DIEPPE

Code : plage rouge pour l'est de la plage                      Code : plage blanche pour la partie ouest

L'attaque sur Dieppe se met en place à 3 heures ce matin du 19 août. Les destroyers Calpe et Fernie, le Locust et l'Alresford conduisent leurs colonnes de LCP et de Landing-craft vers les plages. Les escadrilles d'avions partent de leurs bases pour les premières attaques. Le rideau va se lever sur un drame. 179 LCP portent les troupes de débarquement des Essex Scottish et du Royal Hamilton Light Infantry et les Landing-Craft portent le Calgary, les états-majors de brigades, les équipes de transmission et du génie. Dans une petite pièce sous la passerelle du Calpe, Roberts et ses officiers attendent désormais que l'Histoire les juge. Quelqu'un dira plus tard le matin du 6 juin 1944 : "les dés sont sur le tapis". Rien ne peut mieux mesurer ces instants d'avant la bataille.

Le M.G.B.326 conduit une colonne vers la plage blanche et le M.L.291 une colonne vers la plage rouge. Derrière eux les LCT se préparent à débarquer les Calgary. Les LCP des Fusiliers Mont Royal et du Royal Marine ferment la marche.

La plage de Dieppe longue d'un kilomètre et demi est maintenant parfaitement visible. Pour élargir le champ de tir, les Allemands ont rasé des immeubles à ses extrémités. Seule construction, le casino à l'extrémité occidentale, à moitié démoli et qui va se révéler truffé de mitrailleuses (aujourd'hui zone de chantiers). A mi-hauteur de la plage de galets, un réseau de barbelés de deux mètres. Au dessus du mur, en haut des galets, encore des barbelés. L'esplanade de 250 mètres qui sépare la plage des premières habitations est couverte de réseaux de barbelés qui s'entrecroisent. Contrairement à aujourd'hui où les pelouses sont vides de toutes structures, ils existent en 1942 de nombreux bosquets et des bancs. A l'extrémité Est de la plage, les 2 jetées protégeant l'entrée du port. Des canons légers, des mitrailleuses sont installés en haut des falaises qui dominent la plage. Des grottes ont été aménagées et dissimulent des pièces anti-char, des mitrailleuses, de l'artillerie. Des murs de béton obstruent les rues qui mènent de la plage à la ville. La plage est en outre sous le feu des canons lourds des batteries côtières qui n'ont pas été détruites par les commandos. C'est dans ce piège que vont être jetés les Hamilton, les Essex, les Calgary, les Royal Engeneers.

 

Les objectifs pour les Essex sont de prendre la plage, protéger les Royal Marines qui doivent emmener les chalands de débarquement, rejoindrent à l'est le Royal Régiment of Canada venant de Puys, tout en gardant le contact avec le Royal Hamilton qui doit rejoindre à l 'ouest les South Saskatchewan venus de Pourville. D'autres éléments des deux unités doivent se rejoindre au champ de courses dans la vallée derrière la ville au sud. Les deux bataillons sont couverts par le Calgary. Les Fusiliers Mont Royal sont conservés en réserve dans leurs embarcations pour saisir toute opportunité. Sur le Calpe, Roberts et Hugues-Hallet vont être rapidement dans l'ignorance totale de ce qui se passe sur les plages jaune et bleue. Ils n'ont que des informations partielles de ce qui se passe à Pourville et Varengeville.

Les embarcations approchent sous le feu des destroyers qui pilonnent les maisons de Dieppe, la RAF tend des rideaux de fumées, attaque les batteries, mitraille le front de mer. Le barrage défensif se déchaîne, les obus allemands crèvent les coques, tombent parmi les hommes bloqués dans leurs embarcations. Le bombardement allié cesse lorsque les embarcations sont encore à 200 mètres du rivage. Les landing-craft lancent des fumigènes pour masquer le débarquement. Il est 5H20 lorsque les premières embarcations touchent le rivage.Le lieutenant-colonel Jasperson des Essex Scottish sort le premier. Des hommes tombent, cherchent un abri, d'autres tentent de couper les barbelés. De l'autre coté de la plage, le lieutenant-colonel Labatt du Royal Hamilton sort le premier également de sa péniche. Du casino, les Allemands arrêtent une tentative de déboucher de la plage.Quinze minutes après les Essex, les 3 premiers chars arrivent, puis 3 autres, puis encore 3, les hommes du génie ne sont pas là pour leur déblayer la route. La seconde vague débarque également ses chars, puis la troisième. Avec la troisième vague débarquent également les généraux Lett et Southam, leur état-major et le lieutenant-colonel Andrews commandant les chars. Lett ne peut débarquer. 28 chars sont désormais à terre, certains déjà immobilisés, chenilles cassées. La quatrième vague débarque.

A 6H15, les Essex sont toujours arrêtés derrière le mur du front de mer, les Hamilton se font massacrer mais arrivent à progresser. Une douzaine de chars arrivent à monter sur l'esplanade. Enfin quelques Essex débouchent, foncent sur l'esplanade, atteignent les immeubles, commencent à les attaquer. Cet exploit limité, mal interprété, va causer la perte de plusieurs centaines d'hommes.

Une information erronée parvient à Roberts qui donne l'ordre aux Fusiliers Mont Royal de débarquer sur la plage rouge à gauche de la plage. Arrivés sur la plage, Dollard Ménard en tête, les Mont Royal chargent , ils sont arrêtés dès le mur et plus grave, ils sont sur la plage blanche et même pour certains à l'ouest de cette plage au pied de la muraille des falaises sur une étroite bande de galets.

Tout le matériel lourd est déjà détruit, les chars bloqués, les unités mélangées, c'est l'impasse. Pourtant le casino est enfin presque entièrement conquis par des Hamilton et des Mont Royal réunis. La suite va devenir une série d'exploits de quelques groupes isolés. Un groupe de 18 hommes atteint les maisons, s'infiltre en ville, inflige des pertes aux Allemands qui gagnent la plage puis le groupe se replie. Des hommes atteignent les bassins Duquesne et du Canada, livrent combat à des marins allemands, se rendent, s'évadent, puis se replient. Mais, il reste environ 2 000 hommes sur la plage.

A 6H30, la marine informe que les canonnières n'ont pu entrer dans le port. Les informations sont incomplètes ou entièrement fausses. Les Royal Marine s'élancent pour exploiter une soi-disant percée. Sur dix embarcations, neuf atteignent les 3 000 mètres, plus quet sept à 300 mètres. A quelques mètres de la plage, le colonel des Marines tente de faire faire demi-tour, il est tué mais cinq embarcations y parviennent, et leurs occupants sauvés. Les péniches ne sont plus que deux à s'échouer sur la plage. Leurs passagers sont pratiquement tous tués avant de débarquer. Les LCT tentent toujours de débarquer les chars, leur colonel est tué par un tireur d'élite. Le général Lett parvient enfin à débarquer, il est immédiatement très grièvement blessé, mais peut être évacué. Il est 9H et Roberts donne l'ordre de rembarquement pour 11H pour permettre à la RAF d'arriver. L'information est envoyée aux quelques postes qui restent sporadiquement en liaison. Sur le terrain, les Hamilton ont la surprise de voir apparaître trois chars qui ont pu se dégager des galets et qui ouvrent le feu pour couvrir le repli. Les Allemands contre-attaquent et les 200 Mont-Royal bloqués au pied de la falaise ouest sont faits prisonniers. Ceux qui le peuvent se replient sous le mur en emmenant leurs prisonniers.

Tous les LCP encore disponibles approchent de la plage couverts par 5 destroyers qui tentent de museler les défenses allemandes. Une formation de Boston déversent des flots de fumée pour masquer l'embarquement, avertissement pour les allemands que le rembarquement se prépare. Sous un déluge de fer le rembarquement commence dans la pagaille. Des LCP prévus pour Pourville se retrouvent devant Dieppe. Les avions allemands mitraillent et bombardent la flotte. Un millier de soldats peuvent embarquer dans ce désordre. Les bateaux qui tentent d'approcher sont détruits par l'artillerie les uns après les autres. La flotte se retire. Une dernière fois, le Calpe longe la plage en un ultime hommage, lache ses derniers obus et prend la direction du large. A 13 heures, ceux qui restent sur les plages sont morts, blessés ou seront prisonniers. Les Allemands envahissent les plages et commencent à déblayer le terrain. Ils mettrons 24 heures à faire relever tous les corps par des habitants de Dieppe requis. Le dernier canadien, le caporal JL GILCHRIST sera trouvé le 20 août au soir, blessé mais vivant. Le mer rejettera des corps pendant dix jours encore. 400 tués jonchent la plage, les Allemands emmènent près de 1500 prisonniers.

Dieppe 19 août 1942

 

Dieppe 2003