Les liens vous renvoient à des photos d'époque

 

 
 Les Dieppois suivent certes avec intérêt la progression des troupes alliées, mais pour le moment ce sont les Allemands qui sont toujours là. Après le débarquement de Normandie, le complot et la tentative d'attentat du 20 juillet contre Hitler, la blessure de Rommel (il se suicidera sur commande en octobre), le suicide de Von Kluge remplacé par Model, entraînent la réorganisation du commandement des troupes allemandes. La 245ème D.I. dépend de la XVème Armée (général Van Zangen). A Dieppe, le Stendortkommandant est désormais le colonel Von Tschirdewan. Renseignement à confirmer, d'un livre à l'autre, les noms des commandants d'unités ne concordent pas toujours. Après le 6 juin, il devient très complexe de savoir qui commande quoi dans l'armée allemande, notamment pour les unités engagées sur le terrain.

 Le 20 août, Montgomery donne l'ordre à la Deuxième Division Canadienne de prendre Dieppe. Cette division a une revanche à prendre. "Je ne doute pas que la Deuxième Division Canadienne s'occupe de Dieppe comme il convient", (I am sure that the 2nd Canadian Division will attend to Dieppe satisfactorily). Après de durs combats dans la forêt de la Londe, la Deuxième Division Canadienne entre à Rouen le 30 août (Il y a 5 jours que Paris a été libéré).

Les 23, 26 et 30 août, les bombardements alliés continuent sur Rouxmesnil-Bouteilles, la gare est une nouvelle fois visée, mais des bombes tombent sur le village provoquant de nouveaux décès. La route Dieppe-Arques qui passe à Rouxmesnil est coupée sur 100 mètres.

L'oppression allemande atteint un paroxysme. Vols, réquisitions frappent toute la population.

Les réseaux de résistance ont tiré de leurs cachettes armes et munitions et harcèlent les arrière-gardes ennemies. Les sabotages se multiplient. Installations des voies ferrées, cables de transmission, sont coupées. Les résistants font un millier de prisonniers qu'ils remettront aux Canadiens.

 

 31 août 1944, 3h15, d'énormes explosions déchirent la nuit. Les Allemands entament les destructions de tout ce qui pourraient servir aux Alliés. Des habitants sont tués. De nombreux blessés sont soignés dans les divers postes de secours installés par la Défense Passive. La fumée des explosions envolée, les Dieppois découvrent les dégâts. Le château est partiellement détruit, la mairie est détruite, le pont Colbert est détruit sur 12 mètres, le quai Henri IV est endommagé ainsi que la gare maritime, la poissonnerie de détail est détruite, la centrale électrique est endommagée, le quai du carénage dans l'avant port est endommagé, le quai de la darse (aujourd'hui réuni au quai Duquesne) est détruit projetant des débris sur les immeubles, le quai de la Marne est détruit, le quai de l'Yser est détruit, le quai de la Somme est détruit, l'entrée du port est encore partiellement bloquée par les 2 cargos de ciment coulés le 10 juin 1940, la plage est couverte de débris, la jetée ouest est détruite sur 150 mètres, le pont provisoire (l'ancien a été détruit en 1940) sur l'Arques est détruit, le pont Ingénieur Alexandre (aujourd'hui disparu) dans l'arrière port est détérioré, les écluses Lavoinne et amont sont inutilisables, 25 épaves jonchent les bassins, sabordés ou coulés par bombardement, les terre-plains sont éventrés, les voies ferrées du port sont détruites, 15 grues sont abattues, 5 portiques sont détruits, des hangars du port de commerce sont détruits, 2 remorqueurs sont coulés, 1 drague est coulée, le dock flottant est inutilisable. Des blockhaus explosent endommageant les maisons environnantes. Les stocks de carburant brûlent. 1 800 maisons sont détruites ou endommagées. Le central téléphonique est hors d'usage.

Les résistants locaux ont réussi à atténuer les destructions en coupant les câbles ou détruisant des dispositifs de mise à feu. Grâce à leur action, le port est encore partiellement utilisable. Dans quelques jours, les navires alliés pourront décharger leur première cargaison. Les policiers encore en ville font la chasse aux pillards. Des constructions allemandes vont échapper à la fureur destructrice, les réserves d'eau construites sur le parc Jehan Ango. Elles seront utilisées comme piscine par une génération de Dieppois et ne seront détruites que pour construire l'Hotel de Ville actuel.

  

Le pont Colbert en 2 morceaux

 

  

Le quai Henri IV détruit
 
 

 Les témoins raconteront qu'aux alentours les explosions se sont succèdées, le phare d'Ailly est en ruines. En forêt d'Arques, tous les stocks de munitions sautent.

Le 31 août, les soldats de la 245ème Division d'infanterie allemande, les marins de la Kriegsmarine, les artilleurs de la Luftwaffe partent avec armes et bagages. On verra les derniers soldats allemands partir à pied dans la direction d'Arques. Les Allemands auront occupés Dieppe pendant près de 1590 longues journées. Ceux de la 245ème termineront la guerre en Hollande.

 

 

Lieutenant Boyd, mort au combat le 31 août 1944, la veille de l'entrée à Dieppe.

(photoJ.D.)

 1 er septembre 1944, opération Fusillade. Le système défensif autour de Dieppe inquiète les Alliés. Une force navale comprenant deux cuirassés appuyés d'autres navires doit bombarder la ville. Des bombardements aériens doivent être effectués. La Deuxième Division Canadienne doit attaquer par l'intérieur des terres dans le cadre de l'opération Fusillade. Ce que les Alliés ignorent c'est que Dieppe a été "oublié" dans les plans allemands qui prescrivent de défendre jusqu'à la mort les places fortes. Il n'y a plus un soldat allemand à Dieppe.

Les éléments de reconnaissance de la 2ème Division Canadienne, qui ont fait la moitié du chemin Rouen-Dieppe la veille, s'approchent de Dieppe. Il est convenu que les bombardements naval et aérien seront lancés dès l'arrivée des premières unités devant Dieppe. Le Premier Septembre 1944, vers 10 h 30, deux motocyclistes du 14ème Régiment de Hussards du lieutenant-colonel Alway entrent à Dieppe par ce qui deviendra l'avenue des Canadiens. Stupeur : aucun coup de feu, tous les habitants de Dieppe sont dans la rue (ils sont 3 000 qui ont refusés d'être évacués) et attendent leurs libérateurs. Ces deux motocyclistes anonymes (peut-être PEDON et SAUTER) sont les premiers soldats alliés à libérer Dieppe. Les bombardements sont annulés.

 

 

 

 Les Saskatchewan, les Cameron, les Mont Royal, les Royal Régiment, les Hamilton, les Essex entrent en ville. Liste des unités de la Deuxième Division en annexe. Parmi les soldats certains ont effectués le raid du 19 août 1942 et c'est avec une grand émotion qu'ils reviennent dans une ville qu'ils n'ont fait qu'apercevoir en ce terrible jour.

3 septembre : la Deuxième Division d'infanterie Canadienne défile dans Dieppe.Tout ce que la ville compte encore d 'habitants est dans la rue et ceux réfugiés dans les villages alentours sont revenus pour fêter nos libérateurs.

Il y aura un grand moment d'émotions lorsque les Canadiens vont se recueillir sur les tombes de leurs camarades tombés le 19 août 1942. Autre moment d'émotion lorsque les Anciens Prisonniers de Guerre remettent aux Canadiens leur fanion en remerciement de leur libération anticipée.

 

(coll.Guy Naze)

 

 

(photo Banque de France)

Le sous-préfet Le Sidaner avec le général Ménard

 Monsieur Pierre Biez, président du Comité Provisoire de Libération Nationale prend les commandes de la commune. Le tort du Maire destitué, Monsieur Levasseur est d'avoir été en poste pendant l'occupation et pourtant quel dévouement. Le commandant Deboudt devient Commandant d'armes de la Place de Dieppe. Un nouveau sous-préfet, Georges Le Sidaner, prend ses fonctions. Georges Le Sidaner qui prend ses fonctions de sous-préfet à 31 ans (né au Havre en 1913) vient juste de quitter Paris où il a participé comme capitaine FFI aux combats de la libération de Paris.

 

Le Gouvernement Provisoire de la République Française a pris le relais de l'État Français et assure la continuité du pouvoir. Les Alliés, surtout les Américains, qui avaient envisagé de gouverner la France comme un pays occupé sont pris de court. L'A.M.G.O.T. (Allied Military Government in Occupied Territories) ne verra jamais le jour. La monnaie d'occupation ne tiendra que quelques mois. Les Français seront invités pour la dernière fois à échanger les billets fabriqués aux USA en décembre 1947.

 

  Bellengreville

(photoJ.D.)

 Malgré leur hâte de s'enfuir, les Allemands raflent des otages sur leur chemin. A Arques la Bataille, 7 ouvriers agricoles sont requis avec leur attelage. On retrouvera les corps de : Ernest Bisson, Abel Caffel, Jules Duhamel, Julien Boucart, Gérard Fabry, Roland Parrain et André Houssay massacrés à Hesmond (Pas de Calais). A Bellengreville : Albert et Fernand Boucher, Joseph Carlus, Léon Colmard et René Hénocq sont emmenés et tués sans motif à quelques centaines de mètres du village.
 

 Tous les journaux ayant paru sous l'occupation sont ou seront interdits. Cette décision entraîne la disparition de la Vigie de Dieppe (dernier numéro daté du 1/9 mais vendu le 31/8) remplacé par la Vigie Nouvelle pendant 3 numéros des 1/9/44, 5/9 et 8/9. Ce titre disparaît très vite au profit des Informations Dieppoises.

Le premier numéro de la Vigie Nouvelle, gratuit, relate avec émotions les premiers instants de l'arrivée des Canadiens.

La circulation est redevenue libre dans la journée dans toute la Seine Inférieure pour les piétons, les cyclistes et les motocyclettes. Pas encore pour les automobiles. La nuit le black-out est maintenu.

Les nouvelles autorités s'empressent de débaptiser le boulevard Pétain (ancien quai Bérigny), il devient boulevard de la Libération, aujourd'hui boulevard Général de Gaulle.

 

N° 2  

( photo Inf.Dieppoises)