L'on ne peut parler de pistes sahariennes
sans parler de dunes, de fech fech, de sable mou , de sable dur,
de tôles ondulées, de plateaux rocailleux, de pistes
au milieu de rochers, d'Akba, de vent de sable, de traces de roues
nous indiquant la direction à prendre, de puits d'eau où
nous pouvions apercevoir les mulets chargés de bidon et
de jerricans, de casse de matériel, de lames de ressort,
de prise d'air, de remorquage, de réservoirs d'air compressé,
pour regonfler les pneus que nous dégonflions sur le sable
mou, de plaques à sable (les PSP) pour se désensabler.
Nous bivouaquions, si possible en dehors des oued (synonymes de
petites bêtes très désagréables pour
la santé, scorpions, tarentules et quelquefois vipères
à corne), avec le feu pour la cuisine avec le gaz oil ,ou
le bois ramassé sur les pistes. Bien souvent nous mangions
la chorba avec l'harissa, et souvent du corneed beef, avec les
haricots verts en boite accompagnés d'oignons ou les pâtes.
Bien évidemment nous ne pouvons oublier la chaleur, les
bouteilles d'eau, entourées de tissu mouillé, accrochées
au rétroviseur extérieur pour le refroidissement
par la vitesse du camion, les vents de sable, où il valait
mieux s'arrêter et nous ne devions surtout pas avoir le
pied par terre en tenant la barre de montée sans risque
de prendre un sérieux coup d'électricité
statique.
Je revois les images de course du slughi avec les gazelles, la
sieste sous les camions, la sieste au détachement, avec
un drap mouillé sur le corps et installé en demi
cercle autour du climatiseur, afin de pouvoir dormir, les dromadaires
et les pelotons méharistes. Notamment un peloton de méharis
que nous avons replié de Djanet par convoi de GBO. Je me
souviens d'un rapport concernant un transport de munitions, ou
notamment un GBO s'est littéralement volatilisé
au dépôt de munitions de Flatters, la hauteur de
ce mastodonte fut réduite à environ 50 cm.
Je ne peux oublier les soirées
dans certains postes militaires ou nous étions très
souvent invités (tradition saharienne). Je revois l'image
des camions Kenworth appartenant aux pétroliers, chargés
de tuyaux de pipe line, que l'on reconnaissait au loin sur les
plateaux d'Ohanet ou d'In amenas par leur fumée noire du
pot d'échappement vertical au dessus de la cabine, tel
un bateau sur un océan de sable.
La disponibilité et le sens d'aide sur la piste, que l'on
soit civil ou militaire, en cas de pépin était obligatoire,
c'était un homme qui était seul en face de son problème.
Il n'y avait plus que cela , et lorsque l'on faisait plusieurs
jours de piste sans rencontrer âme qui vive, l'on ne pouvait
abandonner un chauffeur civil ,dans le désert avec son
incident mécanique.
L'on ne peut oublier la conduite sur la piste où le temps
n'existe presque plus, et où les moments sont forts.
" Inch Allah ! " jamais pour nous cette expression ne
fût plus réelle et véridique. L'on ressent
cette impression de fatalité et d'être dans les mains
de quelque chose d'autre
.
Chaque mot, chaque expression, déclenchent des souvenirs
dont il serait trop long à raconter, à décrire,
sur un site internet aussi bien réalisé soit il.
(Marcel FEUILLOIS).