 82e, 85e, 71e, 41e, 70e, 55e, 58e Régiments de marche ; les 10e, 23e, 2e, 30e, 4e, 18e Bataillons de Chasseurs à pied ; les 135e, 119e, 113e, 114e, 26e, 94e Régiments d'infanterie de ligne ; un Régiment de marche de la Légion étrangère; les 9e, 12e, 6e, 7e, 11e Chasseurs à cheval ; les 2e, 3e, 8e Hussards ; les 4e, 7e, 8e, 9e Dragons ; les 3e, 4e, 8e Cuirassiers ; les 6e, 5e, 1er, 2e, 3e, 4e, 13e, 14e, 15e, 17e Régiments provisoires. En réserve, mais qui vont intervenir dans la répression, les 35e, 42e, 109e, 110e d'Infanterie ; les 22e, 26e Chasseurs à pied ; les 64e, 65e, 74e, 75e, 37e, 79e, 90e et 91e Régiments de Marche ; les 1er et 2e Régiments d'infanterie de marine ; 2 groupes de Fusiliers Marins. Toutes ces troupes ont été, certes vaincues par les Prussiens, mais elles sont aguerries, bien armées. Prussiens d'ailleurs qui depuis leurs positions empêchent les Fédérés de sortir de l'enceinte fortifiée dans sa partie nord.


Les barricades

Versaillais et fédérés se battent dans Châtillon, Villacoublay, Nanterre et Neuilly. Les Versaillais attaquent les forts de la ceinture de Paris. A partir du 5 mai 1871, les forts d’Issy, de Vanves, de Montrouge, de Clamart, tombent les uns après les autres, sous les tirs d’artillerie. L'étau se resserre.

Le 21 mai 1871, par une porte non gardée, 2 compagnies d’Infanterie de ligne entrent dans l'enceinte de Paris. A leur suite, ce sont 70 000 Versaillais qui franchissent les fortifications. Dans la nuit, pendant que les Parisiens dorment, des régiments entiers s'infiltrent dans Paris. Toute l'armée de Mac-Mahon entre dans Paris. Les premières éxécutions sommaires commencent. De quartier en quartier, les Versaillais progressent. Les Fédérés construisent des barricades dans les rues du centre de Paris. Il y a bientôt 500 barricades que les Versaillais vont entreprendre de détruire une à une au canon.


Les Fédérés

Les Fédérés et les Versaillais mettent le feu aux monuments de Paris, notamment les Tuileries, le Conseil d’État, la maison de la Légion d’Honneur, le Palais de Justice. Le feu est mis également à des maisons et c’est à la lueur des incendies que les combats de rue font rage. Les soldats des 2 camps s’entre-tuent à bout portant. Pas de quartier, pas de prisonniers. Ils sont encore très rares ceux qui sont emmenés vers Versailles. La bataille de ce qui sera appelé la semaine sanglante continue. Les Fédérés exécutent encore des otages, les Versaillais fusillent sans jugement. Dans les longues files de prisonniers qui sont conduites vers les prisons de Versailles, le gl marquis de Gallifet repère les hommes aux cheveux gris et les fait fusiller dans le fossé, les suspectant d'avoir déjà participé aux émeutes de juin 1848. Les troupiers massacrent hommes, femmes et enfants croisés sur leur chemin. Ils pourchassent dans les rues et les maisons tous ceux qui sont soupçonnés de sympathie pour la Commune.

Le 26 mai, il reste aux Fédérés, 4 000 combattants retranchés dans les XIX° et XX° Arrondissements et quelques points d'appui. Face à eux, les cinq corps d'armée de Mac Mahon. Les Versaillais commencent par écraser au canon chaque barricade, puis montent à l'assaut. Derrière les unités d'assaut, des unités sont chargées des perquisitions et des fusillades. Les Prussiens empêchent les fuyards de quitter la ville. On se bat jusque dans les cimetières. Au Père Lachaise,des Fédérés sont fusillés contre un mur.

Au soir du 28 mai, devant la dernière barricade, un vieux sergent d'infanterie se présente et offre la clémence pour les Fédérés. Il est renvoyé. Postés a 50 mètres, deux canons écrasent la barricade. Les canons arrêtent leur tir et un régiment d'infanterie s'aligne, baïonnettes au canon. Un dernier coup de canon des Fédérés balaie les premiers rangs. Mac Mahon lance sa cavalerie. C'est terminé, la dernière barricade est tombée.

Les cours martiales reprennent de plus belle. On relève les pelotons d'éxécution après quelques fusillades et ça continue. Des milliers de personnes sont enfin emmenés à Versailles où ils sont gardés prisonniers dans des conditions épouvantables. Seul le fort de Vincennes résiste encore, mais le 29 mai, la garnison de 24 hommes capitule, 9 sont fusillés sur le champ.

Des milliers de morts jonchent les rues, 880 du coté Versaillais, 6 500 officiels du coté Fédérés, 20 000 à 35 000 suivant d’autres sources. A la suite de 47 000 procès, les plus chanceux des Fédérés survivants sont déportés en Algérie et en Nouvelle-Calédonie (de 7 500 à 10 000) où l’on a besoin de main d’œuvre. Ils ne seront amnistiés que pour la célébration du premier 14 juillet, en 1880.

Quelques émeutes se produisent à Lyon, Marseille, Toulouse, Saint-Étienne, Le Creusot, mais elles sont vite réprimées et la France, dans son ensemble se tient coite. Les Parisiens ne contiennent plus leur vindicte contre les «cul-terreux» de la province.

29 juin 1871 : Paris.

La défaite de 1871 ne crée pas de divorce entre la France et son armée. Le 29 juin 1871, une immense foule acclame à Longchamp une revue de 120 000 hommes dont 15 000 cavaliers. Les républicains qui dirigent désormais la France se tournent vers l’Armée pour incarner l’idéal patriotique.

L’indemnité de guerre est payée avec une rapidité exceptionnelle. Ce qui oblige les troupes d’occupations allemandes à évacuer en hâte les régions occupées. Les unités françaises au fur et à mesure de l’évacuation des départements du Nord réoccupent leurs garnisons. Dès qu’une unité prussienne quitte un village par un coté, les troupes françaises arrivent par le coté opposé. Les soldats vont découvrir que le pays a été pillé, dévasté, ruiné. En Lorraine, les troupes françaises se positionnent au plus près de la nouvelle frontière, ainsi à Nancy le 26 ème Régiment d’Infanterie reprend possession de ses quartiers, dans la joie générale.

Loi du 27 juillet 1872, grande réforme de l’armée.

Les gouvernants vont mettre en chantier une vaste réorganisation de l’armée qui ne sera interrompue qu’à la déclaration de guerre de 1914. C’est la réorganisation préconisée par Napoléon III dont ne voulaient pas ses généraux.

Les premières mesures sont spectaculaires :

Avec ces mesures l’armée permanente passe à 500 000 hommes. Si l’on rappelle les réservistes, l’effectif est de Un million d’hommes. L’armée territoriale peut rappeler 900 000 hommes et sa réserve autant.

Au cours des années qui suivent, la réforme va s’attaquer aux structures même de l’armée.

Tous les officiers sont invités à formuler des idées et ils ne vont pas s’en priver. Elles seront étudiées, testées au besoin. Des commissions vont se rendre à l’étranger pour y étudier l’armement. Ce qui entraîne une profonde modification de l’artillerie et des fusils. Mise en service du fusil Gras à cartouche métallique en 1874. Mise en service de canons à chargement par la culasse.

La Marine échappe encore à cette grande réforme. Ses effectifs sont en constante diminution. Elle construit cependant de nouveaux navires, ceux-ci sont lourds et lents. Il faudra attendre 1895-1896, pour que commence la modernisation complète de la flotte. A la déclaration de guerre en 1914, certains des navires auront plus de 20 ans. Le plus ancien (Le Requin) date de 1878.

1873 : Indochine.

Au Tonkin, une expédition de 55 soldats commandés par le sous-lieutenant Garnier partis à la recherche de commerçants bloqués à Hanoi va permettre la prise de la ville, en dépit d’ordres contraires. 60 soldats reçus en renfort et 150 aventuriers de toutes origines vont permettre de prendre tout le delta du Fleuve Rouge et de conquérir toutes les forteresses annamites. La conquête d’un empire tient à peu de choses. La mort de Garnier va le transformer en héros.

1874 : Indochine.

Traité de Saigon établissant le principe du protectorat français sur l’Annam (devenu Sud-Vietnam).


La fin de la Guerre



1875